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Bonjour à vous, qui vous intéressez à la philosophie. Sachez que vous pouvez trouver sur ce site, le compte rendu des débats qui ont lieu au Café des Phares (Paris, Place de la Bastille), chaque dimanche de l’année, et auxquels rien ne vous empêche d’ajouter vos propres commentaires. Par ailleurs, d’autres rubriques sont en mesure de vous aider à vous orienter quant aux activités et autres événements philosophiques de la cité et du monde en général.

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Le 30 janvier 2011 : « Vivons-nous sous l’emprise des objets ? animé par Sylvie Pétin.

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Posted on 31st janvier 2011 by Cremilde in Comptes-Rendus

Le sphinx de Gizeh, dans la Basse-Egypte, a certainement tremblé d’effroi voyant voler en rase-mottes au-dessus de sa tête des terrifiants objets belliqueux, destinés à protéger Abou al-Hôl, (le père de la terreur) de ses administrés qui voulaient du pain. Alors ? « Vivons-nous sous l’emprise des objets ? » En tous cas, tel était le sujet de notre débat, animé par Sylvie Petin le 30 Janvier, au Café des Phares, ce qui en clair présupposait que les objets seraient dominateurs au point de nous donner la chair de poule et nous affligeraient même à coups d’yatagan, bien que toutes les choses, en tant qu’outils, nous facilitent la vie, ce vers quoi tendent notre volonté ainsi que notre action, nos désirs et efforts. Peut-être que ce serait précisément le fait de tenir à eux qui serait malsain car, au fond, il n’y a que pour faire un enfant qu’un désir suffit, alors que pour perpétuer l’espèce humaine on ne peut se passer des objets appropriés qui deviendraient usurpateurs. Une guillotine par-ci, un fil à couper le beurre par là, puis la TV dans la chambre à coucher, (sinon l’ordinateur familial) ; en bref, comme on fait son lit on se couche et des tas de trucs viennent nous défier dans la nuit, moment propice à l’apparition de monstres.

Dans la fébrilité de la démonstration on a déduit que l’objet ne s’use que si l’on s’en sert, du portable à la serpillière en passant par la branche d’arbre, d’où un nécessaire rapport à la vérité sans quoi la chose se rebifferait. Mais, soyons clairs. Il semblerait que « Chose » désigne n’importe quel objet de pensée dont le sujet est conscient. Grande ou petite, superflue ou indispensable,  la « chose en soi » a une existence indépendante, tandis que nous nous montrons comme nous sommes par rapport à elle : tributaires. Elle est sujet de tout ce que l’on y perçoit. L’« Objet » (« objicere »,  jeter devant), c’est-à-dire, tout ce que se tient en face de nous, soit-il une idée ou quelque phénomène réel, est susceptible d’une connaissance intellectuelle ou sensible que la perception n’épuise pas. De là à affirmer que, même s’ils ne sont pas à leur place, un marteau, un réveil matin, un vélo, un livre, l’objet d’un désir ou l’heure d’un train me dominent comme un simple tamagotchi, il y a un pas que je n’oserais pas franchir. En tout état de cause, le concept d’objet s’oppose toujours à celui de sujet et, pour être objectivement sous leur emprise (quelque chose qui pourrait me nuire plus que servir), il faudrait qu’ils se logent dans mon entendement de la même manière qu’ils sont dans mon agenda ou ma boîte à outils et pas comme je les conçois.

Les objets de nos sens nous narguent, certes, mais n’existent que pour nous, raison pour laquelle, « lorsque je rentre tard le soir, j’introduis discrètement la clé dans la serrure de ma porte, afin de ne pas déranger tous ces êtres de la nuit, comme l’écrit Kurt Tucholsky (ou Karl Kraus ?) dans une de ses nouvelles, le grincement du plancher, le lent entassement de la poussière sur le tapis, le bruissement de souris, blattes et cafards dans les placards ou le bond du chat qui s’installe sur la table ». 

Aussi, « si j’enlève mes bracelets, ôte le chouchou qui noue mes cheveux, détache mes pieds de leurs chaussures, pour résumer de mémoire Yannis Ritsos, je crois que je me volatiliserais et je ne le voudrais pas. C’est sans doute pour cela que je les porte, car à leur façon ils me retiennent » dans cette pérennité de l’ombre où toute chose vient se fondre pour se conformer à la loi du silence… lieu des grandes idées ou des provisoires oublis, de concert avec le trottinement des objets que nous croyons exister et n’existent pas, que nous croyons pouvoir emprunter alors que l’autre ne consent pas à le faire.

Il y a de ça. Un jour, j’ai demandé à mon voisin de me prêter sa corde à linge pour y étendre le mien. Il me dit :

- Je ne peux pas, j’ai de la farine à faire sécher.

- Mais, la farine ne tient pas sur un fil…

- D’accord. Mais, que veux-tu que l’on réponde lorsque l’on n’a pas envie de prêter un objet?

Carlos Gravito

Le 23 janvier 2011: « La révolution » animé par Gunter Gorhan.

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Posted on 17th janvier 2011 by Cremilde in Comptes-Rendus

« La Révolution »

 Depuis quelques jours, sur le devant des kiosques la couverture du n° 46 de « Philosophie Magazine » titrait, en bas d’un gars bâillonné par une couronne renversée qui lui descendait jusqu’au cou : « Le peuple a-t-il perdu le pouvoir ? » Ailleurs, en Tunisie, les trompettes jaunes du jasmin d’Hiver annonçaient les premiers frémissements de la nature qui y ont allumé le feu d’enfer déclenché par l’immolation dans les flammes de Mohamed Bouazizi à Sidi Bouzid et tout le monde s’en empara, pour que l’action ne devienne pas une illusion. C’est ainsi que le 23 Janvier, au Café des Phares, afin d’introduire un peu de doute dans les apparences, nous avons voulu en causer aussi et l’animateur, Gunter Gohran, a choisi pour le faire, « La Révolution », un sujet qui dépassait des autres proposés, « malgré le désenchantement pour cet idéal », comme il a été dit, en raison « des incertitudes qui y sont liées », et nonobstant « la réussite de Gandhi ou de la chute du mur de Berlin », auxquelles, « sans oublier 1789 » ou « les dérives à la Pol Pot », s’ajouteraient « Mai 68 » et la non négligeable « la libération de toxines », des faits singuliers « qui ne tombent pas du ciel ».

Quelqu’un a évoqué alors « les Hommes poétiques et les dialogues en ligne plutôt qu’en cercle » et on est revenu sur « Philosophie Magazine » et sa problématique. « Y aurait-il péril en la démocratie ? » s’y demande l’éditorialiste, annonçant qu’un « français sur deux en est convaincu, les élites ayant confisqué au Peuple les manettes du Pouvoir ». Et pour cause. Dans l’Espace Public, où le Législateur élu délibère en vue de l’Intérêt Général (le Politique), la sauvegarde de l’intégrité de chacun est toujours menacée par les Intérêts Privés (le non-Politique), compromettant sans cesse la Chose Commune, ce qui transforme la Démocratie en un vain rêve pour ne pas dire une absurde construction de marionnettes de papier format A4 « qui vont prédire la pluie ou bien le beau temps, grâce au petit clown qui me fait rire », comme chante Christophe, dans le registre chansonnette, puisque le Peuple se défait de sa voix pliée et repliée, avant de l’enfouir pour cinq ans dans une urne, lors du Sacre Electoral.

Plus sérieusement, Pierre Rosanvallon s’exprime à ce sujet dans « Les métamorphoses de la Légitimité démocratique », où il est question de la privatisation du pouvoir, arbitré par les groupes de pression financière au moyen d’objets constitutionnels mal identifiés qui s’y ajoutent, nommément un quatrième pouvoir (la police), puis un cinquième (sans tête ou statut organisé), autant d’agences de régulation à l’américaine, qui ne rentrent dans aucune catégorie du Pouvoir Trinitaire (Législatif, Exécutif, Judiciaire), l’arrogance libérale d’une main invisible tombant à point nommé au cœur du Bien Commun pour en faire bénéficier le Particulier au mépris de l’Intérêt Général, tradition de la mise en ordre de l’inconnu selon les instincts de l’ordre tribal, sans ébranler le modèle dé-mo-cra-tique, l’égalité imaginaire d’un lieu vide de sens où l’essentiel est de, en accord avec l’opinion publique, éviter la question de fond : « d’où vient la défiance du peuple vis-à-vis de l’Etat ?», l’Impartialité étant d’accepter tous les points de vue concevables, même les plus démagogiques, une pensée élargie qui n’a qu’à attendre les cracks boursiers pour feindre refréner les craques du capital. Bref : ce sont les rapports entre les Hommes qui sont à reprendre si ce n’est pas déjà trop tard.

Ainsi donc, La Révolution, conséquence de l’antagonisme des volontés dans l’espace politique, l’endroit où s’affrontent les passions exacerbées par les différences sociales dès qu’il est corrompu par les intérêts particuliers, est bien quelque chose de plus qu’une tâche ponctuelle. C’est une réalité constante et impérieuse, ou mieux, une vertu qui, une fois abandonnée, sonne, à terme, le glas de toute recherche de dignité.

 Carlos Gravito

Débat du 16 janvier 2011 : « La Nature nous délivre-t-elle un message éthique ? » animé par Sylvie PETIN.

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Posted on 12th janvier 2011 by Cremilde in Comptes-Rendus

Dans la foulée des bouleversements politiques, en Tunisie, et géologiques en Australie et au Brésil, le 16 Janvier l’ampleur des phénomènes discontinus constituant ces remue-ménage a atteint le Café des Phares où se sont produites, pendant cent minutes, de violentes secousses cérébrales provoquées par une désinvolte question « La nature nous délivre-t-elle un message éthique ? », devant laquelle l’animatrice Sylvie Pétin a crû bon de faire la génuflexion et d’annoncer qu’il y avait trois bénitiers (trois micros) à la disposition des fidèles.

A partir de là, même le pieux geste de saisir un de ces objets sacrés, qui légitiment la participation de l’assemblée au débat, devenait une longue prière, alors que la dubitative sentence ne rentrait dans le crâne de personne de censé, malgré le fait que l’on peut s’adonner partout aux exercices les plus psychédéliques, ce qui n’est pas un motif suffisant pour nous embarquer tous dans un voyage le long d’indéterminés délires hallucinogènes. Néanmoins, sous prétexte que « la nature peut être très cruelle », la sacristine a eu le réflexe d’appeler à sa rescousse Descartes, Newton, Spinoza, Rousseau, Kant, Heidegger et même Wittgenstein. Mauvaises pioches car, en toute circonstance, chacun doit avoir présent à l’esprit qu’un Café Philo n’est pas un lieu approprié aux pléthoriques développements oratoires, soient-ils destinés à rattraper une ânerie (pas une allégorie) consentie au début comme thème de réflexion, et je saisis l’occasion pour inviter à la retenue tous les participants à nos débats. J’estime effectivement que c’est insensé, sinon preuve de muflerie, le fait contreproductif de s’expliquer au-delà de, disons, environ une ou deux minutes. Je ne dis pas que ces laborieuses éjaculations soient stériles ; ça nuit tout simplement à l’intelligence de l’acte d’amour et par conséquence à notre tendre coït avec la sagesse, collectif et hebdomadaire, une continuité de nous-mêmes suscitée au départ par un chuchotement qui tient lieu de sucre dans le café des uns et des autres, même s’il y en a qui n’aiment ni les glucides ni la saccharose.

Mais, revenant prosaïquement à nos moutons, il paraît que l’ensemble des signes d’un message ne peut pas être déchiffré sans l’existence d’un code commun à l’émetteur et au récepteur, bien que dans notre cas chacun fait ce qui lui plaît. Sachant que la Nature la plus proche de nous, appelée à rédiger ce putain de message, traîne derrière elle un poids lourd composé de cinq continents, sept mers ou océans, deux cent quatre pays et huit cent neuf îles,  c’est une bouteille à la baille. Vraiment peu de chances pour que, plongé dans son univers disparate, notre Habitat nous fasse savoir ce qu’il comprend par éthique.

Etant entendu que les valeurs (éthiques ou pas) sont des projections de l’esprit humain afin de régler la vie en commun de tous les Hommes, et que la Nature ne fait que celer en elle un principe de croissance et développement, répétitif jusqu’à l’ennui, dont l’action s’organise entre deux lois contraires qui vont de la quiétude à l’effervescence, il est vain d’espérer un chimérique accord entre Elle et l’espèce Humaine. S’il est donc clair que la Terre (Lune comprise) nous ignore et n’a par conséquent une gnose de notre existence, comment pourrait-elle manifester des égards envers les Hommes, griffonnant sur les nuages des messages empathiques à leur adresse, éthiques de surcroît, à moins de connaître l’alphabet de toutes les démences de l’humain ? Tant de bienveillantes attentions nous permettraient alors d’espérer voir un jour le courant tropical, nommé « El niño », actionner son clignotant lorsqu’il veut se détourner de sa route habituelle dans la circulation atmosphérique, nous épargnant ainsi la noria de ses effroyables dévastations.

Carlos Gravito

Débat du 9 janvier 2011 : « Celui qui aime l’Humanité n’aime pas les Hommes » animé par Gérard Tissier.

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Posted on 6th janvier 2011 by Cremilde in Comptes-Rendus

Janvier. Une fois éteinte l’étoile Spica, partis les Rois Mages et l’enfant de Marie venant d’être circoncis, quoi de 9 ? Le 9, il nous restaient des débris de la galette et qui dit galette dit fève. Et bien, au Café des Phares la légumineuse potagère était assez indigeste ; elle remonterait au XIXème siècle sous forme d’une impérieuse invective : « Celui qui aime l’Humanité n’aime pas les Hommes », indûment attribuée à Dostoïevski, mais l’animateur, Gérard Tissier, l’a prise sous son bonnet pour en faire le sujet de notre débat.

Ce n’était pas crédible, en raison de l’incohérence, l’humanité n’étant rien d’autre que l’ensemble des Hommes, des êtres humains qu’entre autres, il est vrai, le rire caractérise. Ainsi, les rois, qui n’étaient pas encore bien loin, se sont retournés sur la bosse de leur chameaux, puis, frappant avec l’index sur la tempe, ont poursuivi leur voyage rigolant et se disant qu’il devait s’agir d’une dispute oiseuse, basée sur la parricide lubie des « Frères Karamazov » portant à croire que le Divin se serait trompé sur la nature humaine, rendant du coup abominables les Hommes qui auraient la velléité d’aimer l’humanité, ainsi que la liberté, et jouiraient même d’un plus grand bonheur sans elle, alors que le russe insistait sur un espoir de rédemption pour eux.

Enfin. Dostoïevski ayant réellement avoué : « Plus j’aime l’humanité en général, moins j’aime les gens en particulier, comme individus », ce qui est bien différent de l’objet sur lequel nous nous sommes attardés, je suis porté à croire que le but de l’opération était de parler de la marotte de quelques-uns, l’AMOUR, fut-il maternel, tout le monde chantant qu’il en « a deux », et « avec lequel on ne badine pas », puisque l’on a évoqué d’entrée de jeu « le contact charnel par rapport à un lien abstrait » et même « la haine qui nous excite elle aussi, l’Homme n’étant qu’un prédateur parmi d’autres ».

Or, l’intéressant aurait été plutôt le décorticage, comme fait, idéal et idée, du concept d’Humanité (en opposition à celui d’animalité ainsi que d’inhumanité), dans ses dimensions biologiques, morales et métaphysiques allant du « sapiens-sapiens » jusqu’aux humains encore à venir, en conformité avec le plan pré déterminé de la nature et de l’espèce accomplie, voire parfaite, « non bis in idem » (pas deux fois la même chose).

Mais point du tout. Et nous voilà donc partis sur l’Amour. Lequel ? « Eros » ? La concupiscence ? Non. Celui-là est celui dont Socrate se disait être grand connaisseur. « Agapè » ? L’amour oblatif ? Non. Celui-là est celui du Christ pour son Père. « Philia » ?  Apprendre aux parvenus comment se tenir dans la vie » (Cioran), alors que « le souverain bien » est l’expression du désir de l’ensemble des humains, abstraction faite de toute appartenance religieuse, politique ou idéologique ? Va savoir, si l’on part du principe que « l’amour est déterminé par un certain choix » et que « l’Humanité est un risque » en acte pour les Hommes…

Et pourtant, il semblerait d’après des gens sensés que, comme il se passe avec un arbre tout simplement, l’avenir de l’Humanité repose sur l’intelligence collective qui s’accroît de façon exponentielle au profit du QI des individus. Or, le côté tragique du verdict en exergue attribué à Dostoïevski inverserait la problématique, négligeant une réflexion sur « les gens en général ou en particulier » au bénéfice d’une prosaïque question d’aaaamour qui a finalement transformé notre débat en un saugrenu remue-méninges.

Un arbre, pris pour juge dans la fable de La Fontaine « L’homme et la couleuvre », s’en sort avec la remarque suivante : « Si quelqu’un desserre les dents, c’est un sot, j’en conviens mais, que faut-il faire ? Parler de loin ou bien se taire. »

Carlos Gravito

Débat du 26 décembre 2010 : « Philosophie et Poésie » débat animé par Christiane.

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Posted on 22nd décembre 2010 by Cremilde in Comptes-Rendus

En ruminant le thème « Philosophie et poésie » bien après son heure, animé par Christiane – à la fois attentive, modeste – elle intervient moins que nous, les autres animateurs – et pertinente, où il était beaucoup question de la différence entre philosophie et poésie, j’ai trouvé la métaphore suivante, empruntée en l’élargissant un peu, à Hölderlin : La poésie va vers la source du fleuve de la Vie, de l’Histoire, de l’aventure humaine, là où les formes symboliques et avant tout le langage naissent – Soulages le pratique en matière de peinture, je ne connais pas assez l’univers de la musique – tandis que la philosophie se porte plutôt vers son embouchure, vers la totalisation (ouverte et finalisée) de ce Fleuve.

Hölderlin a fortement inspiré le dernier Heidegger : « L’origine est devant nous », d’où son intérêt « philosophique » pour la poésie. Hölderlin nous a en effet averti qu’un fleuve ne coule pas seulement vers sa source mais aussi vers la mer.

Heidegger : « Poésie et philosophie sont comme deux sommets qui se touchent presque ».

Dommage que ceux qui considéraient poésie et philosophie comme contradictoires, voire incompatibles, n’ont osé intervenir, s’opposer à la majorité de ceux qui s’exprimaient ce dimanche là, que peu de temps avant la fin.

La conception plutôt scientifique se défend, elle ne lâche d’ailleurs plus les philosophes depuis la fameuse « révolution socratique » (300 ans avant J.C.), véritable coupure épistémologique qui nous aurait fait passer du mythos au Logos, d’une poésophie à une logosophie.

La confrontation, un peu tronquée faute de combattants, a simplement continué le lendemain de Noël 2010 aux Phares…

Gunter

Débat du 2 janvier 2011 : « Le village global est-il supportable ? » animé par Daniel Ramirez.

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Posted on 22nd décembre 2010 by Cremilde in Comptes-Rendus

L’année 2011 venait à peine de naître, au Café des Phares il était dix heures trente du 2 Janvier, en Nouvelle Zélande on roupillait déjà dans la nuit du lendemain ; c’est dire combien est vaste notre planète. Alors, la taxer de petit trou, minuscule patelin ou bled insignifiant (des lieux, certes isolés et pauvres en ressources mais charmants et pleins de vie), a semé le doute dans le crâne des participants au débat du dimanche qui, ayant fini par se demander « Le ‘village global’ est-il supportable ? », amena l’animateur, Daniel Ramirez, a accueillir la suggestion, afin que l’on y vît plus clair.

En effet, le village en question ne se trouvant pas au Club Méditerrané, nous avons vite compris qu’il s’agissait d’un autre, composé de plus de 400 régions différentes du globe mais, si en raison de cela on le considérait insupportable, il valait mieux faire les niais parce que le hameau riquiqui qui avait été pris pour unité de mesure se limite au mieux à trois ou quatre maisons. L’autre, l’« insupportable », ne tient pas compte des distances, moteur du dialogue et des nouveaux paradigmes où se trouvent la différence ainsi que l’originalité, afin de témoigner plutôt d’une singulière efficacité concrète, amorce de l’étonnante fécondité de la pensée. Il ne s’apparente donc pas à un simple village, n’en déplaise à McLuhan, celui du Medium et du Message ; c’est une immense Babylone, une mégapole à l’échelle de la Terre, polyglotte, cupide, émaillée de zones d’atterrissage, traversée par des autoroutes ou voies ferrées, et où, insaisissable, l’argent défile à la vitesse du son sur les écrans des Traders, pour aller se diluer dans des éthérés paradis, aussi fiscaux soient-ils. 

En somme, la question portait par conséquent sur un monde d’Hommes, une totalité que l’Histoire a dessinée à partir de la « koinè » grecque, qui a suivi la « route de la soie », « les mers jamais auparavant naviguées », « l’âge des lumières » et « la révolution industrielle », jusqu’au chaos de la fin du siècle passé et la ruine définitive de certains Etats ! Peut-on qualifier de « village », fut-il « global » de surcroît, un univers dont l’intelligence intrinsèque nous chasse ? Si l’on considère en outre la diversité culturelle, qui inclut les courants religieux et philosophiques, d’un « village » d’environ six milliards d’individus parmi lesquels des centaines de milliers sont des migrants affamés… (migrants vers où ?, est-on, dans de telles circonstances, en droit de savoir), d’autres étant des touristes qui se déplacent de pays opulent en riche nation, toujours dans ce même « Village Global » qui par définition n’a pas d’Ailleurs, on se demande où est la Ville, le Chef Lieu, avec ses édifices administratifs, ses monuments aux morts, ses cinémas, ses bordels ?

Pourtant, il y avait parmi nous des participants prêts à dire que l’on pouvait, dans ce coquet « Village Global », type Phalanstère, améliorer l’ordinaire « en mettant nos intérêts en commun », mais je n’y crois pas. Même dans un « Village Restreint », perdu dans les sentiers du « Village Global », ça ne marche pas… On a tout essayé, les idées les plus généreuses comme les plus saugrenues. Le fait est que l’inégalité des revenus et des naissances, l’avidité, la jalousie, les mesquineries et autres étroitesses d’esprit liées à notre égoïsme ou à notre perfidie, scellent nos destins de la même manière que le tic-tac des comptes à rebours celés dans les entrailles des armes nucléaires de je ne sais plus quel Village Global. 

Je perdais le nord ; à quoi nous sert une masse grise si le « cœur » n’y est pas ?

« Ne pense plus à ça », me disait mon père lorsque je lui parlais de conneries de ce genre. « Village Global ou pas, le monde dépendra de tes rêves. Va te coucher ! »

Il n’avait pas tord. Une fois que l’on a bien dormi sur nos deux oreilles on est soulagé de toutes ces sornettes et on se rend compte que le monde n’est pas un lieu, un village, mais le temps d’une vie.

Carlos Gravito

Débat du 19 décembre 2010: « Dieu est-il soluble dans l’Univers ? » animé par Daniel Ramirez.

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Posted on 13th décembre 2010 by Cremilde in Comptes-Rendus

Ayant, à l’approche des événements les plus emblématiques de l’année, noyé dans l’alcool mes inquiétudes métaphysiques, bravant l’inclémence du ciel, je me suis rendu le 19 Décembre au Café des Phares où, sous la houlette de Daniel Ramirez, l’on se demandait : « Dieu est-il soluble dans l’univers ? », comme si l’univers était de l’eau bénite ou un solvant capable de se charger d’autres substances plus subtiles, en l’occurrence Dieu.

Ceux qui ont fait de la chimie connaissent la procédure, c’est-à-dire, qu’une fois la tâche achevée, les solvants sont incinérés ou recyclés, à moins de s’évaporer tout simplement restituant les matières inaltérées, le retour du divin dans notre cas. Or, si l’on est dans la négation d’un Créateur, il est absurde de vouloir juger de ses qualités par celle des créatures et, dans cet ordre d’idées, parler de « concept » à son propos revient à la formulation d’un discours qui se charge d’un sens où quelque chose est révélé, certes, mais c’est le vide.

L’agnostique étant le plus fervent des croyants, comme si l’on avait pété le joint de culasse de l’entendement, à force de « Constantes de Planck », de « Quanta » ou de « Relativité Générale » due à Einstein,  nous avançâmes de tautologies en lapalissades, d’apories en contradictions, suivant un raisonnement indéterminé fait de la simple répétition des mêmes propositions jusqu’au néant, de mode à aliéner tout jugement, attitude présomptueuse de celui qui croit pouvoir décrypter le discours cosmique, un langage distinct du nôtre, ou la grammaire de l’Auteur qui se garde bien de se saborder dans son œuvre : « aion », l’acte pur de l’être, l’éternité ou le temps substance, la durée sans détermination chronologique, dont un dérivé est « aidios », l’éternel, la force vitale sans restriction, selon Benveniste.

 Ainsi, qu’il s’agisse d’« Elohim », « Dieu » ou « Allah », les trois religions monothéistes dites du Livre donnèrent lieu à des obédiences diverses dans un système immanent de croyances, accordant un nom à cet innomé qui, bénéficiant de tous les attributs magnifiants : puissance, omniscience, éternité, bonté, désigne l’Etre transcendant créateur « ex nihilo » de l’univers et de l’existence des Hommes, la Théologie (qui se distingue de la Philosophie par la singularité de sa gymnastique dialectique) interprétant de manière rationnelle leurs rapports à la Foi, à la Révélation et aux Dogmes élaborés par les Eglises en rapport avec l’Ecriture, la Tradition, la Grâce, l’Eschatologie et la Raison, sans la prétention de décrire la structure physique de l’univers ou de s’y insérer, sauf à appeler au respect de la Création.

En ce qui me concerne, je me suis dit que si Dieu était dissous dans l’univers, il n’y avait plus personne là haut et, m’accrochant à quelque chose prélevé dans le « Livre de l’Intranquillité » de Bernardo Soares (Fernando Pessoa) : « Il y en a qui trahissent leurs rêves, d’autres n’ont pas de rêves et les trahissent tout autant », certain que sans rêver un monde meilleur on ne peut pas révéler celui-ci, fini le débat, je me suis accoudé au bar décidé à me charger de la prochaine tournée, fut-elle un déluge, lorsque, verre à la main, un retardataire retenu par l’abondante neige, s’adressa à un autre consommateur déjà assez imbibé, lui lançant :

- Dis, donc ! Qu’est-ce qu’ils racontaient ? Dieu s’est-il dissous dans l’univers ?

- Penses-tu ! Il l’a ingurgité cul sec !

Carlos Gravito

Débat du 12 décembre 2010 : « Pourquoi fait-on des enfants ? » animé par Gérard TISSIER.

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Posted on 8th décembre 2010 by Cremilde in Comptes-Rendus

Grand était mon étonnement dimanche dernier aux Phares (« Pour/quoi fait-on des enfants ? ») lorsque j’y ai entendu affirmer haut et fort : « Ici, je ne veux pas de témoignage de vécus !».

A ce sujet, je voudrais citer deux textes, le premier étant la critique d’un livre qui vient de sortir, « La traversée des catastrophes » (Philosophie pour le meilleur et pour le pire) de Pierre Zaoui. : « Une nouvelle génération de philosophes se lève, qui ne recule devant rien. Les femmes et les hommes qui lui donnent souffle partagent la même conviction : la pensée ne vaut pas une heure de peine quand elle néglige l’expérience vivante des hommes. Toute l’expérience, pour le meilleur et pour le pire – le miel et la boue, la joie comme les larmes, les lendemains qui chantent mais aussi les petits matins glauques. […]  Telle est la vieille leçon du « Parmenide » de Platon, qui exhortait le philosophe à unir théorie et pratique, spéculation et éthique, afin de bâtir une métaphysique  « du poil, de la boue et de la crasse ». (Pierre Birnbaum in « Le Monde des livres »  daté du 29 oct. dernier).

Il faudrait, peut-être, corriger ce diagnostic d’une nouvelle génération de philosophes, en remarquant que depuis toujours la philosophie s’est méfiée comme de la peste de l’abstraction et qu’elle vise depuis toujours à réunir la Vie et le Concept en mettant tantôt l’accent davantage sur l’un et tantôt sur l’autre.

La philosophie, pour Hegel, par exemple, vise l’universel concret, autrement dit, à éviter deux écueils, celui d’une pensée enfoncée – et donc aveugle – dans la pratique, d’une part, et d’une autre se perdant dans le ciel des Idées exsangues, d’autre part. N’est-ce pas une fausse ou plutôt trop simpliste interprétation de Platon et du platonisme qui oppose traditionnellement un Aristote réaliste à un Platon idéaliste (cf. le fameux tableau dont j’ai oublié l’auteur et qui montre Aristote pointant vers le sol et Platon montrant le ciel) ? Et en paraphrasant Kant on peut ajouter qu’un concept sans expérience serait vide et une expérience sans concept aveugle.

Le deuxième texte traite de la philosophie de Pierre Hadot :

« Et c’est ce qui permet de faire le départ entre une philosophie sans réel enjeu existentiel, car elle n’ambitionne que de créer des concepts, et une philosophie s’efforçant à l’autonomie, au sens où elle se veut expérience totale, de vie et de pensée. C’est ainsi que l’on peut comprendre ce phénomène remarquable bien souligné par Pierre Hadot, consistant dans la résurgence périodique […] d’une compréhension de la philosophie comme discipline vécue, impliquant une démarche de transformation intérieure totale du sujet philosophant. Et ce sont Montaigne, Descartes, Pascal, Kant, Goethe, Schopenhauer, Nietzsche, Thoreau, Wittgenstein, Merleau-Ponty entre autres, qui constituent autant de phares de la modernité » (in « Pierre Hadot, l’enseignement des antiques, l’enseignement des modernes «  sous la direction d’Arnold I. Davidson et Frédéric Worms, Editions Rue d’Ulm, 2010, p. 44).

Je soutiens que toute véritable philosophie ne peut se soustraire à la tâche d’articuler le Concept avec la Vie, selon des proportions et lignes de force, certes, à chaque fois différentes.

Comme le recours à l’expérience, particulièrement important à mon avis pour le sujet du jour (« Pour/quoi fait-on des enfants ?) avait été étouffé dans l’œuf, les échanges portaient surtout sur des considérations abstraites, sociologiques, économiques, historiques et ethnologiques…

Gunter Gorhan

Débat du 5 décembre 2010 : « Je pense, donc je nuis » animé par Sylvie Pétin.

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Posted on 30th novembre 2010 by Cremilde in Comptes-Rendus

Malgré le froid, engoncé dans mes cogitations en guise de pardessus, je me suis adressé le 5 Décembre au Café des Phares, où Sylvie Pétin, chargée de conduire l’habituelle séance à caractère philosophique, a choisi comme sujet « Je pense, donc je nuis ». Autrement dit, « Je nuis parce que je pense », ce qui n’est pas bon pour la pensée, ni pour la logique, ni pour le Cogito Cartésien, mais avait l’air d’exciter la meneuse du débat.

Essayant alors de faire le grand écart entre Descartes et Rousseau, l’animatrice n’a pas pu se relever et, malgré ses appuis sur Protagoras, Spinoza, Kant, Hannah Arendt, ou même l’Ane de Buridan, elle a été incapable de se départir d’une flagrante mauvaise foi qui l’a amenée à légitimer les malfaisances de chacun à l’aide de l’évidence intuitive du fondement de la conscience de soi, une valeur ontologique exprimée par le « Je pense, donc je suis ». Braquée dans une attitude dénaturée qui consistait à rapprocher l’éventuelle posture malsaine d’un Homme à celle d’un animal dangereux, de concert avec l’illustre assistance, elle prétendit en somme que le premier serait dépravé en raison de son privilège de penser ; faisant feu de tout bois, elle a essayé de prouver par A plus B qu’une telle prédisposition à nuire avait des liens avec ses capacités de réflexion,  à l’origine également du Mal absolu dans la civilisation occidentale, alors qu’un être humain normalement constitué ne nuit que s’il ne pense pas. Y a-t-elle pensé ?

 

Carlos Gravito

Débat du 28 décembre 2010 : « Le sens des mots » animé par Alexandra Ahuandjinou.

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Posted on 26th novembre 2010 by Cremilde in Comptes-Rendus

Au lendemain d’une sévère défaite de 59 à 16 essuyée par le XV de France face à l’Australie et qualifiée « d’insensée » par la presse, le 28 Novembre, à l’heure convenue j’étais au Café des Phares pour assister au débat dominical animé par Alexandra Ahuandjinou dont le sujet, de circonstance, était « Quel est le sens des mots ? »

Comme s’il s’agissait d’un schmilblick à faire progresser, ou tel si, pour ouvrir une porte sur laquelle est marqué « tirer » il fallait se demander longuement où est le tire-bouchon, sinon le lexique, nous étions sensés aller « nous entretenir du langage, objet du sens des mots et réfléchir sur cette faculté des Hommes de se parler » mais, comme il fut objecté que « le dictionnaire pouvait bien nous aider dans la recherche du sens, l’ennui étant qu’il le fait à l’aide d’autres mots et que, dans ces conditions, l’on pouvait tourner en rond pendant longtemps ». Il a été avancé alors que « les mots n’ont pas de sens mais qu’ils le prennent dans le langage de façon passionnelle » mais, une question étant posée : « Trouvons-nous les mots, parce que nous les pensons au fur et à mesure, ou pensons-nous avec les mots disponibles de notre fabrication ? », selon l’habitude, on se fraya un chemin à travers champs, l’un disant « que les mots sont ce que nous faisons et pas ce que nous disons », d’autres que « ‘papa’ a bien un sens », « comme l’a aussi une note de musique » et « que, comme la vie, ils naissent, vieillissent et meurent », pour « être revitalisés par le poète », car « le mot nomme les choses mais n’en est pas une ».

Enfin. Le bon sens nous poursuivait mais nous étions plus rapides, engagés devant lui dans un discours doloriste. Pourtant la limpidité des mots était parfaite, au point d’être notre seul outil d’échange, mais dans ce qui va de soi se glissent souvent des tas d’interrogations sans fin, oubliant que, parfois, il suffit de dire la même chose d’une autre façon pour que tout se débloque, car c’est très simple : comme l’index indique, les mots montrent ce qui va sans dire, cependant ce qui est, tient de ce que l’on dit et là, ça se complique. Une chose est sûre : tout le monde sait que les mots, visibles dans nos livres et taillés souvent dans la pierre, sont des unités linguistiques signifiantes définies à l’aide d’autres termes équivalents, inventés au fur et à mesure, et leur sens est de faire partie du discours, formant ainsi le socle de nos connaissances élémentaires. Ce qui reste d’indéfinissable ce sont les individus qui nous entourent et nous-mêmes ; se connaître soi-même, sauf par ses propres rêves, c’est une mission impossible car l’âme refuse le corps. Elle ne tremble pas, ne rit pas, ne travaille pas, ne baise pas et se passe de boire.

Alors. Sachant donc qu’un mot peut avoir plusieurs sens, (le propre et le figuré) et deux mots différents sont susceptibles d’avoir le même, auquel cas ils sont synonymes, il n’y a pas de raison pour s’en faire une jaunisse. Si l’on cherche ses mots, c’est parce qu’ils ne se trouvent pas forcément au bout de la langue ; du latin « muttum », ils sont des grognements. Le fait est que, n’obtenant pas de satisfaction, du Sens, une idée générale qui n’offre pas de mystère, nous sommes passés à la Signification, partant de l’étrangeté de « la tête en sandwich », une simple hyperbole, au fond ; une figure de style référenciée dans les abrégés de rhétorique qui entérinent l’emploi de la substance verbale.

Résumant. Bien qu’un nébuleux recensement de ce que nous ignorons suffirait à nous pourvoir du bon sens nécessaire pour traîner dans le terrain vague de la pensée, tel un parfum, la philosophie est un liniment (mot dont l’acception est : « substance médicamenteuse pour frictions sensibles »), obtenu à partir d’un langage spécifique et rien de plus, le but étant de persuader l’autre sans se faire niquer par lui, et notre performance « logos » hebdomadaire ressembla à un gilet de sauvetage pour « l’éthos », même si l’animatrice, qui de toute évidence avait très bien préparé son cours, a fait la classe de main de maître.

Pour terminer et bien établir la distinction entre les Mots et les Choses, je tiens à vous rappeler le poème fort connu de l’Abbé de l’Attaignant qui finit par « Madame, passez-moi le mot et je vous passerai la chose ».

Carlos Gravito

Débat du 21 novembre 2010 : « Peut-on être sans le verbe avoir? » animé par Daniel Ramirez.

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Posted on 15th novembre 2010 by Cremilde in Comptes-Rendus

Débat du 14 novembre 2010 : « Peut-on s’empêcher de généraliser ? » animé par Gérard Tissier.

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Posted on 10th novembre 2010 by Cremilde in Comptes-Rendus