Débat du 19 septembre 2010 : « à quoi faut-il s’attendre ? », animé par Gérard Tissier.

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Posted on 28th septembre 2010 by Cremilde in Comptes-Rendus

Bonjour. J’ai choisi ce sujet car la question première du sens et de l’utilité sociale d’un café philo serait de comprendre le monde tel qu’il évolue, le mouvement qui le détermine et la manière dont chacun peut produire aussi du monde et incarner sa liberté.

Pour sortir de la tentation de l’ego-philosophie, il est pour moi intéressant d’inviter à imaginer l’avenir au présent. Le monde qui nous traverse et que nous traversons sans le voir peut se lire dans certaines évolutions. Sans les lire comment savoir « à quoi faut-il s’attendre ? »

Voici à titre d’éclairage post-débat, le chapeau d’une série d’articles sur le monde tel qu’il évolue paru dans le numéro anniversaire de la revue le Débat :

« Quelles ont été les forces fondamentales de renouvellement de la conscience collective depuis trente ans ?

Il nous a semblé possible d’en identifier cinq : la poussée de l’individualisme, le retour des religions, la prise de conscience écologique, la montée en puissance de la recherche scientifique, l’irruption des réseaux numériques.
Il a été beaucoup question de l’individu depuis 1980, y compris dans ces colonnes mêmes. Mais quel individu ? À y regarder de près, sa figure a notablement évolué. Marcel Gauchet propose une périodisation de ces déplacements.
La révolution islamique de 1979 en Iran a marqué le coup d’envoi d’une spectaculaire reviviscence du religieux au premier plan de l’actualité. Mais le phénomène est tout sauf simple, derrière ses apparences massives. Jean-François Colosimo en explore les ambiguïtés.
De la « pollution » au « développement durable », l’entrée en scène de la préoccupation pour l’avenir de la planète est, à n’en pas douter, l’un des apports marquants de la dernière période. Or elle a emprunté en France des chemins tortueux et contrariés, montrent Dominique Bourg et Alain Papaux. Ils interrogent les motifs de cette exception et les voies par lesquelles elle s’est résorbée.
Ce n’est pas d’aujourd’hui que les sciences et les techniques jouent un rôle moteur dans le devenir de nos sociétés. Cette capacité transformatrice semble toutefois avoir pris un caractère inédit en se faisant toujours plus systématique. Notre avenir, nous assure- t‑on, c’est la « société de la connaissance ». Dominique Pestre analyse cette mutation.
Comme il se devait, Internet occupe une place de choix dans le tableau.
Le moment est venu, pour commencer, au-delà des légendes et des mythes d’origine, d’établir scientifiquement l’histoire de cette émergence majeure. Pascal Griset met en lumière ce que ce travail critique apporte à l’intelligence des réalités du secteur.
Les incidences cognitives des « nouvelles technologies de l’information et de la communication » ne sont plus à souligner, même si leur nature est difficile à apprécier. Christian Vandendorpe dresse le bilan de ce que l’on connaît de leurs effets sur la lecture.
Mais Internet constitue également un formidable laboratoire idéologique. C’est toute une vision du fonctionnement économique et social qui s’y fabrique et s’y propage. Le capitalisme décontracté, mais sans complexe, y est roi, fait ressortir Monique Dagnaud. Sur ce terrain-là aussi, l’examen des réalités est rude pour les chantres de l’utopie. »

Eclairant non ?

Après une longue conclusion d’Alfred, auteur du sujet, je me suis permis d’évoquer les travaux d’une centre de recherche qui a publié, il y a dizaine d’année, des scénarios prospectifs pour le 21 ème siécle.

Ces travaux nous parlent d’un temps futur ( 2030- 2050)dominé par les valeurs féminines..Ma vieillesse me conduira- t- elle jusque là ?
Peut être pas. A moins que, tous ensemble, nous nous mettions à vouloir mettre un peu plus de tendresse dans la civilisation.Une façon, pour le moins, de répondre aux questions que nous inventons pour trop souvent en critiquer la syntaxe sans voir que la colonne de juillet, tout près au centre de la place de la bastille, porte en sa base, des cercueils de morts de la Commune et en son sommet, la flamme du progrès contre le vent de l’histoire ( la révolution de 1848 ).

Gérard Tissier

9 Comments
  1. Gunter Gorhan says:

    Au cours des échanges sur « A quoi faut-il s’attendre ?», je me suis vu changer à 180 ° quant à l’enjeu existentiel de cette question :
    Ma première réaction : il faut soigneusement distinguer entre attendre quelque chose ou quelqu’un, et s’attendre à …
    Le café des Phares, pas plus qu’un autre café philo n’étant une salle d’attente (de jours meilleurs, de la sortie de Crise, du Grand Soir, de la mort, etc.) mais plutôt une communauté de recherche, de vigilance, bref, une communauté attentive et attentionnée. Attentive à quoi, attentionnée par rapport à quoi ?
    A ce qui nous arrive, à ce que nous participons qu’il arrive, que nous le sachions ou pas, mais mieux vaut le savoir – d’où la nécessité de philosopher – à l’événement qui, si l’on suit Nietzsche sur ce point, arrive sur des pattes de colombe ; soyons donc attentif à…, afin de participer en connaissance de cause à…
    Heidegger a exprimé, je crois, la même idée : « J’attends ce que je n’attends pas », sans ajouter, probablement échaudé par son engagement politique néfaste dans le passé : »Je reste attentif à… » Et je remarquais alors que le fait de ne s’attendre à rien était une posture nihiliste, résignée, voire désespérée qui a fait dire à Octavio Paz, s’adressant aux jeunes au tournant du dernier millénaire : « N’attendez rien du 21ème siècle, car il attend tout de vous ! »
    Puis, en écoutant les uns et les autres, j’ai vu autrement la question : Il vaut peut-être mieux de ne s’attendre à rien en écoutant vraiment autrui, s’attendre à quelque chose reviendrait dans ce cas à anticiper, à préjuger de ce qu’il va dire et donc, au lieu d’être le plus ouvert possible, de l’enfermer dans ce que l’on croit savoir sur lui. Bref, de ne plus se laisser étonner, de dénier à autrui la profondeur de son mystère existentiel abyssal qu’il est aussi pour lui-même s’il arrive à s’écouter lui-même, puisqu’il dit toujours plus ou autre chose de ce qu’il avait la « claire conscience » de dire…
    Car « Si on regarde un homme au fond de ses yeux [et si on l’écoute au fond de ses paroles, G.G.], on y voit toute la nuit du monde », ce qui est un peu plus vaste que l’inconscient freudien.
    Mais, comme l’a dit un jour un fidèle des Phares : »Si la parole est un besoin, l’écoute est un art » difficile, autant pour moi que pour n’importe qui, qui exige de faire le vide en soi avant de pouvoir créer, ne serait-ce qu’une vraie parole.

    28th septembre 2010 at 14 h 05 min

  2. Jules.LT says:

    Autrui n’est pas toujours si surprenant. Il n’est bien sûr pas entièrement connaissable, mais de là à ne s’attendre à rien… c’est effectivement assez proche du nihilisme. Ça me paraît aussi impossible et paralysant que le doute hyperbolique de Descartes.

    Le principal intérêt d’être ouvert à de nouvelles idées est de remettre en cause nos convictions pour s’en forger de plus justes. Nous ne sommes pas des tables rases et notre perception est fatalement déformée par nos attentes.

    Ce n’est pas qu’il ne faut pas avoir d’attentes: il faut savoir ne pas s’en tenir à ce à quoi on s’attend.

    28th septembre 2010 at 22 h 55 min

  3. Gunter Gorhan says:

    « Autrui n’est pas si surprenant », vraiment ?
    Toute la question est là !
    Non seulement autrui, mais la réalité entière n’est-elle pas d’autant plus surprenante qu’on progresse dans sa connaissance ?
    Quelle métaphore est la bonne : celle de la réalité (et d’autrui) comme un espace obscure, fini et fermé que nos sciences éclairent de plus en plus jusqu’à le voir entièrement éclairé ?
    Ou bien celle d’une plaine infinie et plongée dans le noir, dans laquelle nos sciences découpent au fur et à mesure de leurs progrès un cercle de lumière grandissant et dont la circonférence obscure et donc le mystère grandissent en même temps et au même rythme ?
    Les scientifiques eux-mêmes, ou plutôt ceux d’entre eux qui en plus de leur science « philosophent », sont partagés ; ce qui n’est pas surprenant : la philosophie qu’on a ne dépend-elle pas du type d’humain qu’on est ?
    Ou bien on se vit comme un objet fini dont on peut, pourra un jour « faire le tour », ou bien on se vit comme infini, irrémédiablement insaisissable à tout savoir objectif, scientifique.
    Dit autrement, ce qui est rassurant pour les uns (le mystère de l’Être prendra fin) inquiète, voire angoisse d’autres…
    Qui a raison ? La raison peut-elle d’ailleurs trancher ici ?
    Je suis d’accord : on ne peut faire le vide absolu en soi pour vraiment accueillir (la parole de) l’autre ; on ne peut que désirer progresser dans cette voie tant qu’on est vivant ou peut-être plus exactement : connaître, détecter, de mieux en mieux, ses propres préjugés (« préjugements », H.G. Gadamer) afin de les empêcher de trop parasiter notre accueil et notre écoute…

    28th septembre 2010 at 15 h 35 min

  4. Jules.LT says:

    Ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit: Autrui n’est pas *toujours* si surprenant. Si nous persistons dans nos attentes, c’est souvent parce qu’elles ont été validées par notre expérience.
    La tentation est d’autant plus grande de faire de nos expériences une règle universelle, et d’ignorer l’exception alors que ce sont justement les exceptions qui sont intéressantes!*

    La progression scientifique n’opère pas autrement: on est passés de « les choses tombent vers le sol » à la théorie de la gravitation, puis à la théorie de la relativité puis à la théorie des cordes… On a une théorie, on constate des exceptions et on essaye de trouver une nouvelle théorie qui prenne en compte ces exceptions.
    On a une vision du monde, on rencontre des idées qui n’y correspondent pas, on juge de la justesse de ces idées, et on réajuste éventuellement sa vision du monde. Bien sûr, la justesse d’une idée est bien plus délicate à juger qu’une observation scientifique.

    * En fouillant bien, on trouve toujours quelque chose d’étonnant ou d’intéressant dans tout et chez tout le monde… mais de la même façon que nous n’essayons pas de lire tous les livres car ils n’ont pas tous autant à nous apporter et qu’il faudrait pour cela bien plus d’une vie, nous sélectionnons, préjugeons sur les gens. C’est inévitable et il ne s’agit donc pas de vouloir ne pas préjuger mais plutôt de trouver la meilleure règle possible pour décider jusqu’où approfondir au-delà du préjugé.

    28th septembre 2010 at 19 h 16 min

  5. Jules.LT says:

    Comme la position « par défaut » d’à peu près tout le monde est de bien trop se fier à ses préjugés, je suis bien entendu en accord avec votre conclusion d’un point de vue pratique.
    N’hésitez pas à me le dire si je pinaille trop sur la théorie… :-P

    28th septembre 2010 at 19 h 35 min

  6. Gunter Gorhan says:

    De quel droit jugerais-je que vous pinaillez trop ou pas assez ?
    La seule chose que je redoute, ou plutôt qui fait baisser mon intérêt, c’est l’abstraction, lorsque je n’aperçois plus d’enjeu réel, mais une simple joute d’idées en apesanteur ; il se peut aussi qu’il y a un réel enjeu – c’est-à-dire l’issue de l’échange risque de changer quelque chose dans ma vie et/ou mes pensées – qui m’échappe, que je ne peux/veux pas voir. Comme quoi, un vrai échange est vraiment un art difficile…
    Qu’est-ce qu’une position par défaut ? N’est-ce pas un terme d’informatique ?

    28th septembre 2010 at 13 h 47 min

  7. Jules.LT says:

    Je ne me souvenais plus d’où sortait cette expression. Elle est effectivement utilisée en informatique.
    Sur une machine, on parle des réglages « par défaut »: ce sont ceux qui sont en vigueur si l’utilisateur ne change rien. Par extension, c’est la position que nous sommes amenés à avoir si nous ne faisons pas l’effort conscient d’en adopter une autre; celle qui suit notre penchant naturel, et autres facteurs principaux qui forment notre psyché.

    L’idée de ne pas du tout préjuger me semble non seulement inatteignable mais indésirable, mais c’est probablement une question de forme plutôt que de fond: il s’agit de se débarrasser de ses *excès* de préjugés.
    Cela a tout de même le mérite de faire revenir au sujet: s’il y a des attentes/préjugements qu’il est bon d’avoir, quels sont-ils et selon quelles modalités?

    Il y a ce qui nous permet de vivre au quotidien: prévoir nous permet d’agir en fonction de données qui ne nous sont pas encore connues.
    Il y a ce qui nous permet d’interagir en société: savoir à quoi s’attendre face à tel ou tel individu, s’en faire une idée générale pour agir de manière appropriée avec lui…

    Le problème, c’est que ces situations sont extrêmement diverses et complexes. Peut-on dégager des règles sur ce à quoi il faut s’attendre? Dans quelle mesure peut-on changer ce à quoi on s’attend?
    A défaut de réguler nos pensées, la société a développé des codes de conduite pour réguler la façon de les exprimer.

    28th septembre 2010 at 16 h 38 min

  8. Gunter Gorhan says:

    Merci pour la précision. Quant au sujet, « le bon usage des préjugés/préjugements », j’ai l’impression que nous avons, pour le moment, fait le tour.
    D’autres enjeux ne manqueront pas de nous solliciter…

    28th septembre 2010 at 18 h 23 min

  9. ROCA says:

    À quoi faut’- il s’Attendre’ ?, … Alfred’, Gérard Tissier,

     » Attendez-Vous À savoir ! … », Geneviève Tabouis, … … ce qui Vient,
    qui devient, deux par deux … vient,
    ce qui naît, qui co-naît, Au monde’, À L’Autre’, À Soi,
    découverte’, invention, évolution,
    révolution, co-création,
    de L’Attention, À … À La … tension, Vers … L’inconnu, L’irréalisé,
    L’inconcevable’, À concevoir, d’illusion en Vision, Visée,
    de désespoir en foi,
    espoir, et, du pire’ Au meilleur,  » du plus’ + Au mieux’ « - être’,
    et,  » de L’Avoir À L’Être’ « ,
    Edgar Morin, et, de sommeil en Veille’, et de réveil en’ éveil, élan, Action,
    La conscientisation, et, L’Anticipation, Aspiration, et, réalisation, et, finalisation,
    de finitude’ en finition, finalité, en’ humanisation, et, en’ humanité, À sa transformation,
    non pas  » Attendre’ et Voir « ,
    mais s’Attendre’ À mouvoir, À se mouvoir, À s’émouvoir …
    pour L’À …Venir, en mutation, et, de déconstruction en reconstruction, en transmutation, Pente …côte’, Ascension, et transfiguration, recherche … quête’, en’ Aboutissement’,
    en’ Accomplissement, De L’Amour, du désir, en  » cristallisation « , d’  » être … Vie …Vent,
    de Liberté, qui ne sra, jamais, -Vie …Vent,
    d’Aimer, – sous La terre … », Jean Cardonnel, J C, d’éternité … événement’,
    Avènement …

    À qui faut’- il s’Attendre’ ?, … Au Fils de L’Homme’, Au Féeminin, L’Humanité,
    Fille … de L’Homme … de La Femme, Humanité,
    mais non, mais non … Mais …si !
    Merci … Gilles Roca,

    Cas-fée-Philo des Phares, 19′- 9′- 2010′, ces-jours de Fructidor’,
    Attente phare’, … indice … d’or’!, qui dort … G R

    28th septembre 2010 at 9 h 54 min

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