Réflexions d’Idriss à propos de son expérience d’animateur au café des Phares.

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Posted on 28th juin 2012 by Gunter in Dialogues |Tribunes

Retour d’expérience de ma première animation d’un café Philo

Lorsqu’il m’a été proposé d’animer le débat philosophique du 20 mai 2012, je me suis tout d’abord réinterrogé sur la raison d’être et la nature des débats dans un Café Philo.

Ici et là, j’entendais que la philosophie ne devait pas prendre poussière dans les bibliothèques, et n’être que l’apanage d’universitaires ou de quelques élitistes écrivains à la démarche plus sophistique que philosophique.
Le Café Philo est parfois perçu comme un ersatz de thérapie de groupe, et souvent présenté tel le digne héritier des antiques Agoras. Cette culture de l’écoute, de l’échange, de la discussion, de la critique, donne à chacun l’occasion de partager sur le vif, la vision qu’il se fait de l’homme, du monde, de l’univers… Un lieu où par la spontanéité et la diversité des échanges, chacun peut stimuler et affuter son outil de réflexion.
Dans une société dont la masse, entre autres maux, me semble abreuvée de divertissements hypnotiques, victime d’incessants matraquages médiatiques, tellement surinformée qu’elle en devient dramatiquement mésinformée, les questions existentielles n’intéressent plus ou peu. Leur simple évocation provoque au mieux bâillements et railleries, c’est pourquoi, je suis convaincu que le questionnement philosophique, doit être partagé avec le plus grand nombre. Car il se dresse comme l’un des derniers remparts face à l’abrutissement collectif qui s’opère chaque jour sous nos yeux et à nos oreilles.
Par delà les désaccords et les luttes intestines, Le Café Philo demeure et devra rester un espace gratuit favorisant la mise en commun du savoir, ouvert à tous modes de pensées, où l’on peut débattre de tout avec tous. Non pas un lieu d’excellence sectaire et élitiste, mais un lieu d’expression par excellence pour tous les libres penseurs qui, chaque jour, cherchent à s’éveiller un peu plus.

Pour revenir à ma conception de l’animation d’un débat philosophique, elle se résume en une phrase.
‘’L’animateur doit toujours être au service du débat.’’

Je ne pense pas qu’il y ait de modèle idéal d’animation, il est même profitable que chacun y apporte sa touche personnelle. Cependant, outre les règles de bienséance, toute responsabilité nécessite de posséder quelques qualités humaines, comme l’honnêteté, la bienveillance, le respect et bien d’autres encore.
Non exhaustivement, je définirai les prérogatives et la posture à adopter par un animateur de la façon suivante :
Il ne doit pas :
Faire de pro-élitisme, monopoliser la parole, chercher à imposer ses idées, faire preuve d’irrespect envers les interventions des participants, permettre la tenue de propos racistes ou injurieux…
Il doit éviter :
La redondance dans les propos des participants, les altercations entre les participants, la publicité intempestive de certains participants concernant leurs travaux…
A contrario, il doit favoriser :
La diversité et la qualité des interventions, la dynamique du débat, le questionnement et la relance d’un participant si nécessaire, l’élévation du débat…
Impérativement, Il doit gérer :
Le matériel Audio mis à disposition, la distribution équitable des prises de paroles, la modération du temps de paroles, le respect des horaires, l’interaction avec le reste de la clientèle et le personnel du Café des Phares…

De plus, bien que tacitement usité, voici le Modus Operandi qui semble satisfaire le plus grand nombre.

10h30 Les annonces
10h35 Un animateur imposant un sujet, ou un animateur soumettant au vote 2 sujets parmi ceux proposés par les participants.
10h40 Débat
12h05 Lecture du poème de Gilles
12h10 Conclusion de l’animateur et, ou du participant dont le sujet a été choisi

Cette expérience m’amène à montrer plus d’indulgence, d’écoute et de respect envers tous les animateurs et participants. Comme j’ai pu le faire durant le débat du 20 Mai, j’incite le plus grand nombre à prendre la parole, autant que j’incite à accepter la responsabilité d’animer un débat à toute personne se sentant capable ou désirant tenter l’expérience. Si le Café Philo est un lieu de partage, alors tous rôles, toutes tâches doivent être partagés et accessibles à tous.

Idriss SANKHON

Le débat du 24 juin 2012 : « Pourquoi le mot « bonté » est-il un mot tabou en philosophie ? », animé par Eric Zernik.

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Posted on 19th juin 2012 by Gunter in Comptes-Rendus

C’était la semaine des nuits courtes, des tas d’événements se succédant dans la capital, de la Fête de la Musique aux Matches du Championnat d’Europe de Foot transmis par des écrans géants installés au Trocadéro ainsi que sur la Place de l’Hôtel de Ville, tandis qu’à Bruxelles nos dirigeants s’occupaient de politique agricole commune et de chercher la meilleure manière d’évaluer la dette de la zone Euro. C’est dans cette atmosphère générale que, le 24 juin, au Café des Phares®, Eric Zernick choisit pour thème du débat philosophique hebdomadaire : « Pourquoi le mot ‘Bonté’ est-il un mot tabou en Philosophie ? »

D’emblée, je n’ai rien compris… et je ne comprends toujours pas. A quoi rime de s’interroger sur une affirmation dont les prémisses sont douteuses et la réponse serait dès lors « parce que » ? D’abord, avant de chercher « pourquoi », d’où ça sort, sans démonstration, que « Bonté » serait éventuellement un mot « tabou » (« tabou » étant une des rares désignations des peuples dits sauvages à être reprise par les occidentaux), lorsque l’on parle entre philosophes ? (Personnellement, je l’ignorais). Voulait-on dire « un mot récurrent » ? Puis, pour quoi se permet-on d’interroger le public sur les raisons de ce qui est affirmé arbitrairement ? Au sujet d’une assertion dont, ce qu’elle clame n’est pas clair, loin s’en faut, et, sans définir le terme en cause, avoir motivé une proposition ou fondé a priori un jugement douteux, c’est-à-dire, omettant d’expliquer aux gens qu’il s’agirait là d’un « mot tabou de la philosophie » (ou « en philosophie »), voire un mot tabou tout court, lorsque l’on évoque la « Bonté » ? Si, tacitement on le sait, à quoi ça sert de demander « pourquoi » ? Sous quel prétexte vouloir savoir les raisons du pourquoi d’une affirmation absurde ou pour le moins au contenu non démontré ?

Que nenni… D’après le Dico, par Bonté, on entend un « nom féminin issu d’une langue latine ‘bonitas, atis’ », c’est-à-dire, la qualité de ce qui est bon en soi, et vertu morale ou bienveillance envers autrui, dont l’Homme serait privé a priori en raison du pêché original. En revanche, pour les grecques, insensibles à la notion de pêché, la bonté se traduisait par « Chrestotès » (de Chrestos, c’est-à-dire, utile, convenable, vertueux, plaisant, bienveillant), Chraomai signifiant faire usage, emprunter, écouter (ce qui implique un contact, une rencontre, un dialogue).

Bref, la Liberté étant concédée aux Hommes (à l’origine du Mal, disons), et la Bonté restant un apanage de Dieu, accessible aux humains, en quoi peut être nuisible ou culpabilisante la curiosité du philosophe, lorsqu’il se sent interpellé par cette Bonté ou autre sujet de réflexion ?

Ah, c’est Tabou, et Tabou ce n’est pas rien. Il s’agit d’une prohibition à caractère religieux, de règles morales à ne pas enfreindre ou de sujets dont on ne doit pas parler par crainte ou pudeur, enfin, des comportements à ne pas adopter ou règles à ne pas outrepasser sous peine d’offenser une autorité morale.

Particularité d’un être sensible, désireux de procurer aux autres le bien être ou d’éviter ce qui peut les faire souffrir, si l’on ouvre le mot « Bonté » que trouve-t-on ? Que le « bon » et le « bien », conviennent à l’Homme compréhensible et on se demande, dès lors, pourquoi « Bonté » serait un Mot Tabou, adopté des indigènes et à utiliser avec précaution ?

Quoiqu’il en soit, au lieu de contester la logique de la question, en bons soldats nous nous sommes prêtés au jeu, peut-être parce que c’était tentant et parce que notre principal souci est de PARLER, la pertinence de la question étant indifférente. L’essentiel est de se libérer de la parole et se défouler une fois par semaine, le sujet se construisant de lui-même, à tâtons, dans un sens ou un autre, peu importe, puisque même pour Platon il s’agit là d’aider les gens à découvrir par eux-mêmes la réalité, le beau, le bon, le vrai, vers quoi doit tendre l’action humaine. En effet, seule la Substance est sujet, le Beau, le Vrai, et le BON formant des Catégories du Jugement, et le BIEN, étant la norme suprême dans l’ordre éthique, ce vers quoi doit converger l’effort de l’Homme.

Ça n’a pas arrêté, bonté divine. On a dissocié religion, bonté et « bon », mais, même si des goûts et des couleurs on ne discute pas, lié la première, bien qu’énergie négative, à un élan immédiat en tant que valeur morale, puis au Bien et au Mal, par des appels à Kant et à Rousseau, l’Homme étant habité par un sentiment de culpabilité dès qu’il s’interroge sur la banalité du mal dans un monde difficile.

Après avoir appelé à la rescousse Mère Thérésa, pour laquelle « ce sont les autres qui décident », il fut proclamé que « le bon n’est pas forcément charitable », que « parler est un besoin tandis qu’écouter est un art », et fait l’éloge du pianiste qui met en œuvre une seconde nature dans le Paradis de son savoir faire (la raison), l’Eden étant l’innocence de la spontanéité, pas forcément flatteuse, ainsi que de la « Lutte de classes » prônée par Mao.

Quelqu’un a fait référence à une expérience d’Ateliers Philo en Ecole Maternelle (Jacques Prévert), à Mée sur Seine, après quoi, Gilles récita ce que, pendant ce temps, il composait : « Bonté/Méchanceté ; Vertu, Norme, Ethique ; Humaine Humanité ; Angélique/Evangélique… » et, son devoir dominical accompli, chacun repartit rejoindre son destin.

Quoi d’autre ?

Sortant du cabinet médical, un patient ne se rappelait plus de ce que lui avait dit son médecin et décida d’y retourner pour lui demander :

- Docteur, excusez-moi d’abuser de votre BONTÉ mais, vous m’avez dit « Poisson » ou «Aquarium » ?

- Cancer ! Cancer !

Carlos

Klaus Held : « Voyage au pays des philosophes » (Rendez-vous chez Platon).

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Posted on 13th juin 2012 by Gunter in Suggestions de lecture

Descartes le disait déjà : « C’est la même chose de philosopher que de voyager. » Ce guide de voyage philosophique – voyage dans le temps (VIème siècle av. J.C. – XVIème siècle après) comme dans l’espace (tout le pourtour de la Méditerranée, de Milet à Séville) – nous plonge dans le monde des idées qui est au fondement de notre culture comme de la pensée chrétienne. Il offre la possibilité de renouer une relation vivante avec la culture antique, en retraçant les chemins de pensée qu’elle a empruntés et en donnant une vue claire des concepts qu’elle a forgés, et cela jusqu’à la Renaissance et la conquête du Nouveau Monde. Il montre aussi comment le XVIème siècle marque un élargissement radical tant de l’horizon géographique (sortie de l’Europe) que de l’horizon mental (droit public international).Descartes le disait déjà : « C’est la même chose de philosopher que de voyager. » Ce guide de voyage philosophique – voyage dans le temps (VIème siècle av. J.C. – XVIème siècle après) comme dans l’espace (tout le pourtour de la Méditerranée, de Milet à Séville) – nous plonge dans le monde des idées qui est au fondement de notre culture comme de la pensée chrétienne. Il offre la possibilité de renouer une relation vivante avec la culture antique, en retraçant les chemins de pensée qu’elle a empruntés et en donnant une vue claire des concepts qu’elle a forgés, et cela jusqu’à la Renaissance et la conquête du Nouveau Monde. Il montre aussi comment le XVIème siècle marque un élargissement radical tant de l’horizon géographique (sortie de l’Europe) que de l’horizon mental (droit public international). Klaus Held, (né en 1936) est un philosophe de grande renommée, dans les domaines de la pensée antique et de la phénoménologie. Il a enseigné à Aix-la Chapelle et à l’université de Wuppertal. Il est coéditeur des Œuvres de Husserl et de Heidegger. Klaus Held : « Voyage au pays des philosophes » (Rendez-vous chez Platon), traduction de l’allemand par Robert Kremer et Marie-Lys Wilwertth-Guitard. Edition Salvator, 2012, 574 pages, 22€. (4ème page de couverture).Edition Salvator, 2012, 574 pages, 22€.

Le débat du 17 juin 2012, animé par Gale Pravda : »Qu’est qui fait que ça vaut la peine de vivre ? »

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Posted on 12th juin 2012 by Gunter in Comptes-Rendus

Le débat du 10 juin 2012, animé par Nadia Guemidi : « L’attaque est-elle le meilleur moyen de défense ? ».

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Posted on 5th juin 2012 by Gunter in Comptes-Rendus

Débat du 3 Juin 2012: « Qu’est-ce qu’un Etat de Grâce », animé par Georges Sefinal.

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Posted on 4th juin 2012 by Carlos in Comptes-Rendus

Le 3 Juin 2012, jour dédié aux Mamans, et tous ceux qui le précédaient, dès tas d’importants événements sportifs et mondains, sinon marchands, tels que le Championnat de France de Bowling, le Toymania ou le Salon des Jouets de Collection, avaient lieu partout, en même temps que de multiples Brocantes ou Vide-greniers. Là-dessus, s’est greffée la « Fête des voisins », le barbecue, les merguez et les brochettes, accompagnés d’une foison de bassines de taboulé, quiches et autres tartes, ainsi que de vin ou packs de bière à gogo et, signe qu’il allait pleuvoir, les 84èmes Internationaux de France de Tennis sur terre-battue débutèrent aussi à Roland Garros. Un tel état de bienveillance générale n’a pas échappé au peuple philosophe qui remplit chaque dimanche le Café des Phares®, et c’est ainsi que « Qu’est-ce qu’un état de grâce ? », fut le premier débat philosophique du mois, que Georges Sefinal nous a fait le plaisir d’animer.

On a voulu évoquer par là, la source des « premières mesures politiques du nouveau Président de la République », mais on a convenu que ça n’allait pas, parce que « ce serait introduire du religieux dans le profane » raison pour laquelle certainement « Hollande ne l’a pas fait et tant mieux », puis c’est « l’esprit critique qui a pris la relève, rattrapé aussi par la réalité de la Condition Humaine ». Pourtant on sentait dans la salle un désir de s’attarder autour du tout nouveau Président qui, « porté par l’onction du Peuple », « le temps d’atterrir », « devrait bénéficier d’un état de grâce et en distribuer aussi », pendant un certain « moment de rêve », quelque chose entre « le sacré et l’onirique ». Ensuite, nous sommes « tombés sur les CDD (Contrats à Durée Déterminée) », va savoir pourquoi. Parait-il, « que la grâce serait le sentiment d’une pesanteur qui se lève, rendant tout possible, de même qu’un moteur permet d’avancer », « telle la maturité qui succède à l’âge de la jeunesse » « où l’on est sous le charme », et un des participants nous a vaguement confrontés au « ‘journal’ où d’aucuns lisent ‘état de garce’», affirmant de surcroît que « les nains existent, mais pas les ‘états d’âme’, à condition que, inquiet de lui-même, le désir devienne ‘non-désirant’, conduisant ainsi à la pathologie ». On a appris ensuite que, « au nom du Protestantisme, c’est Calvin le responsable pour la vulgarisation de l’idée de ‘Grâce’ », dans un « rapport dominant/dominé », parce que « l’esprit souffle là où il veut », « sans confondre ‘grâce’ et ‘charme’, comme il est arrivé à un intervenant à Toulon, qui aurait rencontré là la femme la plus belle du monde au point de provoquer chez lui un état de méditation », « celui qui trouve sans chercher se découvrant dans la situation de celui qui cherche sans trouver » et, dès lors, « il ne faut pas confondre ‘grâce’ et ‘extase’ » car, « lorsque l’on sort du ‘donnant/donnant’ (la justice) on se perd dans un ‘excès de vie’ semblable à celui qui change de banque ou d’Assurance en raison de calculs rapides où il n’y a pas de grâce ; rendre grâce équivalant à être reconnaissant », puisque « la vie n’est pas reçue comme une chose, bien qu’aujourd’hui on trouve que l’on n’en a jamais assez ». « Comment sortir des intérêts égoïstes du genre ‘qu’est-ce que ça m’apporte ?’», « alors qu’il faut être apte à remercier », « la grâce étant un luxe, un moment privilégié où l’Homme se permet de rêver », ou « ressemblant à un rayon de soleil, tel celui que ressent la prof de maths assise entre ses étudiants avec le sentiment d’être elle l’élève », « du fait de l’osmose » « dans son rapport au temps », « un aspect psychologique de l’état de grâce ressenti en vertu d’un concours de circonstances », « pour les uns facile, pour d’autres difficile », une distinction « étant à faire entre le ‘beau’ et le ‘gracieux’ », « l’autre monde des égyptiens, dépendant des techniques pour y entrer », dès que « l’état narcissique se trouve être le quatrième dans l’agencement de la grâce, le deuxième demeurant toxique et le troisième charismatique », la « littérature persane faisant, elle, cas de la notion de ‘grâce’ par la plume du poète persan Hafez : « si l’éveil du Saint Esprit venait à notre secours, chacun serait capable de faire ce qu’a fait Jésus Christ ».

L’animateur a enfin terminé déclarant : « Face à tous les types de mystères, je suis en état de grâce », puis Gilles ajouta quelques vers de son cru, comme : « A rien je n’ai trouvé de grâce : Grâce Présidentielle/ Grâce Providentielle/ Grâce artificielle/ Lune de miel/ Lune de fiel/ Grâce/ Harmonie/ Moment d’indulgence/ Etat d’innocence/ Poudre aux yeux/ Amour de Dieu : Soleil en embuscade/ Embrasse/ La grâce… » 

En somme, la structure du cosmos relevant aussi bien de l’harmonie que du religieux, puisque la Grâce est un attribut majeur de la Beauté en soi en même temps qu’un concept central de l’Esthétique classique, objet récurrent des préoccupations de l’Homme, il était naturel que l’on en vienne à se demander au Phares, à un moment ou à un autre, ce que c’est que ça. C’est donc chose faite. Du latin « gratia », dérivé de « gratus », dont le sens est « l’agréable », le mot « grâce » désigne la manière d’être, plaisante à l’autre ou les égards qu’autrui manifeste envers nous, augurant alors de bonnes relations entre les personnes concernées. S’approchant de surcroît du grec « kharis » (faveur, bienveillance), la langue de l’Eglise chrétienne s’en est ainsi servie pour rendre hommage à la Vierge Marie qui, sans péché, on considéra « pleine de grâce », c’est-à-dire, du « plaisir d’être » découlant de la joie d’exister et, dans de telles circonstances, on se réfèrera en général à « un état de grâce ». 

Il en découle, dès lors, un point de vue esthétique qui, correspondant à l’aisance, facilité ou légèreté du geste artistique, entre autres dans la danse, fait oublier l’effort, la perfection de l’art étant de sembler à la spontanéité, que l’on définit parfois comme seconde nature, bien qu’elle soit acquise au prix d’un travail acharné. Il en résulte en outre un point de vue théologique, la Grâce s’accordant à un don gratuit de Dieu, une aide surnaturelle qui peut rendre l’Homme affable, doux et charmant, à même de pratiquer le Bien, garant de son salut. Puis, du point de vue politique, ce Droit de Grâce devient un privilège des autorités suprêmes, le Président de la République dans les démocraties modernes et les Seigneurs Justiciers dans  les régimes féodaux, par exemple, et il se distingue naturellement de l’Amnistie, qui efface rétroactivement la sanction pénale et est donc du ressort du législateur, tandis que les premiers jouissent du privilège de supprimer l’exécution de la peine. Voilà, voilà…

Une tricoteuse, s’inquiétant des tourments endurés par un condamné auquel la grâce fut refusée :

-  Ça vous fait mal, toutes ces plaies que vous inflige le bourreau ?

-  Juste quand je ris…

Carlos