Débat du 21 mars 2010 : « La quête de la pureté passe-t-elle par la salissure ? », animé par Sylvie Pétin.

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Posted on 22nd mars 2010 by Carlos in Comptes-Rendus

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La quête de la pureté passe-t-elle par la salissure ?

Animation :  Sylvie Pétin

Le 21 Mars, malgré un sale temps qui empêcha ma chemise de sécher, me déviant de l’urne Régionale avec une chanson de Jacques Brel sur les lèvres de ma mémoire : « Au Printemps, au Printemps/ Et mon cœur et ton cœur/ Sont repeints au vin blanc… », j’ai pris le chemin du Café des Phares où Sylvie Pétin a choisi d’animer le sujet « La quête de la pureté passe-t-elle par la salissure ? » Pas nécessairement, me suis-je d’emblée dit et dès lors, si c’est du contingent, au cas par cas, ça ne nous intéressait pas vraiment comme devinette ; la philosophie n’est pas un baril de lessive plein de potasse caustique qui lave plus propre que le bicarbonate de sa voisine, en l’occurrence Madame Catherine Bréhat présumée auteure de la boutade.

Pourtant, décidée à trouver la pureté sur place et dans l’heure, telle une Mère Denis, que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître, l’animatrice entrepris de laver, rincer et essorer les pensées du public qui, les yeux rivés sur elle triait, entre émotions et concepts, le linge de la problématique soulevée, dans une forme de vagabondage de proximité le long du prêt-à-penser.

Pour que l’on comprenne bien, cette question équivalait à « La quête de la pureté, c’est-à-dire, de ce qui est dépourvu de souillure peut-elle se faire sans être altérée par quelque chose de crasseux, de répugnant ? » On dirait que nous aimons bien laver le linge sale en famille à l’aide d’arguments détersifs car, même sachant que la prémisse est incongrue, quitte à se rendre complice d’une délicieuse confusion entre le réel et le « philosophique », le public veut toujours y croire. Il prend n’importe quel thème à bras le corps afin de l’étirer dans tous les sens, pour construire un débat coûte que coûte, et trouver finalement ce qu’il cherche : une fiction sans conséquences. Y a-t-il là production de sens ? C’est aussi barjot que « deviens ce que tu es pour avoir confiance en toi », et je vous donne des équivalents de l’idée : Pour être vivant, faut-il passer par la mort ? Pour se trouver, faut-il se perdre dans un labyrinthe ? Pour être propre, faut-il se couvrir de boue ? Pour sourire, faut-il être désespéré ? Pour être vierge, faut-il passer par le viol ? Pour aimer, faut-il avoir un cœur greffé ? Pour trouver Dieu, faut-il aller le chercher en enfer ?

Il me semble que, apte à accueillir la divinité au sens littéral du mot, le pur, ni altéré ni vicié, est exclusivement ce qu’il est, une catégorie métaphysique distincte du propre (catégorie physique) et à fortiori du sale qui, renvoyé à quelqu’un, devient pour Sartre une catégorie existentielle (le salaud qui traite l’autre comme un moyen et jamais comme une fin).

Mais, peu importe ; revenons au débat. On a commencé par mentionner « les trois couleurs pures ou primaires puis la complexité qui va ensemble avec la salissure au détriment de la pureté originelle (concept moral de Platon) ainsi que de la virginité et la simplicité ». Ensuite, « à propos de Descartes et ses ‘Méditations’, les différents intervenants ont évoqué l’infini, Dieu, Nietzsche, les Cathares, la rationalité, ainsi que ‘la statue intérieure’ et ‘la blessure plus près du soleil’ ». Sans oublier ni Adam et Eve ni le Bouddha, nous avons encore rappelé les Ayatollahs et le Pape Benoît XVI, parlant même de l’eau et du feu que l’on lie à la purification avec un petit détour par le cœur, le poumon et l’effusion de sang sans laquelle il n’y aurait pas de pardon », jusqu’à ce que la voussure des représentations emphatiques s’affaissât sur le point critique. Enfin, une confusion intellectuelle ou pure construction sociale qui n’a rien démontré ni révélé.

A part ça, je vous jure, feu mon oncle, en déplacement en Inde, a plongé un jour dans l’eau sale et boueuse du Ganges sous prétexte que le fleuve est le symbole de la pureté parmi les Indous ; vous auriez dû voir l’état de sa chemise !

Carlos Gravito