Malgré le froid, engoncé dans mes cogitations en guise de pardessus, je me suis adressé le 5 Décembre au Café des Phares, où Sylvie Pétin, chargée de conduire l’habituelle séance à caractère philosophique, a choisi comme sujet « Je pense, donc je nuis ». Autrement dit, « Je nuis parce que je pense », ce qui n’est pas bon pour la pensée, ni pour la logique, ni pour le Cogito Cartésien, mais avait l’air d’exciter la meneuse du débat.
Essayant alors de faire le grand écart entre Descartes et Rousseau, l’animatrice n’a pas pu se relever et, malgré ses appuis sur Protagoras, Spinoza, Kant, Hannah Arendt, ou même l’Ane de Buridan, elle a été incapable de se départir d’une flagrante mauvaise foi qui l’a amenée à légitimer les malfaisances de chacun à l’aide de l’évidence intuitive du fondement de la conscience de soi, une valeur ontologique exprimée par le « Je pense, donc je suis ». Braquée dans une attitude dénaturée qui consistait à rapprocher l’éventuelle posture malsaine d’un Homme à celle d’un animal dangereux, de concert avec l’illustre assistance, elle prétendit en somme que le premier serait dépravé en raison de son privilège de penser ; faisant feu de tout bois, elle a essayé de prouver par A plus B qu’une telle prédisposition à nuire avait des liens avec ses capacités de réflexion, à l’origine également du Mal absolu dans la civilisation occidentale, alors qu’un être humain normalement constitué ne nuit que s’il ne pense pas. Y a-t-elle pensé ?
Carlos Gravito