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Bonjour à vous, qui vous intéressez à la philosophie. Sachez que vous pouvez trouver sur ce site, le compte rendu des débats qui ont lieu au Café des Phares (Paris, Place de la Bastille), chaque dimanche de l’année, et auxquels rien ne vous empêche d’ajouter vos propres commentaires. Par ailleurs, d’autres rubriques sont en mesure de vous aider à vous orienter quant aux activités et autres événements philosophiques de la cité et du monde en général.

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Débat du 10 Février 2013: « Sommes-nous en décadence? » animé par Raphaël Prudencio.

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Posted on 11th février 2013 by Carlos in Comptes-Rendus

Mardi, 5 Février était jour de Carnaval, mais rien ne portait à la rigolade. Le Pape jetait l’éponge, et en Europe, la semaine était assez chargée. L’Eurogroupe s’interrogeait sur l’Euro fort, tout en étudiant l’opportunité d’une taxe sur les transactions financières, et la Commission Européenne devait prendre d’importantes décisions au sujet du Sommet UE/Russie, ainsi que des quotas de pêche, l’envoi de formateurs au Mali en raison des événements militaires qu’y semaient la confusion, obligeant dès lors les troupes Françaises ou Tchadiennes là présentes à poursuivre leur traque aux Islamistes et aux Kamikazes Jihadistes, (motif du voyage du président Français, François Hollande pour prôner le dialogue). Lors du Débat du 10 Février 2013, au Café des Phares®, nous nous sommes, alors, posés la question de savoir « Sommes-nous en décadence ? », la discussion étant animée par Raphaël Prudencio.

Décadence par rapport à quoi ? Par rapport à quelles valeurs, qui seraient alors essentielles ? Rappelons-nous que la Décadence (du latin « cadere »= « tomber ») signifie la ruine ; c’est la fin d’un Age d’Or, annoncée par les « Cassandres » ou oiseaux de mauvais augure, et une perte accélérée de cohésion consistant dans un processus de dégradation de la société, de ses mœurs, de son niveau de vie et de ses valeurs ; le terme, en somme, d’un âge prospère ou florissant et l’avènement, effarant, du marasme, le déclin, la crise, la stagnation, la dégradation malsaine des moeurs. Par rapport à qui, et quel idéal ? Qui est ce ‘nous’ ?

Les ‘Barbares’, (littéralement les ‘Etrangers’, pour les Grecs), seraient-ils à nos portes et les signes visibles d’un pernicieux avilissement déjà évidents ? Y aurait-il une réelle crise tangible de civilisation, des signes concrets de manque d’idéaux, de laisser aller, de désagrégation, et que la révolution grondât devant nos yeux, décidée à rétablir un niveau de civilisation qui battrait de l’aile ?

Quoiqu’il en soit, en général, la récession précède l’essor, et permet ainsi le renouvellement d’une situation donnée, le progrès, ce qui fait d’elle un moment nécessaire à l’évolution, menant au perfectionnement graduel d’un côté et évitant de l’autre la dégénérescence ou le pessimisme Nietzschéen, puisque de nouvelles voies de salut s’avèrent toujours nécessaires, justifiant même une éventuelle révolution, afin de démanteler le présent ainsi que l’épuisement du sens dû à un possible vieillissement de l’Occident. Ou souffririons-nous, par hasard, d’une sorte d’aphasie ou surdité verbale qui nous empêcherait de comprendre le langage parlé, véhicule de nos projets communs, le rêve tournant dès lors au cauchemar ? L’Homme Bon aurait cessé de nous enchanter avec ses sortilèges ?

En tous cas, il a été dit « que, même s’il s’agit là de philosophie politique, les ‘Hommes’ d’un certain âge en parlent beaucoup mais ça ne se voit pas à l’échelle d’une génération ; que, d’après les vieux textes, les Hommes d’il y a 3.000 ans disaient déjà la même chose’ ; qu’il faut toujours lutter contre la solitude ; l’ancien ayant du mal à mourir, lorsque le nouveau est en train de naître ; que l’on assiste au déclin de l’occident, comme il a été le cas des grands empires ; que les vieilles civilisations étaient plus évoluées que nous, qui parlons au présent, alors que l’Histoire est un récit ; ‘nous nous trouvons dans un monde fini’ (Paul Valéry) ; tout en nous demandant ‘quel est, enfin, le ‘nous’ qui parle’ ; ou en affirmant que le sujet est rabat-joie ; que de nos jours il est difficile de juger de l’‘Art Moderne’ et que bientôt on sera tous chinois. On se demanda, ‘décadence’ par rapport à quoi ?, dès que la représentation de Homme a changé, Anna Arendt l’ayant déclaré projeté en dehors de la nature. D’autres voyaient dans la ‘décadence’ positive ; qu’être ‘décadent’ c’est être à la mode ; que le meilleur ‘marqueur’ est le langage désabusé de nos dirigeants, voire le culotté ‘Zadig et Voltaire’ d’un certain ministre’. On a évoqué encore ‘ Giambattista Vico (philosophe italien, XVII-XVIII s.) et son jugement de ‘barbarie intellectuelle’ ; la rigueur grammaticale dans l’écriture ; comme celle de ‘Un Café pour Socrate’ dû à Marc Sautet et critiqué l’abus de l’art provocateur comme ‘le Pissoir’ de Duchamps ou la ‘Merde en Conserve’ de Piero Manzoni, (52.000 dollars pièce /80.000 aux enchères) ; tout le monde regrette le temps d’avant ; l’Histoire se répète même si ‘à l’ouest il n’y a rien de nouveau’ ; quoi d’autre, à la place ? à part des ‘SMS’ et des ‘ Emails’ ? ». On a rappelé encore l’œuvre d’Edgar Morin ‘Tout ce qui ne se régénère pas, dégénère’, ainsi que Freud, Nietzsche, Aristote, l’Abbé Pierre et Georges Brassens, ‘Gare aux Gorilles…’ ».

Finalement nous avons écouté la ‘Rapsodie’ de Gilles, et regagné nos Pénates, fiers du devoir accompli.

- « Ô sage gourou, dis-moi qu’est-ce que la décadence ? »

- La décadence, c’est de répéter toujours la même chose…

- Quoi ? Répéter toujours la même chose ? J’ai parcouru tout ce chemin jusqu’à toi, pour que tu me dises que la décadence est de répéter toujours la même chose ?

- Alors, c’est que la décadence n’est pas de répéter toujours la même chose !

Carlos

Débat du 3 Février 2013: « Le temps d’apprendre à vivre, il est déjà trop tard », animé par Bernard Benattar.

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Posted on 5th février 2013 by Carlos in Comptes-Rendus

Après la « Manif pour Tous et Partout » de samedi (en opposition au projet de mariage et adoption pour chacun, et en faveur de l’attachement au couple homme/femme aussi bien qu’à la famille PME, père, mère, enfant), tandis que la guerre semait la mort au nord de l’Afrique noire ainsi qu’au Moyen Orient, à Paris, le 3 Février 2013, selon une tradition vieille de trois ans, ‘La ‘Bellevilloise’, forteresse culturelle et haut lieu de la militance ouvrière du 20ème arrondissement, ouvrait ses portes au convivial « GSAA » ou Grand Salon de l’Art Abordable, une exposition d’Art Contemporain accessible aux différents budgets, c’est-à-dire, à des prix d’atelier et sans intermédiaires, tandis qu’aux Invalides avait lieu la 28ème édition  du Festival Automobile International, mettant en scène les Top Modèles de cette industrie, d’un coût bien moins raisonnable.

Ce même jour, le 3-2-2013 donc, au Café des Phares®, avait également lieu l’habituel débat philosophique hebdomadaire, animé alors par Bernard Benattar, et portant sur la question « Le temps d’apprendre à vivre, il est déjà trop tard ! », posée par une  participante.

Savoir vivre serait donc une pure perte, puisque, d’après l’affirmation qui nous sert de réflexion, un tel apprentissage anéantirait la possibilité de le faire à temps, la période nécessaire à y arriver dépassant le limite raisonnable de son utilité. C’était en outre un coup de pierre dans le jardin de l’Académie de Platon pour qui « philosopher, c’est apprendre à mourir », quoique, si « le temps d’apprendre à vivre ne nous laisse pas de marge pour en profiter », naître équivaudrait donc à l’expérience de la camarde sans lâcher la tétine et, dès lors, le plus sage serait de vivre sans apprendre à le faire. Entre nous, « Vivre », du latin « vivere », est une propriété essentielle des organismes qui, sans recours à la réflexion résistent spontanément à la mort. Ça ne s’apprend donc pas (mais faisons comme si…) ; c’est un instinct, ce qui fait de la vie une création, plus qu’un apprentissage. Bref. Nous avions donc, à nous interroger sur la frustrante brièveté du temps, comme Hippocrate l’avait exprimé par son aphorisme ‘ars longa, vita brevis’ (le constat est hasardeux et la vie trop courte), et il semblerait donc qu’il est souvent « trop tard » pour réaliser quoi que ce soit ! C’est-à-dire, au sevrage succéderait l’Apocalypse ; le temps de nos premiers pas épuiserait toute espérance de vie. La mort serait une suite logique, non de l’existence ontologique, mais d’une incertitude métaphysique au sujet du réel, dont le fait effacerait du même coup toute matérialité, fut-elle de longue ou courte durée. Une sacré besogne.

Lors des échanges avec les participants, on a tout entendu, et en premier : « est-ce que ça a du sens ? », puis quelqu’un « s’inscrit contre… », pensant « qu’il faut prendre de la distance », et « distinguer entre ‘expérience’ et ‘vie vécue’ », « au vu des circonstances dans lesquelles la question est posée  », et quelqu’un d’autre se plaignait « si j’aurais su, j’aurais pas venu (de ‘La Guerre des Boutons’) ». Il s’en suivit « L’inquiétude existentielle », « si jeunesse savait et vieillesse pouvait », et les sentencieux « est-ce que j’ai agi comme il fallait », « mieux vaut tard que jamais », « vivre c’est apprendre à vivre et devenir philosophe », « la nostalgie n’est plus ce qu’elle était (Simone Signoret) », « la vie est pleine de concepts et ce n’est pas avec ça que l’on apprend à vivre ». On a parlé de « la caverne de Platon où les idées sont séparées du vécu, donc fausses à la base », de la résignation genre « je vis ma vie et je fais avec », d’autres de la contestation du type « la phrase est déterminée par un seul terme, le temps, formule transcendante, alors que je l’aborderais par le côté immanent », « Pourquoi apprendre ? Pour s’améliorer ? », bien qu’il ne soit « Pas la peine d’apprendre ; on ne vit que soi-même », ou « Il faut accepter de ne rien savoir », « Il y a des envies que j’aurais eues à 20 ans mais pas aujourd’hui », ou encore « ce qui ne nous a pas tué, nous renforce », « d’après les pédagogues, tout se passe avant Six ans », « comprendre est le corollaire d’apprendre », « Il est toujours trop tard ; quand c’est fait, c’est fait », l’affirmation en débat semblant à « une phrase de ruminant, version romantique », alors que « le cours de la vie nécessite des notices explicatives », pour « vivre à 100% », malgré « les regrets, « les remords », le « vivre c’est manger, dormir, construire sa maison, prendre soin de soi »,  ou l’épilogue de « Oscar Wild : ‘les gens savent tout mais ne connaissent le prix de rien’ », suivi d’autres du genre « le sujet philo par excellence, ‘créé-toi, toi-même », « art et philo, même combat », « savoir ou mettre la fourchette de séparation, et manier une œuvre ainsi que sa musique, faisant miennes les idées », « la crise de la représentation », « l’art, comme tous les arts qui a besoin de l’éducation du regard mais c’est le langage qui nous amène à le comprendre».

Avant que ce ne fut point trop tard, Gilles donna de la voix, nous révélant son texte poétique, puis Bernard conclut : « … il faut laisser tomber les livres et vivre l’expression esthétique allant au-delà du tableau… ». Voilà, à peu près… 

Un escargot est agressé par deux tortues.

La police arrive et demande :

- Qu’est-ce qui s’est passé ?

L’escargot :

- Je ne sais pas ; tout s’est passé trop vite.

Carlos

 

Débat du 27 Janvier 2013: « La vie, nous la rêvons, ou nous l’accomplissons? », animé par André Stamberger.

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Posted on 29th janvier 2013 by Carlos in Comptes-Rendus

C’est la « Semaine de la Guitare », alors allons-y pour le « fado » ! Ces derniers jours, outre l’assentiment de l’UE à un récurrent caprice de la Grande Bretagne à vouloir quitter l’Europe au cas où un nouvel accord, voire un « Paradis fiscal » dans le voisinage, n’était pas envisagé, c’est la lutte des ouvriers de chez Renault pour leurs droits salariaux, de pair avec le drame de la jeune mère dépressive au point de tuer sa petite fille de sept mois, qui ont fait la « une », si l’on y ajoute, le 24 du mois, la libération dans la joie de la française Florence Cassez ; condamnée au Mexique pour complicité dans une série d’affaires criminels à 60 années de prison, elle venait d’en purger sept. Chez nous, au Café des Phares®, la musique était toute autre ; notre débat, que le 27-1-013 André Stamberger allait animer, portait sur l’insouciante question : « La vie, nous la rêvons, ou nous l’accomplissons ? »

Il semble que la vie surgit de chaque chose, impossible de se dérober ; dès lors, il nous faut toujours de nouvelles questions pour nos réponses à son propos et on y passerait bien tout son temps car, « si ce n’est pas elle, c’est son frère », c’est-à-dire, ce que l’on en fait dans nos rêves.

Nos rêves ! La vie rêvée !! D’emblée il m’est venu à l’esprit le « Songe d’une nuit d’été », la cocasse comédie de William Shakespeare où il est question d’une « potion magique » dont l’efficacité fit délirer la troupe de comédiens en goguette dans un « campus », et particulièrement deux amants y présents :-) Puis, d’hallucination en chimère, je me suis souvenu de « Perrette et le pot de lait », la fameuse fable de Jean de La Fontaine où est évoqué le projet immodéré d’une paysanne qui, ayant trébuché, voit brisée toute sa construction mentale tendant à rationaliser ses profits, pour enfin, de chimère en onirisme, arriver à l’incontournable Sigmund, pour qui le Rêve a la fonction de préciser les désirs inconscients du rêveur dont le sens peut être interprété de façon plus ou moins hasardeuse. En tous cas, il semble clair que la vie, nous ne l’« accomplissons » pas ! « Accomplir », est faire, voire exécuter, ce qui était prévu (comme entre autres des acrobatiques virevoltes en VTT) et, à la rigueur, nous pouvons « accomplir » nos résolutions, nos souhaits ou désirs mais pas nous « acquitter de la vie » comme d’un devoir ou d’un ordre. La vie, on la vit ; « elle nous mène à son terme », selon les croyances de chacun et l’état de santé dont il jouit. La vie, on la vit, parce que nous existons et « exister », on le précise à chaque fois, est « surgir de… », « du néant », pour Heidegger, par exemple, et pas « rentrer dans », bien que, le jour venu, elle nous conduit au râle ultime… :-(

Certes, tout rêve est réalisation, mais réalisation irréelle, quoique, au sens de « rêverie » (état au cours duquel la pensée se déroule spontanément), il puisse aspirer à une réalisation pratique, comme c’est le cas des Utopies ou autres projets immatures.

Il restait toujours donc à savoir si nous la rêvons, cette vie. La concevoir comme « un songe », ou « transfigurer » son passé, est bien sûr très rafraîchissant (une sorte de jour de congé pour la pensée), mais cela nous priverait de la réflexion, une NECESSITE, qui est d’ailleurs le but de notre déplacement, chaque dimanche à cette heure-là.

C’est ainsi que beaucoup d’idées choses ont été exprimées et, dès le départ, « la gêne causée par le terme ‘accomplissement’ », puis, par association d’idées, on a « rappelé Mme. Bovary, Kierkegaard, Montherlant, et même Frédéric Dard (‘je suis de gauche, le matin, dans le métro, et de droite, le soir au café’), ainsi que « Napoléon lorsqu’il affirme ‘gagner ses batailles avec les rêves de ses soldats endormis’ », « les plus grandes choses entreprises au monde étant le résultat de rêves audacieux », « qui nécessitent une certaine ivresse », même si Sartre prétendait « qu’aucun rêve n’est pas réalisé à la lettre » L, et que « le rêve n’est pas réalisme », où l’on a rappelé « le poème de Paul Valéry sur le ‘cimetière marin de Sète’», ainsi que celui de Caldéron de la Barca, « La vida es sueño » ou le film « Un monde parfait » de Clint Eastwood. On a cité encore le film « ‘Mulholland Drive’ de David Lynch comme une oeuvre parfaitement subjective » et lancé que « le rêve a le vent en poupe », que « l’Homme est une chance », ainsi que « l’écriture est une fulgurance et une transcendance », « le rêve étant lui un état d’accueil ; qu’il faut pénétrer et agir, le café au lait ne se confondant pas avec le lait au café », puis évoqué « la poïétique dans le processus de création », « ‘Les mots et les choses’, de Michel Foucault », « le rêveur-explorateur tel Christophe Colomb », que « ‘rêve’ et ‘réalité’ participent du même radical ‘res’» [alors qu’en fait ‘rêve’ dérive de ‘desver’ (vagabonder, perdre le sens) et ‘réalité’ de ‘réalitas’ (le contraire de ‘idéal’], que « le danger ne sont pas les utopies, mais les réalisations trop parfaites », suivi de la question subsidiaire « Qu’est-ce que se mettre en rêve ? », ou encore « les rêves préfabriqués de la TV », « le poème de Louis Aragon à Elsa », « les rêves accomplis de l’artiste-peintre », « la confusion entre ‘accomplir’ et ‘réaliser’ ».

Finalement, Gilles a eu raison de tout, avec le « …sentiment de vivre, rêvant sa vie » contenu dans ses vers.   

:-) Chez le médecin : 

- Docteur, mon mari se prend pour un frigidaire…

- …Et il n’est point attentionné envers vous…

- Non, c’est pas ça. Il dort la bouche ouverte !

- Et alors ? Il parle pendant son sommeil ?

- Pas du tout… Mais la petite lumière m’empêche de fermer l’oeil.

 Carlos

Débat du 20 Janvier 2013: « L’intelligence rend-elle plus humain? », animé par Daniel Ramirez.

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Posted on 22nd janvier 2013 by Carlos in Comptes-Rendus

Le 20 Janvier 2013, alors qu’à Genève s’ouvrait la Conférence sur les Droits de l’Enfant, l’Egalité des Sexes et l’Autonomie de la Femme, à Rotterdam, on entamait une Semaine du Refus de la Haine, à Oslo, de pair avec le Sommet International sur le Problème de l’Eau, avait lieu un Séminaire au sujet de l’Escalade de la Violence en Syrie, afin d’y coordonner une aide humanitaire aux civils et la nécessaire transition vers la démocratie, tandis qu’à l’Onu il était question de l’Organisation du Combat contre le Terrorisme, et au Sahel un micmac concernant l’intégrité du pays faisant qu’une prise d’otages terminât en tragédie, pendant qu’à Bruxelles on se penchait toujours sur la reconnaissance de l’Etat Palestinien, bien que cela fût fait dès fin Mai 1948 à l’AGNU (ancêtre de l’ONU), 58% du territoire étant à l’époque attribué aux Musulmans, 33% aux Juifs et 9% aux Chrétiens, sans que cela n’ait jamais été suivi d’effet, va savoir pourquoi. Au Café des Phares®, parce que l’on y on polémiquait aussi, il a été choisi de tirer au clair « L’Intelligence rend-elle plus humain ? », un débat animé par Daniel Ramirez.

Voyons ! Toujours compréhension et invention, résultant de raisonnements abstraits, l’Intelligence (du latin : « Intelligentia »), semble être la qualité de celui qui comprend vite et s’adapte facilement, tout travail ou savoir ne remplaçant pas cette faculté de penser, une aptitude spécifique ou résultant de prédispositions diverses dont la capacité d’engendrer et manier des idées. Elle se distingue de l’entendement et de la raison, son exercice s’accompagnant même d’éléments irrationnels d’ordre associatif ou affectif, ce qui nous fait reconnaître chez les animaux une certaine forme d’intelligence qui, dans leur quête de la réussite et esquive de l’échec, les amènent à procéder également par tâtonnements ou l’élimination des hypothèses sans chances de réussir, s’épargnant de ce fait des revers cuisants, ces aptitudes variant aussi bien d’un individu à l’autre, que d’une prédisposition à la suivante chez la même personne. 

Il ne s’agissait donc, là, dans notre débat, de rendre l’humain plus humain que ce qu’il est déjà, d’après une éventuelle évaluation de son QI. Parce que apparemment plus doués (ou dotés) que la moyenne de leur temps, une reine de Saba, une Cléopâtre, un Anaxagore, un Pythagore, un Galilée, un Newton ou un Einstein, sans évoquer les génies vivants, seraient-ils plus humains que le commun des mortels, même si l’on sait que notre ancêtre, l’hominidé, le genre « Homo » (de ‘humus’), est tout proche du chimpanzé, en ce qui concerne ses capacités cognitives ainsi que l’aptitude à développer un langage articulé et que son ADN a les mêmes caractéristiques que celle de l’Homo Sapiens Sapiens, dont la compagne, de même que celle de tout autre animal, était la « femelle », puis « fame » et ensuite « l’épouse » ? Dès lors, pourquoi ce « plus  (ou moins) humain » au regard de l’intelligence ? Puisque, sans parler de celle des autres animaux, l’on nomme « Intelligence » la faculté de raisonner des êtres doués de raison, du moment que l’Humain est par définition le propre de l’Homme (intelligent ou débile), on dirait que l’on pédalait dans le vide comme sur un vélo d’appartement afin de distendre nos neurones, où sur un tapis roulant pour perdre du poids parce que, le cerveau étant du muscle que l’on peut ravigoter et rendre plus souple, on espérait améliorer peut-être les capacités intrinsèques de son propre esprit critique.

On a jugé alors que « la loi joue, peut-être un rôle plus important que l’intelligence », et le « sur-Homme » de Nietzsche fut convoqué, de même que le rôle de la Loi, « plus important que l’intelligence », « fondant une nouvelle façon d’exister, d’être-là », « dont celle des chefs militaires nazis, plutôt cultivés », alors  « que souvent c’est la bêtise qui nous rend humains, c’est-à-dire, sages », « intelligence revenant à ‘interligare’ », ce qui a été corrigé par l’animateur : « pas ‘ligare’, mais ‘legere’, ‘lire à l’intérieur’ », alors que l’on entend : « l’intelligence est un moyen, la philo est une finalité », « le diable, le malin », et que « la machine résout les problèmes nouveaux auxquels l’Homme n’arrive pas à faire face », « parce qu’il est un humain, inexorablement humain », « certaines notions de convivialité : ‘bonjour’, ‘salut’ étant des marques de respect qui forcent au respect aussi ». Quelqu’un dit « que l’on tournait en rond, l’intelligence étant reliée à la mémoire, socle qui permet l’élaboration des concepts, résoudre les problèmes et gérer l’information », un autre ajoutant que « le Larousse donne ‘intelligo’ pour ‘comprendre’, et indique  les relations de cause à effet, les flux des finances, le rôle de chaque organe, et que l’intelligence artificielle n’a aucune chance face à la stupidité naturelle », tandis que le suivant vantait la capacité des humains à rendre les choses intelligibles par la Pédagogie », comprises « à l’aide des ‘catégories’, dont la ‘causalité’ par rapport à ‘l’effet’, l’intelligence étant toujours en progression », puis une autre « que la Pédagogie peut rendre intelligible ce qui paraît inintelligible », ensuite quelqu’un encore pour dire « que le concept d’intelligence n’existe pas, et que l’animal ne suit pas le chemin de ‘cause à effet’ mais le paranalogisme de ‘A’ à ‘B’ ». Une voix s’est levée pour critiquer « le résultat du travail des intellectuels, alors qu’il faut être en harmonie avec le monde et pas en être esclave », car « il n’y a que le groupe qui peut rendre humain et tout seul on n’est rien » et que « l’on doit voir l’intelligence comme un symptôme et un remède et pas une thérapie ». « Réaliser la dialectique de la ‘cause et de l’effet’ qui nous rend plus humain et moins animal », afin « d’échapper au monde capitaliste », alors que quelqu’un confessait « ne pas supporter le divan du psy et vouloir se trouver face à face avec lui », « être malin ou intelligent n’étant pas la même chose, les chinois ayant inventé la poudre et pas les canons », une voix se levant pour « signaler que la rue Etienne Dolet rappelait un imprimeur humaniste mort au bûcher », le suivant « qu’il y en a qui mangent des racines carrées » et celui d’après « que la capacité d’analyse n’est pas évidente, et que l’idée de rationalisme est mortifère », la conclusion de l’animateur étant « alors que l’on peut devenir inhumains comme des machines, nous sommes tous humains au même titre par la créativité, l’amour ou la liberté, et avons besoin de vivre les uns avec les autres… » Puis, ajoutant qu’« il ne s’impose rien », l’animateur a donné le débat pour terminé, sans laisser la parole au poète, Gilles, comme il est devenu habituel.    

Le patron :

-Que fais-tu, André ?

-Je pense.

-Et Raoul ?

-Il m’aide…

-Lorsque vous aurez fini, venez me voir.

Carlos

Débat du 13 Janvier 2013: « La domination rend-elle idiot? », animé par Nadia Guemidi.

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Posted on 14th janvier 2013 by Carlos in Comptes-Rendus

Vaste programme. Une fois ingurgitée la galette et repartis vers l’Orient les Rois Mages venus jusqu’à Bethléem rendre hommage à Jésus, fils de la vierge Marie, ce dimanche, 13 janvier 2013, pour les partisans de l’union Maritale « ad hoc » ou « Hyménée » (du nom du beau jeune homme invoqué lors des noces grecques, pour avoir délivré les jeunes filles enlevées un jour par des pirates), il était question de battre le pavé allant jusqu’au Champs de Mars, à partir de la porte Maillot, la place d’Italie ou de Denfert Rochereau, protestant contre le projet de « Mariage pour tous », ainsi qu’à l’extension de la PMA, soit la procréation médicalement assistée, qui viendraient brouiller l’union qui se consomme et la traditionnelle logique sociale, fondée sur la famille, (père, mère, enfant). Pendant ce temps, au Café des Phares®, pragmatiques, habitués et nouveaux visiteurs ont entrepris de se pencher plutôt sur la question qui leur était posée : « La domination rend-elle idiot ? », et que Nadia Guemidi allait aider à débroussailler.

Quelle domination ?  Dans le domaine sportif ? Intellectuel ? Moral ? Et pourquoi rendrait-elle idiot au lieu de réactif ? Admettant le pire, qui est censé devenir idiot, le dominateur ou le dominé ? Il est bien connu que « le dominateur », le tyran ou le fasciste, pour tout dire, finit mal, en général, si le temps joue contre lui. De son côté, pourquoi « le dominé », plutôt qu’idiot, ne serait-il pas envahi par un sentiment d’affranchissement ou même de révolte ? Les exemples abondent à l’honneur de tous ceux qui ont su briser leurs chaînes, leur action s’étalant du XIVème au XIXème siècle, du Brésil aux USA, ayant déjà Spartacus (esclave gladiateur Thrace, mort au combat en -71) comme figure emblématique, puis Toussaint Louverture, né en 1743 dans une plantation de l’Ile de Saint-Domingue. Ainsi, répondant succinctement par « oui » ou par « non » à cette question, on n’aurait pas avancé d’un iota, car nous étions devant une « aporie », c’est-à-dire, une impasse causée par une incompatibilité logique mais, au diable l’avarice ; si l’on n’avance pas on recule, et « ça » il est hors de question. On doit finir à treize heures vingt ! On poussera jusque là, coûte que coûte.

Il parait que la question était inspirée par un film. C’est fréquemment le cas, et ce n’est donc pas pour m’étonner ; parfois le cinéma nous fait prendre les vessies pour des lanternes et, effectivement il peut souvent nous halluciner, tout comme la « domination », qui ne dérive, pas du tout, de « dominus » (traduit abusivement par « la maison », alors que ce terme vient de « Mansion » dérivé de « manere », demeurer et que, tout le monde le sait, « dominus » signifie « le maître, le seigneur », auquel il faudrait supposément obéir, tandis que l’on doit s’émanciper de l’autre, « le dominateur » au sujet duquel on débattait.

Enfin ! On a donné comme exemples la condition des chinois, le proverbe arabe « bats ta femme ; si tu ne sais pas pourquoi, elle le sait », puis  la trahison et la propagande politique qui séduit les idiots, la voûte céleste des égyptiens, l’importance de la bataille par rapport aux enjeux, le dominant qui délègue pour ne pas se salir les mains, et des témoignages du Laos où en général c’est la femme qui dominerait. Puis, on manifesté la méfiance pour les sujets qui induisent une réponse, et fait référence aux astres et astéroïdes, au sadomasochisme, à Rousseau qui serait conditionné par la fessée, à la fable de l’homme actif et de la femme passive, à la rose du Le Petit Prince, à l’idiot qui n’a pas de double car il est unique comme le démontre le terme ‘idiosyncrasie’, le tout suivi du mouton de Panurge, la domination positive, l’idiot du village, la domination bête qui peut scléroser et n’a pas de chances d’aboutir, le pouvoir du pauvre ou même syndical de la concierge qui ne distribue pas le courrier, la double autorité responsable de la défaite de Napoléon en Russie, le pouvoir du KGB, de la CIA, des énarques en tant que forme de consanguinité, ainsi qu’à la façon empirique de la philosophie dans ses réponses aux questions, par naïveté ou manque de retenue ? On a fait encore appel à Freud aussi, car la domination exacerbée est une affaire sexuelle qui vous marque dès la naissance, pour arriver à « L’idée fixe », pièce de théâtre de Paul Valérie, à « L’Idiot » de l’anticonformiste Dostoïevski, puis la servitude volontaire, la dialectique du maître et de l’esclave, le rapport de force dans le film de Joseph Losey « The servant », idiot et imbécile étant remplacés par aliéné mental.

Gilles a eu enfin raison de tout et, comme des simples oiseaux nous nous sommes envolés dans la ville.

- Docteur, il y a un homme invisible dans la salle d’attente.

- Dites lui que je ne peux pas le voir !

Carlos

Débat du 6 Janvier 2013: « Avons-nous le devoir de rechercher la Liberté? », animé par Irène Herpe-Litvin.

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Posted on 7th janvier 2013 by Carlos in Comptes-Rendus

Pareille à chaque nouvelle année, celle de 2013 se présentait à nous assez fraîche mais, quoique sombre, pluvieuse, humide, et pleine de promesses qui, hélas, comme tous les engagements pris en pleine euphorie sont le plus souvent non tenues, une bonne raison pour que l’on s’en méfiât. Pourtant, les Homme sont naïfs et débordants de confiance, même dans les étoiles, les traits de la main ou les boules de cristal, ce qui leur joue le plus souvent des tours, leur réservant des destinées fréquemment déroutantes. A partir de là, conduits par le destin, nous étions donc bons pour un voyage à Cythère, vu comme une lubie, et n’avons pas hésité à nous tourner, le 6/1/013, au Café des Phares®, vers un sujet basé sur un idéal de 1789, 26 Août plus exactement, traduit par « Avons-nous le devoir de rechercher la Liberté ? », que Irène Herpe-Litvin se proposait d’animer. 

Certainement. Nous nous plions, coûte que coûte, à l’impératif de déjouer tout ce qui fait entrave à notre autonomie, y compris par l’évasion, et telle fut l’attitude de l’ancien braqueur fiché au grand banditisme, Michel Vaujour, qui proclama : « Ne me libérez pas, je m’en charge !» Puis, il s’est fait la belle à cinq reprises. Mais, pas en vertu d’un « devoir », qui constitue déjà, objectivement, une limitation de la liberté ; en raison plutôt d’une nécessité intérieure de se retrouver, s’emparant de son indépendance. En effet, la Liberté ce n’est pas quelque chose que l’on aurait perdu, comme une bague, par exemple et que l’on voudrait récupérer ; c’est notre Humanité ! C’est le principe fondateur de notre ontologie, ainsi que Sartre l’entend et, partant de la définition d’Eleuteria (Ελευθερια), condition de celui qui n’est pas captif, ce « devoir » en question n’équivaudrait-il pas à une sorte de servitude ? Une obligation ? Une soumission ou une cynique exigence de la Liberté, alors que nous ne sommes libres que hors de toute coercition ? A partir de ce constat, on peut soutenir que seul le rêve réserve à l’Homme tous ses droits ; c’est là qu’il recouvrerait l’autonomie de son imagination, et dès lors, à ce jour, notre exigence ontique ne serait tout bonnement définie que par la Liberté prévue par les Droits de l’Homme et du Citoyen, c’est-à-dire, la possibilité de faire tout ce que ne nuit pas à autrui, pour suivre la sentence de Bakounine : « la liberté des uns ne commence que là où s’arrête celle des autres », à laquelle il ajoutait : « on ne peut pas violer la liberté d’un seul sans violer la liberté de chacun ». Point. Une douce utopie, peut-être, une chimère, un songe, puisque tout cela n’est pas plus brillant qu’une étoile de mer ; mais enfin.

En tous cas, c’est ainsi que nous sommes revenus au « Contrat Social, par rapport à la liberté de la feuille morte », au « connais-toi, toi-même » et à la « caverne de Platon », ainsi qu’à « Depardieu non-philosophe épris de ‘liberté fiscale’ », ou la « soumission », pour mesurer ensuite « l’Humanité par rapport à la monstruosité », « tous les déterminismes et conditionnements », « le besoin de canaliser, cadrer », « le manque de liberté en raison de l’agissement des lois qui, ajoutés à l’esprit grégaire, semblent difficiles à gérer », font que « l’Homme n’est pas libre », « sauf si enchaîné ». On a rappelé que « l’interdit d’interdire de Mai 68 avait libéré les Médias, ainsi que les chaînes de radio et TV », « la rue et la Sorbonne devenant un café-Philo à l’échelle d’un pays », une voix clamant que « les lois servant d’encadrement,  l’on ne peut pas parler de liberté sans parler d’interdiction », puis une autre a vanté « les vertus du service militaire d’antan », « la liberté étant plus un risque qu’un devoir », en raison de l’aspect caustique de « sa créativité », « source de liberté », comme « le connais-toi, toi-même », « les croyances », « les espaces de pensée », « la libre écriture », « la main qui donne et celle qui reçoit », « l’‘Oulipo’, ou ouvroir de littérature potentiel (mouvement qui se donnait des contraintes d’écriture afin de favoriser la création) », « la main qui donne, issue de celle qui reçoit », etc..

Pour finir, Gilles nous a fait part de ses cogitations lyriques et, se dispersant dans la ville, tout le monde reprit par entier son indépendance.

Il se trouve que, la nuit tombant, j’ai rencontré, autour d’un réverbère, un homme qui semblait chercher quelque chose et je l’ai abordé :

- Que recherchez-vous ?

- Ma liberté !

- Mais, vous êtes sûr de l’avoir perdue ici ?

- Non, non. Mais, c’est là qu’il y le plus de lumière.

Carlos

Débat du 30 Décembre 2012: « Si seul mais si libre », animé par Gérard Tissier

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Posted on 30th décembre 2012 by Carlos in Comptes-Rendus

L’année 2012 touchait à sa fin, et le bilan semblait morose à tous points de vue mais, alors que visiblement les Hommes ne savaient toujours pas en quoi consistait la transcendance de leur projet, tendu ponctuellement par les volubiles autant qu’insipides « Regards croisés » inspirés de « Meetic », un singulier néo réseau social de célibataires, le dernier débat de l’année au Café des Phares®, celui du 30 Décembre 2012, s’intitulait : « Si libre, si seul ; Si seul, si libre », une assertion à deux-temps soutenue comme vraie du fait d’être énoncée, c’est-à-dire, un psychologisme de mauvais aloi traduit par une hypothèse vide de questionnement, proposé et animé par Gérard Tissier, qui se chargeait en même temps d’une mise en scène dont le rituel devait, en l’occurrence, sacrifier à une douteuse tartuferie, ou, pour l’exprimer autrement, à une ingénue égalité des sexes, matérialisée par l’alternance de la prise de parole entre les deux genres, le féminin et le masculin, ce qui objectivement en accentuait plutôt l’inacceptable différence, faisant du geste un simple effet de manches, aussi abstrait que vide de substance.

Comme s’il s’agissait de confettis, on a donc, à tour de rôle, Femmes, Hommes et Animateur, lancé en l’air des expressions tantôt de désespérance, tantôt de certitude et advienne que pourra. C’est ainsi que nous nous sommes pliés pour l’agrément du discours au jeu frivole de la « Régression », figure de style qui consiste à reproduire symétriquement les mêmes termes dans un stérile renversement d’idées, une affectation puérile qui cherche à éblouir par la confusion de ses étincelles, la dissociation étant ainsi programmée ab ovo, par la liaison de  « Libre » à « Esseulé » et vice-versa.

D’où, la question qui s’impose : « N’est-on libre que lorsque l’on est seul ? », ou à partir du moment où « L’on est avec son prochain ? » Cela entraîne l’interrogation subsidiaire : « la liberté prend son sens auprès d’un entourage ou au moment où l’on se trouve séparé de tous ? » « Est-ce dès que l’autre prend des distances envers moi, que je me trouve en mesure de me considérer libre, libre de toute subordination ? » « Libre, parce que seul ? Seul, parce que libre ?

Libre, si seul, c’est-à-dire, dès que je me morfond dans la solitude de mon coin ? Ce serait rédhibitoire et le revers de la médaille se trouverait auprès de ma fâcheuse exigence de Liberté, correspondant à l’amère solitude, me morfondant tout seul dans mon coin, criant de désespoir : « La Liberté est une solitude » ; ce serait rédhibitoire. Ou alors, gueulant : « Non, Non ! Pas d’Egalité ! » ; le résultat serait un infâme rabotage ! Ou encore : « Non, non ! Pas de ‘Fraternité’ !» ; la conséquence serait la plus accablante des servitudes.

Mais enfin ; on en a vu d’autres ! Le café philo a cet extraordinaire et bien reconnu effet thérapeutique qui permet l’hypertrophie de l’Ego dans des proportions considérables, l’estime de soi, c’est-à-dire, la surévaluation de sa propre valeur, entraînant dès lors un réel mieux vivre que l’on impose allègrement à son prochain, sans nécessité de montrer les canines. « Etre soumis quoique délié » ou « Attaché et néanmoins autonome » irait donc à l’encontre du « Il vaut mieux être seul que mal accompagné », proclamé par un proverbe du XVème siècle, l’« autre » représentant une limitation réelle de ma liberté, ce qui reviendrait dès lors à la préférence de la solitude comme condition indispensable de mon indépendance, étant donné que « le Prochain » figure le détestable asservissement de ma propre personne. 

Non ; orgueilleusement seul. Esseulé comme jamais, peut-être, mais fier de soi pour le meilleur et pour le pire, au point de faire appel au bistouri afin de se refaire les pommettes, les seins, les fesses, le nez, les bajoues dans le seul but de plaire à l’autre ? Objectivement, on a donc une réelle frousse de lui, la crainte de ses crocs forçant naturellement le respect, sinon la soumission. Le revers de la médaille serait de voir mon indépendance réduite à une amère solitude, qui me forcerait à me morfondre tout seul dans son coin, apostrophant les vieux idéaux comme la « Liberté » qui ne serait que solitude, dès lors que la vieillesse devient naufrage ; ce serait rédhibitoire. Ou, « Pas de ‘Fraternité’ !», mais alors la conséquence serait la plus accablante des promiscuités ! Ou encore, « Non, Non ! Non à l’‘Egalité’ ! » et la solution consisterait dans un légitime rabotage de mes droits ! D’où, la logique de la question : « Est-on libre lorsque l’on est seul ? » Alors que la confiance en soi vient des autres, cela entraîne l’interrogation subsidiaire : « la Liberté nous est-elle garantie par le fait d’être entouré de têtes d’angoisse ou de, usé comme des semelles, se trouver plutôt seul avec ses boutons? » « Est-ce dès que l’autre prend des distances envers moi, que je me trouve en mesure de me considérer libre, (libre de toute sujétion), ou « Vaut-il mieux se tromper avec tout le monde qu’avoir raison tout seul ? »

 N’oubliant pas que le mois prochain, Janvier, est dédié à Janus, un dieu à deux visages, chacun  portant sur une possibilité différente, je ne résiste pas à vous faire part de la chanson à l’encontre de « soi » (pas si libre que ça), oeuvre de Boris Vian et Michel le Grand, chantée par Henri Salvador :

« Tu vis chez moi, comme un salaud !

Va te faire cuire un œuf

Et surtout ne reviens pas,

Car tu repartiras les pieds devant ! »

 

Carlos

Débat du 23 Décembre 2012: « Y a-t-il une vraie vie, avant la mort? », animé par Raphael Prudencio.

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Posted on 24th décembre 2012 by Carlos in Comptes-Rendus

Le vrai est comme le faux, disait Guy Debord, ce qui explique peut-être l’échec d’une douzième Fin du Monde, entraînée cette fois par l’inversion des pôles et devant se produire à Bugarach, commune de 26 km2 et 200 habitants, bâtie à 480 mètres d’altitude au pied d’un pic de 1.230, et sous laquelle serait planqué le Saint Graal, alors que le scoop apocalyptique était prétendument récolté dans un étrange Calendrier Maya puis véhiculé par Internet ce qui, par contagion, a provoqué un spectaculaire boom immobilier dans cette municipalité et où, doublant le nombre des villageois qui, le trouillomètre à zéro, l’attendaient, s’est cassée les dents la meute de journalistes du monde entier, venue donc le 21/12/12 scruter la nouvelle prophétique, qui s’ajoutait aux 182 déjà annoncées pour notre planète. L’effroyable « Révélation » n’ayant donc pas été suivie d’effet, le débat du 23-XII-012 a pu avoir lieu comme habituellement au Café des Phares® et, pour rester dans la doxa « Y a-t-il une vraie vie avant la mort ? » fut le thème tragi-comique que Raphaël Prudencio, a choisi pour nous dessiller et laisser encore un peu d’espoir aux pauvres mortels que nous sommes, alors que le 2 Novembre était déjà dans les limbes. Et pourquoi pas une autre vie avant la mort, comme Chateaubriand entrevoit dans les « Mémoires d’outre tombe » et Bernardo Soares, alias Fernando Pessoa dans « Le Livre de l’Intranquilité » ?

Si donc l’on portait prosaïquement sur ce sujet incongru le regard inquiet de ceux qui ne vivent que de vivre, la question pouvait se résumer à « peut-on se traîner à vélo jusqu’à sa sépulture, lorsque l’on passe l’arme à gauche, fuyant ainsi sa néantisation ? » L’affaire de la véracité restant néanmoins ouverte, sans aller jusqu’au vampirisme régénérateur ni se demander exactement si d’aventure le problème posé admettait l’hypothèse d’« une fausse vie », un ersatz d’existence ou un simulacre de vivacité qui aurait ajouté à notre cogitation un aspect aussi facétieux que « Le Chat de Schrödinger », enfermé dans sa boîte à la fois vivant et mort, nous nous sommes largement épanchés sur ce casse-tête existentiel, « Y a-t-il une vraie vie avant la mort ? », comme si elle n’était qu’un pardessus d’hiver que l’on enlève l’été ; la vie serait-elle aussi bien vraie que pas vraie ? Dans le premier cas, le sujet se trouverait tout simplement vivant ; dans le second le quidam jouerait au « cadavre exquis » et, selon les aléas du « principe du tiers exclu », le raisonnement s’avérerait être faux et pas faux, un angélisme exterminateur proche de la consigne « Viva la muerte ! » (Vive la mort), le cri d’un général phalangiste dans l’université de Salamanca, pendant la guerre civile espagnole et qui a fait bondir Miguel Unamuno en Octobre 1936, y improvisant un discours humaniste qui a suscité des fascistes le cri de « à bas l’intelligence ! »

Bref. Sachant que la vie consiste à s’accommoder de tout, sauf de la camarde, car de là on ne revient jamais vivant, de quoi parlait-on ? De cliniques particulières qui prolongent sine die l’état comateux d’un sujet, ou du fait que la vie semblait nous inquiéter, sinon peser ? Or, là encore, il ne faut pas se faire d’illusions ; vraie ou pas vraie, par définition il n’y a pas de vie après la mort ; c’est une fin de ligne ! Admettre le contraire ce n’est pas un contresens ; c’est un non-sens, une absurdité, du temps perdu. Tel un fusil, le chagrin émousse aussi bien qu’il aiguise, pourtant, lors que l’événement en question survient, « je », le premier concerné, n’est plus là pour s’en soucier, la durée étant devenue absence de temps, le Temps à propos duquel Saint Austin avoua : « lorsque personne ne me le demande, je sais ce que c’est ; mais lorsque l’on me le demande, je ne sais plus » (Les confessions). Ceci dit, que serait donc une « vraie vie », par rapport à « une vie », tout court ? Y a-t-il des vraies et des fausses vies, que ce soit avant ou après la mort ? A quoi ressemblerait une fausse vie, au moment où le tocsin vient mettre un terme à l’existence ? A un épouvantail ? Que serait la vie d’un macchabée ? Là, on comprend mieux Maurice Blanchot, lorsqu’il dit « Je suis du côté de la littérature, contre la philosophie ». En effet, la brièveté aussi aléatoire qu’éphémère de la vie semble certes nous inquiéter, mais là, le souci était de savoir comment se dérober à notre misérable condition d’humains, qui creuserait sa tombe en nous, jusqu’à ce que l’on tombe dedans, sous l’œil de Dieu.

Beaucoup de choses on été dites, allant de l’évidence du « bios » et « zoé » aux différents paradigmes tel « le baptême d’eau ou de feu », « le désert moral », « une seconde naissance par le baptême», « la vie sans échec », « Pablo Néruda, j’avoue que j’ai vécu », « être acteur de sa vie » ou « la rater », « vivre sa vie pleinement », « la vie exemplaire des grands Hommes », « la vie des grands Hommes », « comment vivre autrement, croissant avec l’art, la philosophie, l’engagement, réapprenant à voir », « Sarko et l’Afrique sans Histoire », « Rimbaud », « la fausse vie », « l’altérité », « aller à l’essentiel », « la vie charnelle ». Quelqu’un a rappelé que « l’on n’avait pas encore parlé d’argent, alors qu’il fallait apprendre à bien gérer », « Sénèque et la vraie vie », « Kierkegaard et le risque de la vie », « la peur de la perdre ». On cherchait l’originalité et beaucoup de choses ont été rapportées, ainsi que la question « qu’est-ce qu’une fausse vie ? Une vie loupée ou joyeuse », « Spinoza et le sens de la joie », « une vie minuscule », « la résistance à la mort », « chaque philosophe ayant sa propre définition de la vérité », « même Brigitte Bardot », un jeune acteur affirmant « qu’il faut s’adapter aux exigences de la réalité », « la biographie qui assume sa propre violence », « la vie étant ‘je’ », « la frime », « Casanova », « Blaise Cendrars », « Christian Bobin, et ‘Le voyageur immobile’», « vie vibration », « l’illusion de Virginia Wolff », « la vie du consommateur », « la construction de soi, un continuum », « penser la vie pour pouvoir la vivre »…

Puis, le dernier mot étant réservé à Gilles, il a transformé « vie et mort » en poésie.

Que cela ne nous empêche pourtant pas d’en rire car, si la philo se soutient du « sens », la littérature « laisse entendre », et un danger nous guette : qu’au lieu de philosophie, sans préjuger de qui anime, on débite des brèves de comptoir.

 

- La belle mère est morte… Que fait-on ? Ensevelir ou incinérer ?

- Les deux. On ne peut rien risquer…

Carlos

Débat du 16 décembre 2012: »L’écriture, comme chemin, mène-t-elle à la philosophie? », animé par Sylvie Pétin.

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Posted on 18th décembre 2012 by Carlos in Comptes-Rendus

Nonobstant le massacre de vingt enfants et leurs profs perpétré dans une école primaire de Sandy Hook, à Newtown, USA, le monde ne s’étant pas effondré le 12/12/12, à 12h12 comme la menace qui pesait sur lui le laissait croire, on a remis l’échéance au 21 et chacun à repris du goût à la vie, s’offrant une « semaine d’éveil des sens » grâce au « Salon de l’Alimentation Salutaire et des Comportements Nutritifs », destiné à promouvoir le goût pour les plats festifs, source en même temps de plaisir, de santé et bien être, au moment de célébrer les bringues qui se profilaient, dont un avant goût nous était donné avec « L’écriture, comme chemin, mène-t-elle à la philosophie ?», le plat que, à cuisiner le 16 décembre 2012 dans le chaudron magique du Café des Phares®, mettant les petits plats dans les grands, Sylvie Pétin était chargée de servir.

A table ! Il faut manger tant que c’est chaud. Or, notre plat semblait assez froid et pas vraiment affriolant. Il s’agissait en somme d’accepter (ou pas) qu’une habilité calligraphique nous serve de voie qui conduirait à « l’amour de la sagesse ».

Il se trouve que « l’écriture », (dont l’étymologie renvoie à « ‘sker’ = gratter, graver ») est illustrée par le « scribe accroupi » et constitue la mémoire des Hommes, ce qui lui assigne une fin plus qu’un itinéraire ; en fait, bien qu’âgés d’un million d’années, les humains ne pratiquent l’écrit que depuis environ six mille ans, et c’est remuant l’alphabet qui leur a été légué par les Phéniciens d’il y a trois millénaires qu’ils arrivèrent, entre enluminures et incunables, à publier la « Bible de 641 feuillets », imprimée par Gutenberg à Strasbourg en 1452. A vrai dire, donc, le texte n’a pas d’ailleurs où se ressourcer ; c’est lettre morte qui, couchée sur des pierres, papyrus, parchemins ou rouleaux ne mène nulle part quoique, comme Monsieur Jourdain, qui faisait de la prose sans le savoir, certains se demandent si elle ne conduit pas à la philosophie.

En effet, dans l’écriture on trouve une façon de progresser ouverte à l’interprétation et possédant aussi bien une grammaire qu’une syntaxe qui permettent la renversante invention nécessaire à l’expression, si l’on veut ; de son côté, la philosophie dont les saints patrons paraissent être Anaximandre et Thalès, suppose elle, une démarche qui, passant par Héraclite en revient à la « koinôi », autrement dit, une mise en commun des principes rhétoriques de l’argumentation que véhicule la parole. Une façon de voir ou d’interpréter le monde pour des Hommes empreints de curiosité, dont la figure emblématique fut Socrate, même s’il n’a pas écrit une seule ligne, se contentant de bavarder pertinemment.

Ainsi donc, « écrire » pouvait s’entendre au Phares comme une ivresse furibarde qui, par un magique sortilège, aboutirait à la faculté de philosopher pour tout le monde, alors qu’une telle démarche spéculative fut motivée autrefois par l’étonnement devant les différentes facettes de l’infini (« apéïron », ou principe original, « arkhé », ou la nécessité d’un dieu), enfin, tous les phénomènes auxquels les premiers philosophes, aussi bien Héraclite que Thalès ont été sensibles, ce dernier étant même tombé dans un puits parce qu’il interrogeait la lune, en chemin.

En tous cas, ‘considérant l’écriture comme une préoccupation d’artiste’ qui, ‘travaillant par tâtonnement’ creuse jusqu’à ‘trouver une forme’, ‘l’écriture tient de l’ineffable’ pour les uns, de ‘l’on dit’ pour d’autres, tous ‘sensibles au monde de par la réflexion sur soi’ et sur lui, ‘un exercice sur la vérité’ et ‘d’engagement à travers l’art’ qui serait ‘la philosophie en tant que poésie’ par ‘la mise à distance de soi’, autrement qu’au travers d’une ‘liste de courses’, alors que ‘l’on n’a jamais autant écrit’, malgré ‘les efforts à accomplir’, ce qui rejoignait ‘les états d’âme’ et même ‘la quête du moi’ ou ‘fondement de notre pensée’ qui mènerait à la philo par ‘la mise à distance de soi-même’, ‘passant de l’expérience au récit’ par ‘le détour de l’écriture’ qui serait ‘un chemin ou un sommet à atteindre’, même si ‘ça représente un travail’ et ‘exige parfois un retour aux sources’, si ‘‘l’on peut associer parfois les mots ‘juste’, ‘justesse’, ‘justice’ et ‘meurtre’, ‘assassinat’ ou ‘crime’’’. ‘Pourquoi parle-t-on sinon pour se libérer ?’, se demandait un participant, un autre y voyant ‘trois axes, selon Badiou : passage de l’immanent au transcendant, étonnement et mise à distance’, puis à ‘l’échange avec soi-même’, au ‘choix des mots’, à ‘l’engagement’, à ‘l’authenticité’, à la ‘maïeutique’, aux ‘briques qui permettent de nous construire’, à ‘la sacralisation du futur’, n’oubliant pas ‘l’importance de l’imprimerie dans la diffusion de textes importants’, alors que d’autres entendaient que ‘trop d’écrit tue l’écrit’, qu’il ‘faut se trouver soi-même’ et ‘ne pas attendre autrui’, tenant au ‘journal intime’, à ‘l’engagement’ et à ‘l’acte de foi’, ‘condamnant l’acte de délation’, appuyant ‘le fait de s’inscrire dans le monde’, les ‘questions qui nous permettent de nous comprendre’, les ‘trois questions de Kant : qui suis-je ?, où suis-je ?, que puis-je savoir ?’, ‘délier sa pensée qui fausse le sens et le monde’, car ‘témoigner de notre passé’, ça ne suffit pas pour faire un philosophe. Tout y passe : ‘distinguer pensée et philo’ ; ‘la disparition de l’écriture Maya’ ; ‘le sens du texte philo’ qui ‘n’est pas du vent’, même si ‘parfois on s’aperçoit que c’est confus ce que l’on croyait clair’.

Puis, parce que c’était l’heure de terminer, on est passé aux « premières prises de parole », et l’on a découvert que « pour se transformer soi-même, il vaut mieux rester soi ».

Finalement Gilles mit un terme à la divagation, pointant « l’écriture comme un acte maïeutique/ un jaillissement, une empreinte, une impression : un monde d’autrefois/ être soi/ a-tension hors de soi/ cheminement/ reconstruction/ aboutissement…/ écriture… » 

    

Dehors :

- On mange là ?

- Oui ! Qu’est-ce qu tu prends ?

- Moi, j’ai commandé un Sandwich ! Ça nourrit et est plus facile à manger qu’à écrire.

Carlos

 

Débat du 9 décembre 2012; « Qu’est-ce que vivre? », animé par Eric Auzanneau.

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Posted on 11th décembre 2012 by Carlos in Comptes-Rendus

C’était le Festival d’Automne et, le 9 Décembre 012, à Paris, personne ne savait à quel saint se vouer. C’est pas qu’il y en eût trop, mais il nous fallait connaître le bon. En effet, dans la capital on avait le choix de faire un tour au Salon du Cheval, pour y admirer les plus beaux purs-sangs du monde notamment ceux de l’Ecole Portugaise, sinon, il serait encore possible d’aller jusqu’à Disneyland afin de fêter les cent ans de Mickey, une autre alternative consistant à participer aux Repas d’Amitié et accueil des « Sans logis » dans les églises, Nietzsche à l’honneur dans la Maison de la Poésie étant une autre passionnante éventualité. Le fait est que, finie l’Election Miss France à l’avantage de Miss Bourgogne, après une généreuse soirée Téléthon au profit de la recherche dans le domaine des maladies orphelines, les amateurs de philosophie sont allés le lendemain jusqu’au Café des Phares®, pour prendre part au débat philosophique qui, animé par Eric Auzanneau, portait sur la question : « Qu’est-ce que vivre ? ».

Les philosophes nous étonneront toujours. Si l’on veut essayer de donner une suite philosophique à l’étrange colle posée par cet exercice, il semble que la réponse la plus sage à rendre se trouverait en aval du sujet c’est-à-dire, si l’on suit Montaigne, qui l’aurait appris de Platon, « philosopher, c’est apprendre à mourir » ! Ça devenait inquiétant. Mais ce n’est pas tout. Une fois que la proposition est de définir « le fait de vivre » causant philosophiquement là-dessus en grand comité, nous sommes bloqués par le précepte Aristotélicien « Primum vivere, deinde philosophari », « Vivre d’abord et philosopher ensuite ». La réalité de notre existence précéderait donc toute préoccupation rationnelle mise en doute philosophiquement, comme c’était le cas en ce dimanche. Comment s’en sortir alors de l’interpellation à propos de la vie, si l’adage « Vivre d’abord et philosopher ensuite », privilégie la vie par rapport à l’action d’en discourir, la réalité de notre existence ayant donc le dessus sur toute polémique à ce propos, comme il était notre intention de le faire en ce dimanche, nous demandant  « Qu’est-ce que vivre ? »  Bref, on avait certainement placé la charrue avant les bœufs, et nous voilà par conséquence mal barrés pour déployer une pensée cohérente à propos de « la nature du vivre », puisque de surcroît, notre démarche spéculative se trouverait inversée par rapport à notre préoccupation élémentaire : VIVRE.

En somme, nous étions face à un drôle de rébus, qui nous dissuadait d’en spéculer philosophiquement, à moins de vivre d’abord, selon l’adage en épigraphe. « Ça se mordait la queue » et le débat n’avait vraiment plus d’objet, à partir du moment où, « avant de philosopher il fallait vivre, tout simplement », et que, le sujet étant donc mort-né, le contrat dominical était logiquement rempli. Sauf que l’exercice prévu pour soixante minutes ne pouvait pas s’arrêter là et, comme si l’on s’interrogeait au sujet « de l’œuf ou de la poule, lequel fut le premier ? », dont la réponse consiste à prouver que « l’œuf est dans la poule et la poule est dans l’œuf », tel que l’avait depuis fort longtemps saisi Silésius, nous décidâmes de faire illusion le temps d’un débat.

Il ne nous restait par conséquent qu’à développer l’idée, et la première réponse à enfiler dans le micro devrait dès lors porter logiquement sur « ce qu’il faut faire avant de philosopher », c’est-à-dire, « vivre » et, d’après la colle posée, même un pieux « requiem » ferait l’affaire.

Point du tout, et c’est ainsi qu’il fut sagement répondu, en vrac : « vivre n’est pas survivre », et « n’a pas le sens d’exister », d’autant plus que « si nous ne faisons rien pour rester vivants, vivre est un paradoxe », « vivre/état, et vivre/action étant à distinguer », ainsi que « la philo doit rendre plus intéressante la vie qui, pour les grecs correspondait au ‘bios’ », alors que d’autres « la liaient à ‘l’éthos », « la voyaient comme une énigme », « liberté d’agir », « un paradoxe », « ne pas subir ou se résigner », « une vie pouvant être épouvantable mais intense », « où commence-t-elle ? », « à quoi on l’attribue-t-elle ? », « la vie coupée de beaucoup de deuils », « manger pour vivre et pas vivre pour manger », « le statut du vivant », « on n’est pas tous égaux », « l’Homme animal politique », « gérer la déception, changeant de désir ou se projeter dans l’avenir » », « c’est la vie qui a le dernier mot », « on ne peut pas vivre que d’amour et d’eau fraîche », « l’énergie qui nous traverse », « savoir perdre son temps », « c’est dur de rester silencieux », « on vit avec deux sœurs jumelles : le savoir et la souffrance », « on a le choix d’être ou ne pas être (Hamlet), « ‘la vie ne vaut rien mais rien ne vaut la vie’ », « on mange pour vivre mais vivre ce n’est pas la vie », « pédaler sur une pente c’est se sentir vivre », « comme disait Marc Sautet, philosopher, c’est un moment d’arrêt », « Rimbaud dit que la vie est ailleurs », « ni agir ni rester dans la contemplation », « il y a autre chose dans la vie qui serait a-humain », « je pense tenir là, l’enfant qui est en moi, car la pensée prend le corps par la main, comme le film ‘Avalon’ explore la vie initiatique et il y a un prix à payer pour aller en l’au-delà », « la vie se joue dans l’Homme et il n’en a pas la maîtrise »… puis, pour conclure, « qu’est-ce qu vivre ?, comment vivre ? Lorsqu’il y a  conscience, on est dans l’existence ».

Pour retrouver la sérénité de vivre, il ne nous manquait plus que la poésie de Gilles : « Vivre libre, se délivrer/ Se sentir vivre, vivant/ Quintessence, finalité, ‘vivalité’ / Vivre, expérimenter, humaniser, s’aimer… »

Ayant au coin de l’oreille cette expression d’un doute existentiel dont Maïakovski se fit le héraut : « Je sais que mon ‘je’ est trop petit pour moi et obstinément mon corps m’en expulse », je me suis trouvé dehors, où un débateur fredonnait un vieux « J’ai oublié de vivre… », de Johnny Hallyday.

- Dis donc, chéri, où est-il le livre « Comment vivre jusqu’à 120 ans » ?

- Je l’ai jeté à la poubelle…

- Et pourquoi donc ?

- Parce que ta mère arrive demain, et je ne veux pas qu’elle lise des choses pareilles !

Carlos

  Addenda

 Le Ciné-Philo fêtant sa quinzième année, comme il convenait Daniel Ramirez a fait projeter, à L’Entrepôt, le film en noir et blanc tourné en 1961 par Alain Resnais, « L’année dernière à Marienbad », c’est-à-dire, la rencontre de deux êtres qui se croisent et se fuient dans une station balnéaire en République Tchèque, à la suite d’une incertaine liaison entre eux l’année d’avant en ce lieu même, et qui fut Lion d’Or à la Mostra de Venise, la séance étant suivie d’un débat fort intéressant, sur l’introspection et, entre autres, d’un vin d’honneur pris au bar de l’établissement multiculturel.

 CG

Débat du 2 décembre 2012: « Comment faire la paix avec son passé? », animé par Gérard Tissier

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Posted on 4th décembre 2012 by Carlos in Comptes-Rendus

Alors que personne, soit-il le Fils, le Saint Esprit ou les Anges, excepté le Père, connaît le Jour et l’Heure de l’ébranlement cosmique qui annoncera l’épreuve finale des humains, c’est-à-dire, le Jugement Dernier, moins de vingt jours avant la date retenue pour un tel événement eschatologique, pour tout dire, le spectacle grandiose du retour sur terre du Fils de Dieu, dans sa gloire, afin de précipiter la fin du monde, au lieu de se mettre à l’abri au pied du pic de Bugarach, seul endroit, dans l’Aude, où le genre humain aurait des chances d’en être épargné, c’est vers le Café des Phares® que, sur fond de discorde entre ouvriers et patrons de l’aciérie ArcelorMittal, les habitués des débats philosophiques hebdomadaires se sont plutôt dirigés, débonnaires, afin d’y assister à celui du 2 décembre 2012 qui, animé par Gérard Tissier, tournait autour de la question hâtivement choisie : « Comment faire la paix avec son passé ? ».

C’était cousu de fil blanc. D’après les milieux bien informés, on sait que « les Calendes Grecques » n’arrêtent pas de recruter et que ses premières unités sont déjà aux frontières du présent. L’heure est grave et certains pensent qu’il serait urgent d’élaborer une « entente cordiale » avec l’ennemi, au lieu d’aller vers le bain de sang car, d’ordinaire le passé est assez conciliant et ne se mêle pas de nos affaires, surtout que l’on n’a rien à se reprocher en ce qui concerne la violation des territoires respectifs. Mais comment s’y prendre ? En question étaient plutôt la durée, notre seule source d’approvisionnement, et le temps révolu, visiblement furax, va savoir pourquoi. Le fait est que, le présent n’ayant que la fugacité de trois secondes, on se trouve au passé dans un battement de sourcils et, afin de faire face au futur, nous vivons quasi en permanence des ressources du temps constamment révolu et aussi bien Freud que Proust, Lamartine, Bergson, Rousseau en connaissaient un rayon ; il nous dévore, jour après jour, le temps. Autrement dit, « Si tu t’imagines, / Fillette, fillette / Xa va, xa va, xa/ Va durer toujours !/ Ce que tu te goures/ Fillette, fillette… » ; « Carpe diem », est donc la consigne. Tâche de profiter du jour présent, sans te soucier de quoi que ce soit, car même le futur en a systématiquement gros sur la patate, déçu de ne plus l’être, de tomber dans un nouvel présent, puis dans l’oubli du passé. Que faire pour qu’il ne moufte plus, ce passé ?

En ben… Il y avait là un os… ou même deux. Depuis huit jours, nous sommes dans l’angoisse jusqu’à guersoi, et de ce fait, culpabilisons à mort ! On a commencé par se demander, la semaine dernière, si d’aventure « Sommes-nous fâchés avec nous-mêmes ? », et voilà qu’à présent il y a des soupçons d’une vieille discorde entre nous et le passé qui fait des appels de phares, derrière pour que l’on l’attende, afin de se réconcilier, alors que l’on veut aller notre chemin sans s’attarder sur les embrouilles révolues. A partir de là, on a « convenu de faire la distinction entre psychologie et philosophie », « que tous les goûts sont dans la nature, et que l’on s’en accommode », « l’endroit le plus près du passé étant ma naissance » et « faire la guerre au passé est faire la guerre à soi-même », « alors que seul l’oubli est salutaire », « de pair avec le pardon », « dont l’acte de Willy Brandt à Varsovie est un exemple », « Karlsfeld dans sa traque aux criminels de guerre », « la guerre est la mère de toute chose », « je suis dans ce monde mais pas de ce monde », « faire la paix n’est pas seulement s’opposer à la guerre », « l’Histoire devient autonome », et quelque chose de figé », « la paix peut se remettre en question », « pour les uns le salut se fait par la confession, pour d’autres par la grâce » et « il y a des moments de grâce dans un café philo », pulsion de vie et pulsion de mort », « Staline s’entend avec Hitler », « la dèche en Allemagne après la guerre », « le déni de réalité de la résistance », « demander à quelqu’un qu’il nous pardonne  pour pouvoir pardonner ».

Question. Si le sujet était un autre, tous ces dires ne lui iraient-ils pas comme un gant ? Puisque, bon sang de bon sang, d’après l’énoncé, tout le monde était implicitement censé être en guerre avec son passé, va savoir pourquoi, et d’autant plus que la nécessité d’établir la paix s’avérait problématique, malgré la centaine de cerveaux présents qui, ne suffisant pas à démêler l’écheveau, rendaient saugrenue l’insoluble devinette, peut-être aurait-on intérêt à ne pas y regarder de trop près, au cas où nous, ou le passé, serions  juste en désaccord avec une paix trop hâtive ou fallacieuse.

Peu importe. « Ce qui est passé est passé ».

Avant de « faire un sérieux examen de conscience de son passé », personne n’aurait à se demander comment s’y prendre pour l’apaiser ? D’ailleurs, « qu’avons-nous à nous reprocher ? » Est-il constant que l’on soit d’ordinaire, en conflit avec soi autrement qu’au présent, en raison de nos dérèglements ? Faudrait-il retourner « à son passé » pour lui proposer de faire la paix, témoigner de ses regrets ? Trop tard. On a évoqué, alors, Georges Orwell qui prétend que le passé  n’existe pas, mais que l’on explore pour savoir comment agir ».

Au zinc, devant un petit gâteau en forme de coquille et une tasse de thé : 

- Te souviens-tu, Madeleine, du temps perdu de notre jeunesse ?

- Ah, le passé…

- Le problème avec le passé, c’est qu’il nous rend vieux, sans que l’on s’en aperçoive.

Carlos

Débat du 25 novembre 2012 : « Sommes-nous fâchés avec nous-mêmes ? », animé par Claudine Enjalbert.

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Posted on 26th novembre 2012 by Gunter in Comptes-Rendus

Malgré le début des joyeux Marchés de Noël, c’est sur fond d’échauffourées à propos de l’opposition au nouvel aéroport de Notre Dame des Landes et de la cacophonie à l’UMP pour l’élection de leur chef de file, que dans la Semaine de la Coiffure, des Droits des Enfants, des Jeux de Société, des Journées d’Action Contre les Violences à l’Egard des Femmes, en même temps départ du Festival des Arbres et de la Forêt, que, le 25 Novembre 2012, a eu lieu au Café des Phares®, le débat « Sommes-nous fâchés avec nous-mêmes ? », dont l’animation a été confiée à Claudine Enjalbert.

La guerre contre soi était ouverte ! Du latin « fastic », le mot « fâché » veut dire, étymologiquement, terre inculte, et par association d’idées, « goujat ». C’était donc à se demander si, par hasard, nous ne nous faisions pas la tête entre voyous, là, sur place et, s’il s’avérait exact qu’il y avait de l’eau dans le gaz au plus intime de nos êtres, il faudrait assumer tout de suite, sans chercher à savoir qui a provoqué la zizanie, « nous », ou « nous-mêmes », autrement que par la venue de « nous-même » vers « nous », parce que « nous » n’est pas sans reproche non plus ; il est trop gâté. Ou alors, sachant que tout ça ne date pas d’hier, on pourrait faire comme si de rien n’était, tel que la sagesse le recommande ; une fâcherie ne dure jamais plus de trois ou quatre jours et il faut rester serein, sans attendre lequel fera le premier pas pour se réconcilier. Si « nous-mêmes » est plein de morgue, « nous » ne l’est pas moins. Quoique, la moindre des choses serait peut-être de tirer au clair qui a commencé, pour quel motif, depuis quel moment, et jusqu’à quand avait-on l’intention de se tourner le dos, au risque de se rendre ridicule, s’énervant à fouiller dans ces bisbilles, puisque la raison nous disait qu’en tous cas, il ne faut pas que ça dure, et nous ne devons nous poser pas trop de questions, avant d’apprendre le motif pourquoi « nous-même » boude dans son coin, du moment que « nous » n’avons rien à nous reprocher mis à part l’ivresse d’un moment. Rêvons-nous d’une autre façon d’être ou de jouir autrement ? Pour quelle raison se demander le mobile de l’attitude du vis-à-vis qui nous tient tête, si c’est vrai que « nous » est plus indulgent qu’un « nous-mêmes », plein d’une suffisance mal venue pour ne pas dire inadéquate et que, dans ces conditions, on pourrait éventuellement se rabibocher ? Il est évident que « nous » devons dès lors faire le premier pas, sans attendre que « nous-mêmes » s’y résigne. « Nous » devons aller vers « nous-mêmes » bien avant que lui ne le fasse, et il serait alors très intéressant de chercher à connaître avec lui la raison pourquoi nous avons pu nous faire la gueule.

Certes, la colère est une émotion légitime qui nous amène à réagir, nous donne de la force et nous informe lorsque nos besoins élémentaires sont frustrés. Il ne faut pas oublier, pourtant, que souvent l’alcool y est pour quelque chose.

Voilà pourquoi le débat a eu lieu et, dès le commencement, un participant a affirmé que « nous sommes des êtres dissociés, Raison et Passion provoquant le divorce du ‘moi’, ‘ça’ et ‘surmoi’ analysé par Freud, triade sur laquelle repose toute la psychanalyse », puis l’amalgame ‘fâché/rupture de soi’ fut évité, quelqu’un ayant ajouté que « plus il vieilli plus il se réconcilie avec le pêché originel », raccommodement repris à plusieurs moments, entrecoupé de « références au masochisme », « à l’égoïsme » et « aux pires ennemis que nous sommes de nous-mêmes », « à discuter dans des Cafés Psycho » d’après l’animatrice, suivi « du doute sur la perfectibilité de l’humain » et de « la transparence à soi-même » ainsi que de « l’éventuelle soumission à d’autres », « les dernières péripéties politiques (Copé/Fillon) étant rapprochées de celle de Ségolène Royal : ‘je ne suis pas fâchée, je suis en colère’» ou « du sentiment de ne pas être à la hauteur », opposée à « la joie d’avoir tout raté ». Une voix s’est élevée pour faire remarquer que « l’on mélangeait deux choses : le ‘contre soi’ (psychologisant) et le philosophique qui occulte un diagnostic », puis une autre pour « évoquer Léo Férré ‘je suis un chien…’ ou la vie inversée », encore « l’hystérie » et « l’infantilisme qui consiste à se fâcher contre soi-même, un état de guerre permanent », une dame faisant remarquer « qu’il y des guerres ‘pour’, et des guerres ‘contre’ et qu’il faut avoir la capacité de les développer », suivie du « fâché avec ou fâché contre », « le cas Rousseau qui, manque de moyens, abandonna ses enfants », « le dualisme ‘deviens ce que tu es’, qui nous divise », « l’Homme qui se veut admirable et se voit misérable », « le divorce entre soi et soi » pour, finalement revenir au « Aime ton prochain comme toi-même », que Gilles illustra de sa poésie : « Nous sommes, nous-mêmes, notre seul ennemi : Nous sommes, nous-mêmes, notre pire ennemi. . . », puis on vida la salle pour se trouver dehors à papoter encore… Voilà, voilà ! En bref.

- « Je suis très, très fâché ! », s’épancha quelqu’un.

-Après qui ?

-Après moi-même !

- Ne soyez pas cons, vous deux ; essayez de prendre de la distance…

Carlos