Débat du 3 Novembre 2013: « Le malheur de n’être que soi », animé par Pascal Hardy.

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Posted on 6th novembre 2013 by Carlos in Uncategorized

Tandis que d’importants événements culturels se déroulaient à la Maison de l’Unesco, à propos du développement durable et des droits humains, diverses rencontres, manifestations ou colloques secondaient la gronde bretonne des ‘bonnets rouges’, à propos de l’Ecotaxe sur les véhicules transportant des marchandises, qui finit par être suspendue. Concernant les actualités mondiales, le pays fut bouleversé par la mort donnée à deux des journalistes français travaillant au Mali pour RFI, victimes du terrorisme international, ce qui provoqua l’indignation et la colère au delà de ses frontières. Puis, le 3 Novembre 2013, du côté du Café des Phares® eut lieu l’habituel débat dominical, intitulé, ce jour-là : « Le malheur de n’être que soi ! », animé par Pascal Hardy.

Cela se passait donc dans une salle de café, devant une centaine de personnes qui voulaient vivre la singulière transmigration hebdomadaire, et le sujet choisi nous présentait l’hypothèse d’un quidam se trouvant en rupture avec la réalité, dans une sorte de psychose maniacodépressive, étant là, existant, mais seul avec lui même.   

 Le fait est que, « n’être que soi… », s’associerait à un malheur ! Il ne s’agissait donc pas d’être simplement seul. Non ; il était question d’être aussi bien solitaire que morose. On se trouvait, de toute évidence, devant un cas de syndrome dépressif ; être soi et personne ou rien d’autre de plus. Pas sa mère, pas son voisin, pas son arrosoir, alors que l’on sait que la solitude prédispose à la démence, sérieuse pathologie qui demande une prise en charge psychiatrique. Il s’agissait de n’« être » que soi, ce qui serait déplorable, donc. Or, à part soi, qui d’autre pourrions nous être ? C’est ça la question, au fond : « A qui s’allier si l’on veut être heureux ? » Il y a là le sentiment d’un désir d’être aussi bien quelqu’un d’autre, que la totalité des êtres, au demeurant… Délire mégalomaniaque ?

Prévoyant toute méprise, Socrate avait convié les Hommes à bien se connaître adoptant la maxime « Gnothi seauton » (« connais-toi, toi-même »), consigne écrite sur le Temple de Delphes. Dès lors, on est sensés savoir ce que « Soi » comprend, c’est-à-dire, un corps anatomiquement réel, avec peau, os, viscères, énergie ou fragilité. Il semblerait, cependant, que nous le connaissons mal, ce « soi », aussi bien dans sa puissance d’exister que dans la profondeur de l’être ou substance vitale, au point d’en être malheureux, ce que Spinoza redouta, clamant que « nous ne savons pas ce que peut notre corps, ni cette âme, dénommée « noûs », principe de la connaissance intellectuelle ». Nous sommes donc à bras, tout à la fois, avec ‘le physique’, le ‘psychique’ et l’‘intellect’, voire, « sômma », « psyché » et « noos », dans le processus de reconnaissance de notre Identité, notre « Ego » et notre « Soi » à la mine chafouine. D’après notre sujet, cela serait, pourtant, trop décevant, lamentable, malvenu. Afin d’être heureux, nous faudrait-il un sosie, un revenant, un double, se revêtir de la peau d’un autre ou, comme Rimbaud, être aussi identique qu’étranger à soi ?

Bref. « Etre » serait une avanie, le corps n’étant pas au courant de ce qui se passe ! ‘Sôma’ et ‘psyché’, constitueraient un ensemble en même temps harmonique et conflictuel, décidés à écouter Rousseau : « Malheur à qui n’a plus rien à désirer ». Le fait est que, si le monde est déterminé, nous n’avons pas le choix. « Nous ne pouvons pas être autre chose que ce que nous sommes et pas devenir ce que nous ne sommes pas ». Ainsi, pour Descartes : « il faut choisir entre ‘se changer soi-même’ ou ‘changer le monde’ ». Que dit la conscience ? « Tu dois devenir celui que tu es » , voilà. La vraie Liberté est de l’accepter. Pourquoi « n’être que soi » serait-il un malheur,  si ‘soi’ a la raison et le droit ?

Comme habituellement, Gilles nous gratifia de ses rimes, « de soi à soi ; de moi à toi », puis, l’animateur confia que, « cuisinant, on cherche à savoir ce que l’on fait », avant de mettre fin au débat, puis nous nous éloignâmes de notre cénacle, la mine déconcertée, pour ne pas être autre chose que nous-mêmes, tel ce à quoi nous avons joué.

Devant le quiproquo, je prendrais l’attitude de Unamuno, recteur de l’Université de Salamanca, répondant aux franquistes qui prônaient « Viva la muerte » : « Il y a là, dans ce sujet, … un manque de raison…  J’ai terminé »…

Puis, chanterai avec Jacques Brel :

« Etre heureux, une heure seulement,

Etre heureux, une heure quelques fois,

Etre heureux, rien qu’une heure durant… »

Carlos

2 Comments
  1. Gilles ROCA says:

    Le malheur de n’être que soi … Pascal Hardy, Aux Phares,

    Le malheur de n’être … que soi, sans L’Autre’, en Lien, Le malheur de ne naître … que de soi, À soi,
    Le malheur de ne pas naître … soi … Autre’, À L’Autre’, en Lien, de soi, Autre’, À L’Autre …
    Lien qui Advient, qui naît, co-naît, grandit, qui croît, Augmente … soi,
    réfléchi, enrichi, en Lien, du « mien » … Au « nôtre’»,
    « [en Lien, de moi À moi, en Lien, de moi À toi, de toi À moi,
    de moi À chaque’- une’, À chaque’- un,
    de chaque’- une ... chaque’- un,
    hors de sa « chacunière’», À son’ Alter’, À moi ] » …
    Jean Cardonnel, J C – G R, serviteur, « distance, prise, par chacun, Vis’- À – Vis de soi-même’»,
    en Lien, Avec’ Autrui, qui Le sort de Lui-même,
    « Tout’ homme’ est deux’ hommes, et Le plus Vrai est L’Autre »,
    Borgès’, sois Vrai envers toi-même … L’Autre !,
    « [ Sans La rencontre de L’Autre ...
    je ne suis qu’une moitié d’humain ] », Georges Hourdin, de moitié en moitié, en Lien, humain, Autre’,
    entier, Lien d’Amour d’Amitié,
    intime’, universel,
    un, singulier, pluriel,
    « [ en soi-même’, en qui L’Autre, tous Les’ Autres’ ... existent ] »,
    Krishnamurti, en Lien, d’humanité, en peuple … pluri-Ailes, en tout’, en’ un, en Christ’ …
    Gilles Roca,

    Cas-
    fée-Philo des Nés-nus-Phares, 3 novembre’ 2013’, en ces-jours de Brumaire,
    d’êtres, en soi, philo-phares, et qui sur d’Ardentes braises … dans La brume’ errent, … G R

    6th novembre 2013 at 19 h 08 min

  2. Elke says:

    « Etre que soi » ? ». « Etre que moi », c’est tout simplement impossible pour un être vivant, condamné à être en interaction constant avec son environnement. L’humain est en plus un « Etre sociale » en relation constant avec un groupe, et cette relation se concrétise dans l’interaction. L’interaction humaine est l’unité fonctionnelle du devenir humain. Au cours de ces interactions, une valeur est attribuée à chacun. La parole de chacun « vaut » combien ? Cela se traduit en monnaie (via les grilles de salaire), mais aussi en terme de réseau social (combien de personnes sont prêt à interagir avec moi, avec combiens de personne puis-je interagir). De l’interaction, on peut constater : certaines « me rapportent », d’autres « m’appauvrissent ». C’est dans la capacité de donner et de recevoir, dans les transactions de toute sorte qu’on pourrait définir « sa valeur ». Et le discours de Smith sur l’élaboration de la valeur d’une marchandise à travers le savant jeu des coûts et bénéfices est parfaitement transposable à l’humain et sa « valeur » sociétale. Je serais tentée de dériver sur la notion de « valeur » d’une personne humaine, mais ce n’est pas le sujet aujourd’hui !
    Donc, puisqu’ « être que soi » est contraire à la vie, ce serait vraiment un malheur d’être que soi. Tout seul, on ne peut rien faire. L’impuissance total, mort assurée. Dans le besoin de traiter ce sujet, j’entends la déception profonde de chacun d’avoir un rayon d’action limitée. Mais aussi l’absence de prise sur l’environnement. Les processus décisionnels dans notre société échappent au contrôle de l’habitant lambda qui perçoit néanmoins les dangers ou les effets de notre société qui s’est égaré dans un modèle dont on perçoit les limites. Comment développer la conscience de pouvoir redéfinir les règles de vie d’un vivre ensemble différemment ? On en vient à la tentation de ne plus rien faire : à quoi bon ? Avec un président comme celui qu’on a, qu’il s’appelle Pierre, Paul ou Jacques, comment espérer que les choses puissent changer un jour ? La conscience de notre capacité d’action limitée sert parfois à légitimer notre in-action et de déplacer toute les responsabilités à l’extérieur de soi. Le malheur d’être que soi ne tient qu’à moi : il suffit d’ouvrir les yeux, et je peux me mettre en lien avec le monde qui m’entoure. Il n’est pas ce qu’on a espéré ? Soit. Mais pour la qualité de l’interaction que je vais initier avec l’environnement, j’ai ma part de responsabilité et je dois pouvoir l’assumer. La valeur ajoutée de toute interaction avec le monde vient du travail de discernement que je joins à l’acte pour ne pas faire « n’importe quoi ». Je peux joindre la communauté de mon choix pour ne pas me sentir isolé, pour donner du poids à ma parole. Indignés, colibris, objecteurs de croissance, consomm’acteurs, mouvements paysans : de plus en plus de jeunes et moins jeunes s’organisent pour ouvrir un avenir possible. Et je leur dis : Bravo !

    6th novembre 2013 at 9 h 26 min

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