Débat du 12 février 2012: « Le suicide: un acte de courage ou de lâcheté ? », animé par Antoine Spire.

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Posted on 13th février 2012 by Carlos in Comptes-Rendus

De bain de sang en bains de sang, sous les yeux des « Humain Rights » et des pluies de rockets ou d’obus de mortiers, le régime du clan al-Assad sombrait dans une infâme sauvagerie. Prônant l’inconvertibilité des civilisations et soutenu par la Chine et la Russie, c’est au nom d’une barbare poltronnerie que les dirigeants Syriens faisant du Printemps Arabe un lugubre Hiver, aussi atroce que froid, échauffé le jour par une pâlotte naine jaune perdue au milieu des milliards d’étoiles de la Voie lactée, et éclairé la nuit par une lune gibbeuse à faire hurler les loups. Malgré tout, la raison vacillante mais faisant de l’infortune bon cœur, le 12 février, nous sommes venus assister, au Café des Phares®, à un débat animé par Antoine Spire, qui nous soumettait à la question : « Le suicide, acte de courage ou de lâcheté ? », à propos de la Journée Nationale de Prévention du Suicide, sur le fait de se flinguer, en somme.  

Instruits de ça, nous nous sommes appuyés sur Camus (Le Mythe de Sisyphe) « pour qui le suicide, serait une prérogative de l’Homme et son seul problème philosophique », et « la courbe des suicides suivant statiquement celle du chômage », « la vie ne valait pas en effet la peine d’être vécue », d’où « les suicides collectifs à l’image de celui de Massada, où les occupants ont résisté aux Romains jusqu’à la mort, l’année 30 avant JC », ou de certaines sectes comme celle « Du Temple Solaire dans le Vercors », le tout se justifiant par « un mal de l’infini ou par le suicide égoïste que l’on trouve chez Durkheim » et illustré par « la lettre à son fils du film de Radu Mihaileanu , ‘Va, Vis, Deviens’ ». Une fois vanté « L’encadrement juridique de l’Euthanasie assistée, en Suisse, Belgique, Hollande », on apprit que « Hermès engendra Autolycos, grand père d’Ulysse et Eurytos, l’un des argonautes, etc., preuve que l’on peut, par ses propres moyens survivre à la mort ». On a vu « l’impossible lien entre ‘réparer’ et ‘irréparable’ ». On a biglé « l’Affiche Rouge », aperçu « la Résistance » et, « sans trouver de solution, alors qu’il suffisait d’un rien », ou certainement parce que « le désespoir pathologique relève de la psychanalyse » et des « rapports sociaux qui nous constituent », nous nous sommes aperçus que l’on « essayait de moraliser (soit par lâcheté soit par courage), attitudes, certes, spécifiquement humaines, dangereuses et néfastes, mais qui parlent pourtant de notre être », sans doute une façon de nous protéger et nous permettre de vivre tout simplement». Nous avons évoqué encore la « joie de vivre prônée par Spinoza » ainsi que « le suicide comme chose des pays froids, nordiques, alors que la lumière, le soleil et la joie de vivre seraient le propre des pays chauds, épris d’amour et de religieux ». « Il faut donner un sens à la vie, autrement on est en constat d’échec », a-t-on encore entendu, « le contraire du courage étant la lâcheté, qui peut aller jusqu’au règlement de comptes ». Bien sûr, « tous les suicides ne se valent pas, et il vaudrait mieux accepter la mort lorsqu’elle surgit ». « La survie est individuelle, pas collective », ainsi que « le Droit au suicide » ; « tout le monde a, à un moment ou à un autre, pensé à mourir ; d’aller au suicide ou de ne rien faire contre. « Courage ou lâcheté, ajouta Monsieur Spire, ce n’est pas le problème, si nous abordons philosophiquement ce sentiment, 100% déterminé mais entièrement libre, comme l’acte suicidaire l’est ». On n’en a pas le droit, mais il l’a en raison du Libre Arbitre, l’aspect le plus déterminé des choses. « Est-on libre si l’on est bourrés de drogues ?, demanda quelqu’un, alors qu’il s’agit là souvent « d’un Appel au Secours » et que la pire des choses, c’est de dire, « ça ne sert à rien », tout en s’intéressant à l’art, aux artistes et à leurs échecs, bien que l’espoir en l’avenir passe par les autres, leurs visages, leur port, leur grâce, l’objectif de la Philo étant de, entièrement déterminée et entièrement libre, nous faire penser. « La vie ne sert à rien, mais chacun sert la vie, le suicide étant le refus de la servir (de la servir et de s’en servir) », ajouta quelqu’un, en face de moi, et Gilles fit enfin entendre dans l’un de ses vers : «  suicide vécu, suicide vaincu ; la plénitude attitude ».

Finalement, voulant décider, au cours de notre digression philosophique, si le suicide est un choix courageux ou lâche, il me semble, quoi qu’il en soit, que l’acte en question n’est pas libre, même s’il peut se charger le cas échéant d’un certain cran, et même d’un réel lyrisme, sitôt qu’envisagé à l’image de l’Ouroboros, le serpent qui se mort la queue représentant ainsi le cycle perpétuel de la nature, une idée de mouvement autofécondateur, d’éternel retour et, dès lors, du paradoxe antinomique. En effet, le suicidaire va vers son acte, conduit par la douleur, et c’est toujours à regret qu’il s’agresse lui-même ou se passe au cou la cravate de chanvre. Et pourtant… son acte peut s’avérer fécond. D’après la légende concernant cette fatale option, en raison d’une érection post mortelle qui se produit chez le pendu, au pied du gibet va surgir une plante magique, la mandragore, à laquelle on attribue en général des vertus aphrodisiaques.

Tout prosaïquement, cette impasse interne peut en effet donner lieu à l’illusion d’une toute puissance capable de soulager ses propres souffrances ou humiliations, résultant du dopage généralisé dans un monde d’« haktivistes », de « mèmes Internet » obsédés par le triomphe facile, voire de cerveaux échangeables, attirés par les projecteurs de la renommé, au prix d’une inexorable déchéance à terme. Ne sont-ils pas des suicidés, « à l’insu de leur plein gré » ?

Quant à moi, j’ai noyé mes pulsions suicidaires dans l’alcool. Peine perdue ! Las, entre-temps, elles ont appris à nager. 

Carlos