Débat du 26 février 2012: « Peut-on vivre dans le présent ? », animé par Michel Turini.

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Posted on 27th février 2012 by Carlos in Comptes-Rendus

Alors que, divisés par leurs intérêts respectifs, les cinq patrons de l’ONU faisaient preuve d’impuissance à contenir les violations des Droits de l’Homme commises en Syrie par Bachar Al-Assad qui, guidant la main criminelle de ses sbires notamment à Homs, multiplie l’assassinat de ses opposants même en milieu hospitalier, où l’on soumet les cadavres ou simples blessés à des infâmes vols d’organes, au surlendemain de la 37ème cérémonie d’attribution des Césars, en attendant celle des Oscars, à Paris, les habitués du Café des Phares® remplissaient le 26 février 012  ce lieu public où, par la substance de leur pensée en échange d’une légère consommation, ils avaient l’intention d’alimenter la controverse soumise à discussion,  « Peut-on vivre dans le présent ? », une pelote dont Michel Turini se proposa d’amorcer le déficelage, en attente de Claudine Enjalbert, prévue par la direction de l’informelle assemblée pour s’en charger.

Il s’agissait, d’après l’auteure du sujet, d’une démarche tendant à « remettre d’aplomb le moral secoué d’une de ses connaissances, l’appelant à saisir toutes les belles opportunités du ‘présent’ », ce dont elle s’était mise à douter.

Il a été convenu « alors de définir le Présent, ce qui n’était pas du goût de tout le monde, et les commentaires sur la convenance ou désavantage d’une telle position ont rempli notre temps de débat, les uns soutenant que le passé n’existe plus, d’autres qu’il n’y a pas de présent sans lui, d’autres encore que le présent n’est qu’une passerelle entre le passé et l’avenir, alors que scientifiquement il paraissait que la constante de Planck arrive à quelque chose autour de trois secondes, bien qu’à vrai dire, il tire sa sève d’époques antérieures. La durée peut nous faire oublier le temps de jadis, aussi bien que nous aider à mieux vivre le moment actuel. S’il n’a pas de futur, le présent n’a pas de sens, de même que séparé de ce qui l’a précédé, et le seul moment déconnecté des deux serait l’orgasme, alors que d’aucuns y voient la musique, mobilisatrice du corps, ou les rythmes lancinants de films tels que « L’Homme sans passé » de Aki Kaurismaki, sinon l’Eternité, moment où, comme dans un orgasme (bis), on s’oublie car, comme dit Freud, quelque chose lâche et on se délasse, voire, on entre en extase, quoique cela exige « d’être-là », ce qui, bien que possible, n’est pas facile, aujourd’hui, parce qu’il nous faut le temps d’atterrir. Surpris par le manque de fenêtres dans l’établissement, quelqu’un a rapporta que vivre n’est pas être dans le présent, suivi d’une interlocutrice qui, étonnée que l’on fasse du sujet une question morale, entendait que c’est aussi bien le présent que le passé et le futur qui font de nous des humains à armer pour l’avenir, tandis que l’intervenant suivant pensait que c’était trop de bruit pour rien car, rappela un autre, nous sommes ancrés dans l’actuel, et la priorité est de survivre, le présent étant le seul moment où nous sommes maîtres de l’action. Après un énième rappel de l’orgasme, il a été fait mention de ce qui se passe en Grèce, en Belgique, etc. pour revenir à Mai 68, au « temps suspend ton vol », et retourner « au présent en tant que pas pensable car il ne peut pas se rembobiner comme la pellicule d’un film », jugeant que « le futur n’a pas de comptes à rendre », et « qu’il n’y a pas eu de ‘feedback’ ». Gilles a finalement bouclé la séance rappelant que « …dans ses ouvrages, René Char est présent, et hors du temps. »    

Alors ? « Peut-on vivre dans le présent ? » Pour faire vite, avant que le passé ne se pointe, chargé de nostalgies, ou que, habillé de nuit, le futur ne décode mes rêves les plus fous, je dirais : « on ne fait que ça, vivre dans le présent ». Contrairement à la térébrante rivelaine du langage conventionnel, universellement admise et philosophiquement supposée, le Temps n’a pas de trajectoire comme une flèche et ne s’écoule pas tel un fleuve. Dès lors, quelle serait la consistance, l’épaisseur ou la durée du « Présent », ainsi que la signification existentielle d’un  instant si fugitif où le futur s’engouffre dans le passé, sachant que, sans Passé, sans Présent et sans Futur, le Temps est un absolu inerte dont le seul rôle dans notre existence est celui de présider à la cohérence et à l’enchaînement des phénomènes ?

N’ayant pas d’existence physique, le Temps dépend de ce que l’on en attend, et si nous considérons qu’il enveloppe tout ou que rien n’existe en dehors de lui, cela n’équivaut pas à une théorie du monde mais à une saisie de l’univers, qui le rend pensable. C’est ainsi qu’il a été divisé en « Chronos », temps accident (les heures), « Kkairos » temps prédicat (l’immédiat), « Aion », temps substance (éternité), et la plus petite unité de l’Expérience, le train-train de l’« Hic et Nunc » (Ici et Maintenant ), « le Présent », en somme, fonda le moment fugitif où le Passé, ayant cessé d’être, s’arrime à ce qui persiste pour se précipiter dans le Futur, qui n’est pas encore, occasion singulière que la conscience saisit comme un tout à posséder, afin de rompre avec les habitudes et préserver le dynamisme du sujet.

 « Ici et maintenant », fut dès lors la posture adoptée en 1966 par le Mouvement Etudiant de Strasbourg au travers de leur pamphlet politique « De la Misère en Milieu Etudiant », et l’Instant, célébré par l’Internationale Situationniste (issue de l’Internationale Lettriste et du Bauhaus) s’appliqua de même à la critique de la Société du Spectacle lors des Evénements de Mai 68, univers du Tout et Rien qui remettait en cause l’Ordre Social passé.

Versatiles, nous avons le sentiment, selon les occasions, de manquer de temps ou de le trouver long, alors que, sans y penser, l’écoulement de la durée ne peut laisser au Présent que trois secondes, moment que nous considérons immédiat et que la conscience saisit comme un tout. Sans réalité propre, entre ce qui a été et ce qui adviendra, le vécu du Présent correspond, tel que le rappelle Ernst Pöppel, au temps d’une gorgée, d’un serrer de main ou d’un clin d’œil. Hélas, au-delà d’un certain seuil, la sénescence s’installe inexorablement dans l’Homme, alors que son cerveau réclame toujours et sans cesse de nouvelles expériences dans un éternel présent. C’est ce facétieux jeu de cache-cache temporel, à peine plus long qu’un battement de cils, qui amena Saint Augustin à proférer son fameux : « Si personne ne me demande ce qu’est le temps, je sais ce que c’est. Mais si quelqu’un me le demande, là je ne sais plus. »

Carlos

Le débat du 19 février 2012 : « Le contraire de la vérité n’est pas le mensonge, mais la conviction » (Nietzsche, a-t-il été affirmé), animé par Nadia Guemidi.

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Posted on 20th février 2012 by Gunter in Comptes-Rendus

Café-philos ayant lieu au « Le Métro » et à la brasserie « La Contrescarpe ».

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Posted on 14th février 2012 by Cremilde in Informations |Manisfestations - Abécédaire

TOUS LES LUNDIS A 18 HEURES:

CAFE-PHILO A LA BRASSERIE « LE METRO », PLACE MAUBERT MUTUALITE, METRO MAUBERT MUTUALITE, ANIME PAR LILIANE COHEN ET DENISE BESNARD.

TOUS LES MARDIS A 18H30:

CAFE-PHILO A LA BRASSERIE « LA CONTRESCARPE », PLACE DE LA CONTRESCARPE, METRO « PLACE MONGE » OU « CARDINAL LEMOINE », ANIME PAR MARIAN SZNIDER, ARMELLE LETHOMAS ET MICHEL TURRINI.

Débat du 12 février 2012: « Le suicide: un acte de courage ou de lâcheté ? », animé par Antoine Spire.

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Posted on 13th février 2012 by Carlos in Comptes-Rendus

De bain de sang en bains de sang, sous les yeux des « Humain Rights » et des pluies de rockets ou d’obus de mortiers, le régime du clan al-Assad sombrait dans une infâme sauvagerie. Prônant l’inconvertibilité des civilisations et soutenu par la Chine et la Russie, c’est au nom d’une barbare poltronnerie que les dirigeants Syriens faisant du Printemps Arabe un lugubre Hiver, aussi atroce que froid, échauffé le jour par une pâlotte naine jaune perdue au milieu des milliards d’étoiles de la Voie lactée, et éclairé la nuit par une lune gibbeuse à faire hurler les loups. Malgré tout, la raison vacillante mais faisant de l’infortune bon cœur, le 12 février, nous sommes venus assister, au Café des Phares®, à un débat animé par Antoine Spire, qui nous soumettait à la question : « Le suicide, acte de courage ou de lâcheté ? », à propos de la Journée Nationale de Prévention du Suicide, sur le fait de se flinguer, en somme.  

Instruits de ça, nous nous sommes appuyés sur Camus (Le Mythe de Sisyphe) « pour qui le suicide, serait une prérogative de l’Homme et son seul problème philosophique », et « la courbe des suicides suivant statiquement celle du chômage », « la vie ne valait pas en effet la peine d’être vécue », d’où « les suicides collectifs à l’image de celui de Massada, où les occupants ont résisté aux Romains jusqu’à la mort, l’année 30 avant JC », ou de certaines sectes comme celle « Du Temple Solaire dans le Vercors », le tout se justifiant par « un mal de l’infini ou par le suicide égoïste que l’on trouve chez Durkheim » et illustré par « la lettre à son fils du film de Radu Mihaileanu , ‘Va, Vis, Deviens’ ». Une fois vanté « L’encadrement juridique de l’Euthanasie assistée, en Suisse, Belgique, Hollande », on apprit que « Hermès engendra Autolycos, grand père d’Ulysse et Eurytos, l’un des argonautes, etc., preuve que l’on peut, par ses propres moyens survivre à la mort ». On a vu « l’impossible lien entre ‘réparer’ et ‘irréparable’ ». On a biglé « l’Affiche Rouge », aperçu « la Résistance » et, « sans trouver de solution, alors qu’il suffisait d’un rien », ou certainement parce que « le désespoir pathologique relève de la psychanalyse » et des « rapports sociaux qui nous constituent », nous nous sommes aperçus que l’on « essayait de moraliser (soit par lâcheté soit par courage), attitudes, certes, spécifiquement humaines, dangereuses et néfastes, mais qui parlent pourtant de notre être », sans doute une façon de nous protéger et nous permettre de vivre tout simplement». Nous avons évoqué encore la « joie de vivre prônée par Spinoza » ainsi que « le suicide comme chose des pays froids, nordiques, alors que la lumière, le soleil et la joie de vivre seraient le propre des pays chauds, épris d’amour et de religieux ». « Il faut donner un sens à la vie, autrement on est en constat d’échec », a-t-on encore entendu, « le contraire du courage étant la lâcheté, qui peut aller jusqu’au règlement de comptes ». Bien sûr, « tous les suicides ne se valent pas, et il vaudrait mieux accepter la mort lorsqu’elle surgit ». « La survie est individuelle, pas collective », ainsi que « le Droit au suicide » ; « tout le monde a, à un moment ou à un autre, pensé à mourir ; d’aller au suicide ou de ne rien faire contre. « Courage ou lâcheté, ajouta Monsieur Spire, ce n’est pas le problème, si nous abordons philosophiquement ce sentiment, 100% déterminé mais entièrement libre, comme l’acte suicidaire l’est ». On n’en a pas le droit, mais il l’a en raison du Libre Arbitre, l’aspect le plus déterminé des choses. « Est-on libre si l’on est bourrés de drogues ?, demanda quelqu’un, alors qu’il s’agit là souvent « d’un Appel au Secours » et que la pire des choses, c’est de dire, « ça ne sert à rien », tout en s’intéressant à l’art, aux artistes et à leurs échecs, bien que l’espoir en l’avenir passe par les autres, leurs visages, leur port, leur grâce, l’objectif de la Philo étant de, entièrement déterminée et entièrement libre, nous faire penser. « La vie ne sert à rien, mais chacun sert la vie, le suicide étant le refus de la servir (de la servir et de s’en servir) », ajouta quelqu’un, en face de moi, et Gilles fit enfin entendre dans l’un de ses vers : «  suicide vécu, suicide vaincu ; la plénitude attitude ».

Finalement, voulant décider, au cours de notre digression philosophique, si le suicide est un choix courageux ou lâche, il me semble, quoi qu’il en soit, que l’acte en question n’est pas libre, même s’il peut se charger le cas échéant d’un certain cran, et même d’un réel lyrisme, sitôt qu’envisagé à l’image de l’Ouroboros, le serpent qui se mort la queue représentant ainsi le cycle perpétuel de la nature, une idée de mouvement autofécondateur, d’éternel retour et, dès lors, du paradoxe antinomique. En effet, le suicidaire va vers son acte, conduit par la douleur, et c’est toujours à regret qu’il s’agresse lui-même ou se passe au cou la cravate de chanvre. Et pourtant… son acte peut s’avérer fécond. D’après la légende concernant cette fatale option, en raison d’une érection post mortelle qui se produit chez le pendu, au pied du gibet va surgir une plante magique, la mandragore, à laquelle on attribue en général des vertus aphrodisiaques.

Tout prosaïquement, cette impasse interne peut en effet donner lieu à l’illusion d’une toute puissance capable de soulager ses propres souffrances ou humiliations, résultant du dopage généralisé dans un monde d’« haktivistes », de « mèmes Internet » obsédés par le triomphe facile, voire de cerveaux échangeables, attirés par les projecteurs de la renommé, au prix d’une inexorable déchéance à terme. Ne sont-ils pas des suicidés, « à l’insu de leur plein gré » ?

Quant à moi, j’ai noyé mes pulsions suicidaires dans l’alcool. Peine perdue ! Las, entre-temps, elles ont appris à nager. 

Carlos

Débat du 5 février 2012: « Se sentir vivant… », animé par Alexandra Ahouandjinou.

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Posted on 7th février 2012 by Carlos in Comptes-Rendus

Les candidats de Mai à la Présidence de la République battaient la mesure, et l’actuel tenant du titre s’étant acquitté de son show de dimanche dernier avec une feinte sincérité alors que son challengeur se trouvait le bec enfariné au cours du meeting qu’il tenait, parce que « à la chandeleur l’hiver reprend de la vigueur », privée de sentiments, la mère nature nous picorait, elle, la chair de son bec corné et froid, enracinant parfois la mort dans les existences. Pourtant, le cœur léger ou peut-être en quête de sensations extrêmes, Alexandra Ahouandjinou se demanda le 5 février, au Café des Phares®, qu’est-ce que « Se sentir vivant… » et (dans des conditions sonores abominables qu’il faudrait régler), entreprit de nous guider dans cette quête, tel si elle retournait des crêpes ou prenait la tête d’un mouvement libérateur.

L’animatrice commença donc par faire un abrégé de la question envisagée, du genre « qui vit ?, quelle efficacité ?, qu’est-ce que ça implique ?, condition de possibilité, etc. » puis, la salle entra en scène cherchant la distinction entre « anima » et « bios » et exigeant une définition du « vivant » ou allant  jusqu’à « la libération des camps de concentration ou du Goulag », « la résistance à la mort », « la somme interagissante des parties », « le désir qui nous transporte », « l’insoutenable légèreté de l’être ( Kundera)», « le vide », « rendre la vie intense, intéressante », « à l’aide de l’art, la religion, la philo, l’amour, la politique », « sentir battre son cœur », « exister sans s’ennuyer », « vivre à 100/h », « s’arrêter un instant », « l’étincelle de démarrage », « le juste milieu », « l’être au monde », « le deuil, le trou noir, vécu près du brouhaha d’une cour d’école », « un rayon de soleil annonçant la sortie de l’hiver », « ‘bios’, le vivant et violence, c.a.d., se sentir vivant et mourant, la joie et la puissance ( sœur Emmanuelle opposée à Hitler) », « ce qui, de l’ordre de l’existentiel, nous transporte et nous transcende ». Pour finir, Gilles nous gratifia de sa poésie, exhortant l’assemblée à « Mettre un peu d’amour dans la vie ».     

« Amour dans la vie », voilà la considération qui m’a incité à examiner la chose dans un esprit zététique, et pour cause : « Rien de nouveau sous le soleil », proclame le Qohelet ou ’Ecclésiaste’ qui, évoquant le sens de la vie, claironne son corollaire, la mort de tout le monde. Puisque tel serait le lot de chaque vivant, face à cette cruelle absurdité, les Hommes n’ont imaginé, comme agrément de toute existence, que le plaisir de se sentir vivants (« carpe diem »). C’est certainement à la recherche d’autres alternatives encore que, comme il est de la connaissance de tous, la nécessité de l’« étant » a un jour forcé le pieux Descartes, fondée sur « son doute méthodologique », a remettre en selle l’« existere » de Saint Thomas et, en en déduisant de sa propre réflexion l’« existence » de celui qui pense, il a proclamé dans la foulée celle de Dieu et du monde aussi.

Tout ça, n’est pas tombé dans l’oreille d’un sourd et cette idée fut traduite plus tard par Heidegger en Da-sein (être là), concept qui est revenu comme un boomerang de nouveau en France, remplaçant chez les intellectuels le vieux mot d’« Existence ». « Se sentir vivant » va donc tellement de soi, que notre question du jour, peut-être parce qu’audacieuse, a du mal à s’asseoir. Il me semble donc absurde de problématiser se sentir sans envisager le vivant, puisque les deux termes se définissent l’un en fonction de l’autre, c’est-à-dire, que se sentir explique la condition de l’animal qui est en vie, car « l’étant se confondant avec ce qu’il est», a la transparence ontologique du « celui qui vit, vit », comme celui qui boit, a conscience de boire. 

Insistant donc sur l’assurance d’être en vie, « se sentir vivant » est en fait une assertion manifestement tautologique, exprimant finalement une émotion qui, insuffisante pour révéler l’Etre, s’empare néanmoins de lui, lors du retour d’une cérémonie funèbre, par exemple, l’être cessant alors de se raconter des histoires et prenant conscience d’Etre-là, « pour la mort ». Il a une durée psychologique qui doit sans cesse « être étée » par l’en-soi, parce que, comme le suggère Lévinas, « on n’est pas, on s’est » ; « on s’est son propre fardeau », ajoute Sartre ou, pour nous arrêter un instant chez Heidegeer, « ‘être dans le monde’ est la condition nécessaire de l’existence humaine » car, n’admettant pas le non-savoir, toute question suppose que l’on sache déjà, c’est-à-dire, puisque les deux termes se définissent, l’un en fonction de l’autre, « Se sentir vivant » ne peut pas susciter d’objection.

Finalement, est-ce la raison qui porte « l’être pour la mort » à « se sentir vivant » ? A l’aide de grands sursauts et autres remous extrêmes, ou avec le concours d’un débordement de soi ?

Dès lors, qu’est-ce que se sentir vivant ? Est-ce bouger ? Casser l’apathie ?

De quelle façon doit-on lire le sens de nous-mêmes, et où trouver les conditions de notre bien-être ? 

Dans l’essence ? Au Loto ? Dans le cannabis ? Dans l’ecstasy ? Dans le saut à l’élastique ?

Comment érailler l’inertie de la mort ? Grâce à l’euphorie ou à la liesse, lorsque l’on a fumé un joint ? L’« Etre pour la mort » aurait-il accès à l’Etant, à la faveur de l’adrénaline dégagée chez lui au moment de se lancer dans le vide à partir du premier viaduc, une action tendant à restituer les impressions éprouvées lors d’une chute libre à la manière du rite initiatique Vanuatu ? Vivre le grand frisson, des convulsions limite et des émotions en vrac, serait-ce « Se sentir vivant » ? Pour l’expérimenter, il nous faudrait sans doute consulter un Guide des folles sensations…

- Tiens, te voilà. Je te croyais mort !!!

- Tu vois, je suis bien vivant !

- Excuse-moi, mais je me fie plus volontiers à celui que me l’a dit.

Carlos

Débat du 29 janvier 2012: « Peut-on dire d’un Homme qu’il n’est pas humain? », animé par Sylvie Petin.

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Posted on 3rd février 2012 by Carlos in Comptes-Rendus

« Chaque jour étant à lui seul une vie », selon Sénèque, et le premier pas vers la philosophie se traduisant par l’immédiateté, après le « bombastic » rassemblement électoral du PS au Bourget, suivi d’un âpre débat télévisé entre François Hollande, son candidat à l’investiture suprême, et le ministre en charge des Affaires étrangères, envoyé au charbon par l’actuel Président de la République en attendant, ce dimanche 29 janvier 2012, sa propre prestation destinée à annoncer les conclusions de son « sommet de crise » et projets d’avenir liés au « A » dans un esprit de Chancellerie, au Café des Phares®, c’était à Sylvie Petin qu’il advenait le rôle d’additionner nos vies et d’illuminer nos existences, animant le débat « Peut-on dire d’un Homme qu’il n’est pas humain ? », le sujet ayant reçu la majorité des voix dans une confrontation avec trois autres des quatorze propositions.

Il s’agissait là d’une Synecdoque, figure de style qui consiste à prendre la partie pour le tout, c’est-à-dire, le genre pour l’espèce, mais faisons comme si rien n’était et tournons en rond ; ça donne l’impression d’aller loin.

On a qualifié donc la chose de paradoxe, fait référence à la « banalité du mal », une barbarie qui est en nous et s’appliquée à la destruction de l’autre, tout en nous étonnant des figures exceptionnelles qu’illustrent la vie des Hommes, établi la différence entre ceux-là et la machine ou évoqué la musique, la parole, le corps, le cœur, l’esprit, le mondain même, qui serait « un autre », aventure du désir qui, ainsi que les idées, ne se partagerait pas, ou l’idée d’éthique appelant à l’impératif catégorique de Kant, à Levinas, Ricoeur, John Rawls, la place de l’autre, le jeu de dés, l’estime de soi, l’humanisme qui nous vient de la Renaissance, etc., jusqu’à ce que quelqu’un se livre disant que « la philo n’est qu’un bricolage ».

En effet, qui a soutenu qu’un Homme n’est pas humain si, par définition, l’élément « hum- » qui est à l’origine du substantif, fonde également l’adjectif ? Qui a prétendu qu’un Homme n’est pas humain si, par ailleurs, Aristote ajoute qu’il s’agit d’un animal politique ? Qui a affirmé qu’un Homme n’est pas humain, si seul lui, parmi tous les animaux, a un langage qui le relie aux autres, permettant ainsi d’exprimer ses sensations, agréables ou pas, susceptibles d’être dès lors partagées à loisir ?

Voyons, donc ! Bien qu’agressif, on le sait d’expérience, l’Homme jouit de la faculté de joindre l’utile à l’agréable et, passant de la violence à la raison, il entreprit de se concerter dès lors avec ses congénères, afin d’élaborer des règles pratiques pour vivre ensemble et ne pas subir les désagréments de la nature. Il ne naît pas « Homme », il le devient. Du latin « Homo », une acception purement objective, (pas « humus », comme il a été conjecturé), le mot « humain » n’a d’autre intention valorisante que celle attribuée à l’être compréhensif et sensible aux maux d’autrui.

Ainsi, un Homme (mâles et femelles confondus) n’est pas considéré comme un Humain, mais comme un Sauvage, s’il NE PARLE PAS, et des exemples abondent, tels les cas de l’Enfant Mouton d’Irlande (1640), l’Enfant Ours de Lituanie (1669), la Fille d’Orenburg (1717), Peter de Hameln (1724), Victor de l’Aveyron (1790), Amala et Kamala, les Fillettes-louves de l’Inde (1920), Andrej, élevé par un chien de garde dans la région de Altaï (2004), ou Kaspar Hauser, le môme séquestré durant 16 ans en Allemagne (1828) jusqu’à, plus près de nous, 2009, Natacha, une enfant de 5 ans qui aboie parce qu’enfermée avec chiens et chats dans une chambre en Sibérie, et une autre Natascha, Natascha Kampusch, enlevée et séquestrée pendant 3096 jours jusqu’à sa fuite en Août 2006, (avant donc de venir à perdre l’usage de la parole). Folie, violence, ou manque d’humanité ?

Folie, violence, OK. Mais, « manque d’humanité ? » De la part de qui ? De celui qui ne parle pas (dit « sauvage ») ou de celui qui n’a pas les dispositions empathiques qui le distinguent des animaux ? Existe-il une définition de l’Homme, en dehors de ce que sont les Hommes, en vertu de leurs différences ? Peut-on parler de Nature Humaine, du fait que rien de ce qui existe ne peut ne pas avoir de nature, alors que les différences de comportement entre les différents individus peuvent être telles, qu’ils semblent ne rien avoir en commun ? Sous quelle catégorie placer leur violence et leur monstruosité ?

De toute évidence, on ne peut pas envisager quelque chose de semblable au Phares, où les phénomènes sur lesquels nous parlons le plus sont d’ordinaire ceux que l’on maîtrise le moins, car l’événement n’est jamais tout à fait là où les gens croient l’avoir trouvé. Et pour cause ; ne cherchant pas à répondre à la question mais à nouer l’intrigue, la Philo y consiste en de simples allusions, par manque d’adhérence au réel et, giratoire, leur sens s’enroule sans cesse autour du sujet, empêchant l’avènement de quelque chose de sublime tel que l’étonnement.

Etre et ne pas être, est-ce vraiment une vie ?

Carlos