« L’intériorité, est-elle un mythe », fut la question posée ce dimanche, posé par un représentant de la génération post-68 qui était, comme moi, élevé dans l’idée d’un moi profond qu’il fallait trouver au fond de soi et qu’il s’agissait de « réaliser » coûte que coûte. Le bonheur devait se présenter à nous, une fois ce moi profond trouvé. Mais ce moi profond, après trente, quarante ans de recherche, nous sommes peut-être nombreux à nous poser la question : existe-t-il vraiment ? Un nouveau mythe émerge : L’idée de l’homme relationnelle semble se construire actuellement. L’homme serait la somme de toutes les expériences qu’il a pu faire dans l’interactivité avec son environnement, et cette « nouvelle » (qui n’est pas si nouvelle que cela !) a un effet déroutant pour certains. L’important, ce ne serait plus l’intérieur, mais l’extérieur. Nous constatons le lien indissociable entre extérieur et intérieur : sans intérieur, pas de notion d’extérieur. Impossible de se construire sans les apports de l’extérieur. Pour avoir un intérieur, il y a besoin d’un contenant. Le débat serait donc à situer dans le lien entre contenant et contenu. Mais, première surprise, l’intérieur, est-ce bien synonyme de l’intériorité ? Les mots aussi ont une histoire. Si nous avons cru nécessaire de créer ce mot, ce concept, quelle est la réalité qu’il tend de décrire, quelle est sa fonction ?
L’approche, ce dimanche là, était fortement teintée par des références à l’histoire psychanalytique, avec des concepts parfois difficile à saisir pour la population lambda. Pendant un bon moment, nous avons tenté de définir, à saisir ce mot « d’intériorité » pour en faire, petit à petit, un « espace de travail » qui rend possible l’émergence du sujet qui parle en son nom. Puis, une tentative timide de donner une place au mythe. Certains connaissaient sa fonction dans la capacité de penser « humain », sa place dans la pensée (une étape pour rendre la symbolisation possible), mais aussi pour la cohésion sociale. Pour d’autres, il était à ranger dans la catégorie des mensonges invérifiables. Je pense que nous aurions du approfondir l’articulation de l’intériorité et du mythe, mais le temps est ce qu’il est. C’est en fin de séance, que notre spécialiste du mythe a rappelé la proximité du mot « mythe » avec mystère, mysticisme. Et qu’il n’était pas du tout d’accord avec le résultat de notre discussion. L’intériorité ne serait pas un processus de subjectivation, mais …. Mais quoi ? Ce quelque chose de rien, ce qui nous échappe si souvent au café philo ? L’animateur a invité à plusieurs reprises de nous poser la question sur le « pourquoi » de la question. Refusons-nous le mythe ou l’intériorité quand nous posons la question? Si « ça » dérange, pourquoi, et quoi en faire de cette irritation ? Une fois de plus, j’ai quitté l’espace café philo avec plus d’interrogations que de réponses. Etais-je la seule dans ce cas ?
Elke