Alors que dans le noir de la nuit de samedi il était impossible de s’offrir la nouvelle lune mais l’on pouvait bénéficier par contre, en raison de cette occurrence, du passage aussi éblouissant que spectaculaire des Lyrides, une théorie d’étoiles filantes dont la beauté féerique suppléait au silence Radio ainsi qu’à la cécité Télévisuelle destinés à laisser, depuis minuit, quelques heures de réflexion aux citoyens qui, au cours du premier tour des élections Présidentielles prévues pour le dimanche 22 Avril devaient sortir de leur réserve et aller rejoindre l’isoloir pour désigner leur candidat préféré, Emmanuel Mousset entreprit de proposer au public, assemblé dans le Café des Phares®, le sujet choisi ce même jour, « Peut-on se comprendre ? », pour qu’il en débatte.
Notre pensée se trouvant en permanence face à l’insaisissable, constitué par le mystère des origines et de notre raison d’être, comme habituellement, nous avons procédé par recours au « couper » et « copier » / « coller ». Considérant pourtant qu’il y a néanmoins de la raison dans chaque intervention, mettons la vérité sous le boisseau et voyons ce que chacun nous a approximativement dit. Comprendre c’est :
« ‘Piger’ ; ‘se mettre avec…’ ; ‘…moins difficile que se s’en expliquer soi-même’ ; ‘ce qui se conçoit bien (et) s’énonce clairement (Boileau)’ ; ‘un raccourci entre le mental et l’affect, car on comprend si l’on accepte, par politesse ou n’importe quelle autre raison, or, en a-t-on la capacité ?’ ; ‘De Gaulle qui affirme ‘je vous ai compris’ ; ‘partager avec l’autre’ ; ‘…si l’on se comprend soi-même’ ; ‘estimer quelles sont les clés de la compréhension, au-delà du connais-toi, toi-même, ou de la banalité du mal ’ ; ‘avoir l’intention d’être avec l’autre, totalement différent’ ; ‘une façon de se mettre d’accord avec l’autre, soit faisant appel à la raison, méthode Descartes, ou cherchant à le connaître’ ; ‘comprendre sans accepter forcément’ ; ‘la vie qui n’est pas qu’une rencontre’ ; ‘avoir quelque chose à partager’ ; ‘saisir quelque chose d’incompréhensible’ ; ‘avoir conscience de soi’ ; ‘éprouver de l’empathie’ ; ‘se porter sur l’altérité’ ; puisque ‘les hommes ne comprennent pas bien les femmes, alors que quelque chose les englobe et dépasse’ ; prendre conscience que, ‘basée sur la violence, la société est une guerre pacifique’. Comprendre serait ‘fusion, harmonie, etc.’, ‘accepter que des trains arrivent plus ou moins en retard’, et que ‘le langage puisse être un obstacle’ ; ‘ça renvoie à l’incommensurable problème du ‘soi’ qui se comprend ou ne se comprend pas’, un processus non fixé dans le temps’. La compréhension serait accessible au savoir et aux capacités sensorielles, à l’émetteur/récepteur, aux blocages, une ouverture à d’autres’, ainsi qu’à l’humilité et à la curiosité, ; un ‘retour au patriotique (pathos), à la compassion ou à la patience qui permet de faire un pont avec l’autre’, voire aux ‘difficultés liées à la langue maternelle’, ‘le différent se portant surtout sur l’économie’, ‘les codes qui, faisant partie de l’expérience, agissent sur la vie’, ‘ce qui se passe entre deux ‘ego’’, ‘les blocages terrorisants’ alors que ‘le voyage aide à sortir du sérail’, l’ ‘l’ONU devenant une autre tour de Babel’ ; Etc..
Gilles a ajouté que « ‘Je’ est un autre ; que le plus vrai c’est l’autre, solitaire/solidaire, pour se prendre en main et vivre ensemble ».
Voilà, voilà…
Peut-être parce que je suis un post-Babélien, personnellement, j’ai le sentiment que non. En effet, tout ce que la science laisse derrière la pensée, les intuitions et les sentiments, sans en maîtriser vraiment les tenants et aboutissants, tels que le doute sur les origines ainsi que la raison d’être et une réflexion sur les problématiques de l’imagination, signification, invention, sens ou finalité, s’avérant elles-mêmes peu fructueuses, parce que mettant notre pensée en permanence devant l’insaisissable, je suppose que l’on ne peut pas se comprendre et qu’il est à espérer que ce soit ainsi, tellement le déconcertant est bénéfique. L’existence étant inventée aussi bien par des tas de mots polysémiques, pas faciles à interpréter, qu’investie par une somme d’instants qui ne coïncident point, je crois que l’on ne peut pas se saisir aisément de l’autre, et que cela est souhaitable, malgré tous les efforts que l’on fait pour que ce ne soit pas comme ça. Par contre, à mon avis, on peut très bien éviter cette maladie du corps qu’est le malentendu, pour s’entendre, car l’existence est inventée par ces mêmes mots et que n’importe qui devient à terme ce qu’il est, une altérité que préconisait Pindare déjà (« deviens ce que tu es »), ou le « tout autre » suggéré par Emmanuel Lévinas.
Pour conclure, je ne résiste pas à vous raconter cette histoire d’émigrants dont l’un s’adresse au guichet de la Banque afin de toucher un chèque :
- Il vous faut l’endosser, dit l’employé.
- Non, on m’a dit que je n’avait rien à faire, juste à empocher l’argent.
- Pas de problème ; vous signez derrière et vous l’aurez.
- Non, non, non. Vous voulez…
- Ecoutez ! Allez voir ça avec mon chef dans le bureau à côté.
Le gars y va, essuie le même refus et, excédé, le chef le cogne avec un cendrier sur la tête, lui ordonnant :
- Mettez là votre nom et basta !!!
- Ok, Ok !!!
Il obtempère, reçoit son dû et, croisant à la sortie un compatriote qui allait encaisser aussi son chèque, lui dit :
- Tiens, un conseil ! Ne va pas au guichet. Va voir le chef directement ; il explique beaucoup mieux !
Carlos