Le débat du 21 août 2011 : « Ici et maintenant », animé par Jean-Luc Berlet.

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Posted on 17th août 2011 by Gunter in Comptes-Rendus

A écouter quelques échos immédiats post-débat, le débat de ce dimanche 21 août n’a pas rempli les espoirs de tous les participants. Nous n’avons pas assez parlé de ceci, pas assez parlé de ça…. Impossible d’épuiser un sujet aussi banal que « ici et maintenant », le fameux « hic et nunc » dans un « ici et maintenant » de même pas deux heures. Suspendu entre ce qui n’est plus et ce qui n’est pas encore, cet « ici et maintenant » s’avère particulièrement difficile à saisir. S’en préoccuper, une situation « intenable », s’exclame, désespéré, un participant : Le moment présent ne tient pas ! Heidegger s’en serait déjà inquiété : le moment présent s’évapore en passé dès qu’on le touche. Pourquoi donc en parler? L’analogie du présent avec le point théorique « zero » en mathématique est évoqué. Un point ? Non, cela ne plaît à tout le monde. On propose une tâche. Une tâche ? Pourquoi pas une bulle qui nous enveloppe ? La zone de contact avec l’environnement. Bulle : cela fait bondir. « Se retirer dans sa bulle », c’est se désengager, ne pas rencontrer l’autre. La bulle peut protéger, mais devenir aussi prison, c’est vrai. Mais nous avons une sphère d’influence, un périmètre d’action. « Ici et maintenant », peut-être la « zone » de la rencontre possible, limité par la zone de la rencontre impossible. Trop de distance : pas de rencontre possible. Pas assez de distance : intrusion, confusion. Oui, la rencontre a été souvent évoquée, me semble-t-il. Rencontre, par exemple, des temps différents : Le passé infiltre le présent et en fait partie intégrale. L’imagination envoie des antennes vers le future, oriente notre action. Le future fait donc également partie du présent. Ou’ en pensaient les anciens ? Indissociable de l’école d’Epicure, nous dit-on. Profiter de l’instant présent, l’hédonisme, quoi. Avons-nous parlé beaucoup du plaisir ce dimanche? Non, pas vraiment. Que faire de l’instant présent ? N’est-ce pas l’unique « lieu » d’action ? Curieux juxtapposition, dans cette expression, du lieu et du temps. Déjà : comment définir le temps dont l’expérience varie selon la situation? Le lieu, la localisation : Ici : ni en haut, ni en bas, mais là. Par rapport à quel ailleurs? « Ici et maintenant », un instant infiltré par le passé et parasité par l’avenir. En tant qu’adulte responsable, nous avons l’orgueil de pouvoir anticiper l’effet de nos actions du moment au point de chercher à ne pas faire n’importe quoi. On ne peut plus profiter du moment présent comme les enfants qui le dégustent « vierge » de peur, de responsabilités. Malgré les apparences raisonnables de l’adulte, l’expérience montre que, si l’intention est souvent bonne, l’effet de ses actions est bien moins prévisible. Le futur devenu présent nous réserve donc toujours des surprises… qu’il s’agit de recevoir. Oui, le moment présent interroge notre capacité de recevoir. Le débat philosophique du dimanche ne déroge pas à cette réalité. Recevoir dans le cadre du débat philosophique non seulement le discours attendu mais aussi celui qui irrite, qui s’écarte, qui tire dans l’autre direction que celle qu’on avait envie d’entamer. Recevoir le discours de l’autre et le travailler, l’intégrer dans une toile de sens, une pensée cohérente dans l’ici et maintenant d’un débat philo …
Ce travail n’est pas toujours de tout repos. Nous aimerions profiter, au moins le dimanche, de ses moments sympathiques ou nous ressentons le sentiment agréable qu’on appelle « plaisir » et qui signe, à croire Spinoza, « le chemin d’une moindre perfection vers une perfection plus grande ». Mais l’autre borne du développement humain, c’est le sentiment de frustration. On l’aime moins, c’est vrai. A entendre les commentaires de mécontentement à chaud ce dimanche, je me suis dit : le débat n’a peut-être pas plu, mais il a sûrement fait bouger quelques certitudes!

Elke